Russie : une économie puissante mais dépendante de la demande extérieure
La Russie de Vladimir Poutine a de nombreux atouts. Mais sur le plan économique, elle reste très dépendante de ses ressources minières. Or, la richesse tirée de ces ressources est à la merci de la demande internationale.
La Russie exporte beaucoup. Mais ces exportations sont à 70% des matières premières (2e producteur mondial de pétrole et de gaz en 2011). L’Europe de l’ouest est un de ses principaux clients, mais de là à envisager un boycott par l’Europe du gaz russe… Pourtant, la crise a déjà pesé sur l’économie russe. La bourse a chuté, le rouble, déjà faible, a baissé et Moscou a dû remonter ses taux d’intérêts.
Ces mauvaises nouvelles pour la Russie s’inscrivent dans un climat morose. «En 2014, il ne faut pas s’attendre à une forte croissance économique. Elle pourrait être faible (1 à 1,5%) malgré l’effet positif des Jeux Olympiques de Sotchi», pense Maxime Petronevitch, analyste en chef du Centre des prévisions économiques de Gazprombank. «L’année 2014 présente des défis pour l’économie russe. Les tendances négatives de 2013 vont perdurer. Les experts pensent que les prévisions du Ministère du développement économique ne se réaliseront pas», peut on lire dans Russie d’Aujourd’hui.
Inflation à 6,5% La Russie, comme d’autres pays émergents, «fait face au problème de la stagflation, mélange de ralentissement de la croissance et de poussée inflationniste», a reconnu Ksenia Ioudaeva, vice-présidente de la Banque centrale. En 2013, l’inflation s’est élevée à 6,5%, dépassant les objectifs officiels, rappelait Les Echos. Dans ce contexte, la poursuite de la chute du rouble n'est pas une excellente nouvelle.
Pourtant, tout ne va pas si mal pour les quelque 140 millions d'habitants de la Russie de Vladimir Poutine. «La Russie bénéficie d’une croissance économique respectable (3,5 % en 2012), dispose des troisièmes réserves monétaires mondiales (après la Chine et le Japon) et fait figure de championne du désendettement (la dette russe est l’une des plus faibles au monde à hauteur de 10% du PIB)», écrit la Fondation Res publica (présidée par Jean-Pierre Chevènement).
Pour David Teurtrie, docteur en géographie et spécialiste de la Russie, qui fait cet article pour Res Publica, «si en 2002, elle était considérée comme la 16e économie mondiale (derrière l’Australie et les Pays-Bas), elle s’est hissée dix ans plus tard à la 9e place, juste devant l’Inde». Et de citer quelques points forts de l’économie russe. «Si les exportations de produits manufacturés russes ne représentent que 20% des exportations russes, elles sont néanmoins nettement plus élevées que celles du Brésil. Il s’agit d’une situation récente qui s’explique par un renouveau des exportations manufacturières russes (plus 40% en cinq ans) dans un certain nombre de secteurs clés (aéronautique militaire, nucléaire, espace…). Même constat dans le domaine des services commerciaux. La Russie est notamment devenue un important exportateur de services informatiques.»
«Les secteurs des services (télécommunications, finance, distribution) ont connu un essor tout à fait remarquable au cours de la dernière décennie», note Paris à propos de la Russie.
Assez critique sur le structures de l’économie russe, l’OCDE reconnaît que «les taux d’emploi et d’utilisation des capacités sont proches de leurs records d’avant crise Le taux d’emploi est de 69% contre 65% dans la zone euro».
Quelle croissance en 2014 ?
Pour autant, l’économie russe a du mal à se sortir d’un certain nombre de pesanteurs. La croissance a reculé en 2013 (1,5%) par rapport à 2012 (3,4%) et ne retrouve pas ses taux d’avant la crise même si la croissance prévue pour 2014 est officiellement de 2,3%. Pour l’OCDE, «Des ressources considérables sont englouties dans des activités peu productives. La formation continue, les programmes d'activation et la garantie de revenu temporaire pour les chômeurs sont encore insuffisamment développés. Une rotation excessive de la main d'œuvre décourage l'apprentissage le long de la vie professionnelle et limite les activités d'innovation. Les partenaires sociaux sont faibles et la mise en œuvre des conventions collectives est difficile. Même si les taux de scolarisation sont très élevés, la médiocre qualité de l'enseignement et l'insuffisance des liens avec le secteur des entreprises limitent l'offre de compétences adaptées aux besoins des employeurs.»
L’organisation internationale souligne aussi le peu d’efficacité de la production russe qui est l’une des plus gourmandes en énergie et des plus polluantes au monde. De plus, l’environnement juridique n’aide pas toujours à l’investissement étranger même si l’OCDE note délicatement que «les autorités semblent avoir adopté une attitude plus énergique en matière de lutte contre la corruption et de renforcement de la protection juridique des entreprises».
Problème démographique
Autre faiblesse de la Russie : sa démographie, même si pour la première fois depuis 1991, le pays a connu une hausse naturelle de sa population. Sa population est en recul et «l’offre de main d’œuvre souffre de la faiblesse des taux de fécondité, le niveau élevé des taux de mortalité prématurée et la retraite anticipée», note l’OCDE.
Malgré son sous-sol, l’économie russe n’a pas encore terminé sa transition après l’effondrement de son système avec la fin de l’URSS. La Russie n’a pas encore réussi à totalement refonder une production propre. Et les autorités sont conscientes des faiblesses du système. «Sur fond de crise mondiale, la situation en Russie ─ si l'on en juge d'après les indices formels ─ semble suffisamment stable: l'économie se développe, même si son développement n'est pas rapide, le budget est équilibré, les dettes publiques et le taux de chômage ne sont pas élevés, l'inflation est sous contrôle. Cependant, et ceci est clair pour tout le monde, la dynamique de notre développement ne manque pas d'inquiéter», déclarait récemment M. Medvedev, le Premier ministre de Vladimir Poutine.
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