: Vidéo Chute de Bachar al-Assad : on a visité une usine du régime qui produisait des tonnes de captagon à Damas, en Syrie
C'était le principal moteur économique du régime de Bachar-al-Assad : le captagon. Les traces d'un vaste trafic illégal de cette drogue de synthèse apparaissent depuis la chute du régime. Le captagon est une drogue de synthèse très prisée de la jeunesse aisée du golfe Persique, notamment en Arabie saoudite. Une drogue qui "donne un sentiment d'invincibilité", selon les experts de la question. La Syrie de Bachar al-Assad "est devenue le plus grand producteur de captagon sur Terre", déclarait dimanche 8 décembre Abu Mohammed al-Joulani, le leader d'HTS, qui a ajouté ensuite que "la Syrie va être purifiée".
Franceinfo a visité l'un de ces sites de production. Avant de servir à produire du captagon, c'était une usine de chips, son propriétaire Fares Omar al-Tout, qui a été exproprié, a découvert dimanche 8 décembre ce que son entreprise était devenue. "Ce sont des tonnes de drogues qu'il y a ici, avec tous les produits nécessaires pour fabriquer le captagon, décrit-il. Toutes les machines également. Une entreprise totalement fonctionnelle avec tout de A à Z, de la production à la distribution. Avec la quantité de drogue qu'il y a dedans, on pourrait détruire tout un pays."
À l'intérieur, on retrouve toute la matière première, l'acide chlorhydrique, le benzène, l'éther de pétrole et l'acétate d'éthyle, un solvant souvent utilisé dans la production de drogue. Il y a des poudres et des liquides dans des quantités très importantes.
Outre la production, cette usine servait aussi à conditionner les pilules pour les exporter. On en retrouve dissimulées, par exemple, dans des stabilisateurs électriques, des boîtiers de 70 cm de haut, neufs, vidés de l'intérieur puis garnis de bobines en cuivre, elles-mêmes bourrées de pilules. De nombreux objets en étaient remplis, même de plus insolites comme des fruits en plastique ou même des portes. Il est difficile de donner une estimation du nombre de pilules retrouvées dans l'usine, mais il y en a des centaines de milliers. "Tout ça c'est avec l'appui de Bachar-al-Assad, c'est lui le responsable, lâche Amar Ahmed al-Zarihi, l'un des chefs d'un groupe rebelle de Damas. Voilà ce que le régime produisait en Syrie et qui était exporté, voilà toute la production de ce régime corrompu soutenu et défendu par d'autres pays, qui savaient très bien que c'était le régime le plus corrompu du monde."
Chaque jour, dans des hangars ou des bases militaires, les rebelles découvrent plus de captagon. Le frère de Bachar al-Assad, Maher, était le très redouté chef de la Quatrième division, l'unité d'élite de l'armée syrienne, et passait pour l'une des têtes du réseau de captagon syrien. Cette industrie pesait, selon différentes estimations, au moins 10 milliards de dollars, soit bien plus que toutes les exportations légales de la Syrie réunies.
Que va faire le nouveau régime ?
Pour l'instant, les intentions du nouveau régime syrien sont floues. Un stock, retrouvé à l'aéroport militaire de Mazzeh, a été brûlé. Mais ce cas semble isolé, les groupes rebelles veulent désormais attendre qu'un nouveau gouvernement se mette en place et prenne une décision. L'un des chefs d'un groupe rebelle de Damas explique qu'il faut faire disparaître la drogue correctement, sans créer de dommages. "Je pense que brûler tout ça n'importe comment pourrait empoisonner les humains et les animaux autour, explique Amar Ahmed al-Zarihi. Il y a plusieurs groupes qui ont une grande histoire et qui ne veulent pas ruiner leur réputation (et donc arrêter la commercialisation) mais il y a aussi d'autres groupes plus récents qui pourraient ne pas être de cet avis."
"En ce qui me concerne ma décision est claire : ne pas continuer à commercialiser cette drogue et arrêter tous ceux qui pourraient en avoir l'idée."
Amar Ahmed al-Zarihi, chef d'un groupe rebelle de Damasà franceinfo
Le chef du HTS, Abu Mohammed al-Joulani, veut aussi en finir avec la production de cette drogue, qui va à l’encontre des principes de l'islam. Il est toutefois possible que d'autres groupes rebelles dans d'autres parties du pays continuent d'en produire et d'en exporter.
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