Syrie : la communauté internationale demande une enquête des Nations unies
Le bombardement mené mercredi par l'armée syrienne sur des positions rebelles à Damas survient alors qu'une vingtaine d'inspecteurs des Nations unies est en Syrie depuis dimanche.
Ils ont reçu l'accord du régime de Bachar al-Assad pour enquêter sur différents sites et déterminer si, oui ou non, des armes chimiques ont été utilisées depuis le début du conflit. Les pays qui se sont exprimés depuis mercredi matin se tournent donc tous vers cette délégation d'inspecteurs, lui demandant de se rendre sur le site incrimé.
L'Union européenne et les Etats-Unis réclament une enquête
La chef de la diplomatie de l'UE Catherine Ashton a lancé mercredi un appel en ce sens, expliquant dans un communiqué que cette attaque devait faire l'objet d'une enquête "immédiate et approfondie ".
"Nous avons vu avec une grande préoccupation les informations concernant
une possible utilisation d'armes chimiques par le régime syrien. De telles
accusations doivent faire l'objet d'une enquête immédiate et approfondie." (Catherine Ashton)
Pour l'UE, la mission d'experts de l'ONU présente en Syrie "doit pouvoir bénéficier d'un accès total et sans
obstacle à tous les sites du territoire syrien " où elle souhaite se rendre,
précise le communiqué. Sur Twitter, le compte de la diplomatie européenne a jugé que tout usage d'armes chimiques par le régime syrien était "inacceptable ".
Washington a rejoint cette position, demandant "formellement aux Nations unies d'enquêter d'urgence ".
Plusieurs pays européens et la Ligue arabe préoccupés
Cette requête a fait suite aux nombreuses réactions de plusieurs diplomaties en Europe et dans le reste du monde.
Lors de son point presse hebdomadaire mercredi en fin de matinée, la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem avait fait part de l'intention de François Hollande "de demander à l'ONU qu'elle puisse se rendre sur les lieux de l'attaque et procéder à une enquête pour que toute la lumière soit faite ".
Laurent Fabius lui a emboîté le pas en marge d'une réunion extraordinaire sur l'Egypte entre ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne à Bruxelles. "La France demande que immédiatement la mission de l'ONU (...) puisse aller enquêter sur place" , a-t-il expliqué. Si il y a eu massacre (...), ce serait une atrocité sans précédent. " Egalement présent à Bruxelles, le ministre allemand Guido Westerwelle a jugé que ces
accusations "très sérieuses " devaient être confirmées ou non "aussi vite que
possible ".
Dans un communiqué (en anglais), c'est le ministre britannique des Affaires
étrangères William Hague qui s'est dit "profondément préoccupé par les
rapports qui font état de centaines de personnes, parmi lesquelles des enfants,
tuées dans des bombardements et une attaque à l'arme chimique dans des zones
rebelles près de Damas ". ****
Autre réaction sur Twitter avec le ministre suédois des Affaires étrangères Carl Bildt qui a également fait appel aux Nations Unies. "Des enquêteurs de l'ONU doivent être autorisés d'urgence à avoir accès à
l'endroit des attaques présumées avec des armes chimiques dans la banlieue de
Damas ", a-t-il écrit mercredi sur le réseau social.
Enfin, le Luxembourg, la Corée du Sud, l'Arabe Saoudite, la Turquie et la Ligue arabe ont toutes appelé les enquêteurs des Nations unies à mener une enquête au plus vite.
"Le silence de nos amis tue "
Si les pays arabes en appellent également à l'intervention des Nations unies, ils sont très critiques sur la passivité de l'organisation internationale.
L'attaque la plus virulente est venue de George Sabra, un dirigeant de la Coalition nationale de l'opposition : "Où est la communauté internationale. Où est son honneur ? ", a-t-il martelé lors d'une conférence de presse à Istanbul. "Le régime syrien se moque de l'ONU et des grandes puissances quand il
frappe près de Damas avec des armes chimiques alors que la commission d'enquête
internationale se trouve à quelques pas " de là, a-t-il ajouté.
"Celui qui nous tue et tue nos enfants, ce n'est pas seulement le régime.
L'indécision américaine nous tue. Le silence de nos amis nous tue. L'abandon de
la communauté internationale nous tue, l'indifférence des Arabes et des
musulmans, l'hypocrisie du monde que nous croyions libre nous tue" (Georges Sabra)
Même son de cloche du côté du chef de l'opposition syrienne Ahmed Jarba, qui s'est exprimé sur la chaîne Al-Arabiya pour demander au Conseil de sécurité de "tenir une réunion urgente
pour assumer ses responsabilités face à ce massacre ".
Quant à la Ligue arabe, elle a dénoncé dans son communiqué un "crime ayant fait des centaines de victimes parmi les civils syriens innocents ", demandant à ce que ses auteurs soient traduits "devant la justice pénale internationale ". Elle affirme être "très surprise que ce crime ait été commis alors même que sont présents les enquêteurs de l'ONU ".
Seule voix discordante : la Russie
Fidèle soutien du régime de Bachar al-Assad, la Russie a dénoncé mercredi ce concert de soupçons, estimant qu'il s'agissait d'une "provocation planifiée à l'avance ".
Le ministère des Affaires étrangères russe affirme que ces accusations d'utilisation d'armes chimiques "ne sont pas vérifiées ", et dénonce "une campagne d'information agressive ". "Tout cela nous fait penser que nous faisons face une nouvelle fois à une
provocation planifiée à l'avance ", a ajouté le ministère.
Pour le moment, les autorités syriennes démentent avoir eu recours à des armes chimiques. Elles accusent les chaînes de télévision satellitaires de diffuser des informations "infondées ".
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