Reportage Syrie : la route entre Alep et Damas, symbole des années de guerre entre les rebelles et le régime

Alep, la deuxième ville de Syrie, a été ravagée par les bombardements du régime et de ses alliés. Beaucoup d’habitants avaient fui devant la violence de la répression dans les premières années du soulèvement contre Bachar al-Assad. Aujourd’hui, ils prennent le chemin du retour.
Article rédigé par Marie-Pierre Vérot, Jérémy Tuil
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un habitant de Hama brandit les drapeaux de la nouvelle Syrie, le 12 décembre 2024. (MARIE-PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Un paysage de désolation… Des faubourgs de Damas jusqu’à Alep, sur plus de 300 km, c’est comme si l’on remontait le fil des crimes des Assad, père et fils. 

Une succession de bâtiments dévastés, de façades éventrées, piquées d’impacts de balles : on voit partout des stigmates des bombardements de Bachar al-Assad pour mater la rébellion des printemps arabes. Puis se superposent tous les signes de la marche éclair des rebelles jusque dans la capitale : véhicules renversés, tanks abandonnés.

De Damas à Alep, un paysage de désolation, ravagé par des années de guerre. (MARIE-PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Dans un hangar, des blindés de l’ère soviétique et un tas d’obus de mortier que les rebelles ont saisis. L’un d’eux s’approche : "Bachar est un porc, un infidèle, il est l’ennemi de Dieu, lance-t-il. Il a tué des musulmans mais aussi des chrétiens, il a tué des gens de tous les cultes, même des alaouites, sa propre ethnie. Mais heureusement, Dieu nous a donné la victoire".

Quelques checkpoints que l’on passe sans difficultés, et soudain sur le bord de la route, à côté d’un véhicule abandonné toutes portes ouvertes, deux corps. Hossein n’en revient pas : "On a vu deux corps sur le bas-côté de la route. Ils étaient tout gonflés, sans doute parce qu’ils sont morts depuis cinq jours”. D’autres cadavres jonchent la route un peu plus loin. Puis on traverse Hama, théâtre du terrible massacre commis par Hafez al-Assad en 1982.

Mais aujourd’hui c’est la fête ! Les habitants se pressent sur les bords du fleuve Oronte. Ils se prennent en photo avec les groupes armés qui font le signe de la victoire. Partout flottent les drapeaux de la nouvelle Syrie.

Sur la route d'Alep, à Hama, les habitants se pressent pour se prendre en photo avec les rebelles, le 12 décembre 2024. (MARIE-PIERRE VEROT / RADIO FRANCE)

Ahmed s’est arrêté pour prendre un café. Originaire d’Alep, il habite aujourd’hui Dubaï mais est revenu voir à quoi ressemble son nouveau pays. Il se dit heureux d’être débarrassé d’un bourreau mais n’est pas forcément décidé à revenir s’installer. "Je verrai. Je pense que nous avons besoin de temps, confie-t-il. Aujourd’hui tout le monde est content et pense que ça va bien. Mais nous n’avons pas de gouvernement, chacun peut faire ce qu’il veut. Il n’y a pas de sécurité." 

Tout le long de la route, les portraits de l’ancien président sont à terre ou déchirés. À l’entrée d’Alep, deux immenses panneaux portent les visages des nouveaux leaders. Une autre affiche de propagande présente les groupes armés au pied de la citadelle millénaire d’Alep avec un slogan : "Nous sommes l’épée, vous êtes les boucliers".

Syrie : reportage sur la route entre Alep et Damas de Marie-Pierre Vérot et Jérémy Tuil

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