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Vidéo Prisons russes : des viols filmés pour extorquer des aveux ou de l'argent

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Envoyé spécial. Prisons russes : des viols filmés pour extorquer des aveux ou de l'argent (Envoyé spécial / France 2)
Article rédigé par France 2
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Leur parole est extrêmement rare. Dans un reportage diffusé dans "Envoyé spécial" le 27 janvier 2022, plusieurs détenus racontent comment ils ont subi coups, sévices et violences sexuelles dans une prison russe. Dans cet extrait, l'un d'eux donne des explications sur un système de violences qui semble tout droit hérité du goulag.

Le 27 janvier 2022, dans "Envoyé spécial", un lanceur d'alerte révèle un système de torture dans les prisons russes. Réfugié en France, Sergueï Saveliev a confié aux journalistes une vingtaine de vidéos d'une extrême violence. Elles contiennent des images insoutenables de tabassages, de viols et d'humiliations. Selon lui, dans cette prison de Saratov, au sud de la Russie, ces vidéos étaient filmées avec des enregistreurs confiés à d'autres détenus par les gardiens eux-mêmes. 

Pourquoi les auteurs de ces exactions filment-ils leurs propres crimes ? Ce système qui semble tout droit hérité du goulag aurait-il d'autres visées que la violence pure ? "Envoyé spécial" a obtenu le témoignage, extrêmement rare, d'un ancien détenu de la prison de Saratov. La vidéo qu'il évoque dans cet extrait n'a pas été retrouvée, mais il dit avoir été filmé, et décrit des sévices qu'il aurait subis.

Le viol filmé, une technique d'humiliation et de chantage 

Lors de sa détention, Alexeï Makarov a été accusé d'avoir préparé une mutinerie. On a exigé de lui des aveux écrits. Convoqué à 14 heures dans les quartiers administratifs de la prison, il a tout de suite compris ce qui l'attendait en voyant la "brigade de tabassage". "Ils ont relu le papier que j'avais écrit, raconte-t-il, et ils m'ont dit 'Mon vieux, ça va pas passer'..." Après cinq minutes de "passage à tabac", il dit avoir subi deux heures de viol de la part d'autres détenus, "jusqu'à 16h30, jusqu'au contrôle du soir".

Quelques jours plus tard, nouveau viol, raconte-t-il, cette fois devant une caméra. "On a un kompromat sur toi", lui auraient dit ses tortionnaires : une vidéo compromettante qu'ils auraient menacé de diffuser sur YouTube.

"Pour que tout ça ne sorte pas, les gars transféraient des sommes folles"

Ce "kompromat" carcéral, ce serait le moyen de pression ultime pour l'administration, explique Alexeï Makarov : "C'est pour tenir les gens entre leurs griffes, parce qu'il y a différentes castes en prison. En commettant de tels actes, en violant quelqu'un, en le filmant, chacun sait très bien que si ça se sait, la personne concernée se retrouvera dans la caste la plus basse, celle des humiliés."

Cette technique de chantage serait utilisée de diverses manières, détaille-t-il. Ces vidéos serviraient "à soutirer des informations, à recruter des indics ou, le plus souvent, à extorquer de l'argent". Lui-même dit avoir versé 50 000 roubles (environ 600 euros).

Extrait de "Russie : le mal des prisons", une enquête diffusée dans "Envoyé spécial"' le 27 janvier 2022.

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