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Syrie: le Front Al-Nosra se sépare d'Al-Qaïda à l'amiable pour être fréquentable

Une semaine après l’évocation par Washington d’un accord de coopération avec Moscou contre les djihadistes, le Front Al-Nosra annonce sa séparation avec la maison-mère Al-Qaïda. Agréé par la nébuleuse de Ben Laden, ce divorce à l’amiable a pour but de mettre la formation djihadiste syrienne à l’abri de bombardements russo-américains, mais aussi de la présenter comme un groupe fréquentable.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
L'image d'Abou Mohammad Al-Jolani, chef du Front Al-Nosra, annonçant la rupture avec Al-Qaïda, diffusée le 28 juillet 2016 par Al-Manara al-Baydaa, l'organe d'information officiel du mouvement.  (Al-Manara Al-Baydaa/AFP)

Le Front Al-Nosra est mort, vive le Front Fath al-Cham (conquête de Damas en arabe). C’est ainsi que Abou Mohammad Al-Jolani a annoncé la grande mutation de ce qui n’était considéré, jusque là, que comme une succursale d’Al-Qaïda en Syrie.
 
Al-Nosra se sépare d'Al-Qaïda «pour protéger la révolution syrienne»
Dans un enregistrement diffusé par la chaîne qatarie Al-Jazeera, le chef de la principale formation armée contre le régime de Bachar al-Assad est apparu pour la première fois à visage découvert.
 
«Nous avons décidé d’arrêter d’opérer sous le nom de Front Al-Nosra et de recréer un nouveau groupe» n’ayant aucun lien avec une organisation extérieure, a-t-il indiqué. Une décision visant, selon lui, à «protéger la révolution syrienne» et à faire cesser des bombardements meurtriers pour la population civile.
 
Chiffré entre 8 et 15.000 combattants selon les experts, ce groupe islamiste armé s’était constitué en janvier 2012, c'est-à-dire moins d’un an après le soulèvement pacifique syrien réprimé dans le sang.

Un divorce par consentement mutuel 
En avril 2013, le Front Al-Nosra prête allégeance à Ayman al Zawahiri, le successeur de Ban Laden à la tête d’Al-Qaïda, qui en fera son unique branche en Syrie. C’est le même Zawahiri qui vient de donner son feu vert à une telle séparation.
 
«Vous pouvez sacrifier sans hésitation les liens organisationnels s’ils sont un obstacle à votre unité, et travailler de façon autonome», avait en effet déclaré en amont le numéro un d’Al-Qaïda, précisant que «la fraternité islamique parmi nous est plus forte que toute affiliation organisationnelle».
 
En prenant ses distances avec la nébuleuse fondée par Ben Laden, le nouveau Front Fath Al-Cham, en lutte contre Daech et le régime à la fois, confirme sa volonté de maintenir les alliances avec les autres groupes armés, y compris ceux soutenus par Washington.
 
Une alternative à la dispersion politique et militaire de l'opposition
Une manière de se poser désormais comme groupe fréquentable, voire comme alternative à la dispersion politique et militaire de l’opposition syrienne face au régime de Bachar al-Assad.
 
Ce n’est pas la première tentative de Abou Mohammad Al-Jolani de faire lever l’étiquette de terroriste sur son organisation.

Dans un précédent entretien avec la chaîne Al-Jazeera où il n’apparaissait que de dos, le 27 mai 2015, il avait assuré que sa mission en Syrie était de «faire chuter le régime, ses symboles et ses alliés comme le Hezbollah», et qu’il n’était pas prévu de lancer des attaques de Syrie contre l’Occident.

Une fin de non-recevoir de Washington
Dans son souci de rassurer les Occidentaux sans renier son idéologie salafiste, Al-Jolani était allé jusqu’à s’engager à protéger les minorités syriennes. Les Alaouites ne seront pas tués, avait-il assuré, «s’ils désavouent Assad, s’ils ne nous combattent pas et s’ils reviennent dans le giron de l’islam».
 
Quant aux chrétiens, souvent accusés de soutenir le régime, l’émir d’Al-Nosra s’est engagé à ne pas les combattre s’ils s’acquittaient de la jizya, l’impôt dû par les non musulmans.
 
La nouvelle opération séduction du mouvement djihadiste s’est déjà attiré un premier rejet américain. Le général Joe Votel, chef du commandement militaire américain au Moyen-Orient, estime que ce groupe reste menaçant et lié en réalité à Al-Qaïda. «Nous devrons continuer de nous préoccuper d’eux à long terme», a-t-il prévenu.

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