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Couronnement du roi Charles III : "Cela fera un peu oublier la difficulté du quotidien à pas mal de Britanniques", souligne un spécialiste

Pour Christian Lequesne, professeur à Sciences Po, les difficultés économiques n'empêchent pas les Britanniques de soutenir "la royauté et tout son faste".
Article rédigé par franceinfo
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La devanture d'une boutique à Londres décorée pour le couronnement de Charles III. (NICOLAS TEILLARD / FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Le couronnement du roi Charles III samedi 6 mai à Londres "fera un peu oublier la difficulté du quotidien à pas mal de Britanniques", souligne Christian Lequesne, professeur à Sciences Po et spécialiste des questions européennes.

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Huit mois après avoir accédé au trône après la mort d'Elizabeth II, le souverain de 74 ans, suivi de la reine consort Camilla, sera couronné en grande pompe à l'abbaye de Westminster. "On peut être très affecté par la situation économique et en même temps soutenir le couronnement, la royauté et tout son faste", observe Christian Lequesne.

franceinfo : N'est-ce pas un étonnant contraste entre le faste de ce couronnement et un pays empêtré dans une crise profonde ?

Christian Lequesne : Effectivement, ça va être une journée de faste, qui sera marquée par des cérémonies flamboyantes, alors que ce pays souffre d'une crise économique importante. Le principal problème économique, c'est l'inflation à deux chiffres depuis plusieurs mois, plus de 10 %. Les prix des denrées alimentaires n'ont jamais été aussi hauts depuis 45 ans. Et tout cela affecte la population et en particulier les gens les plus modestes de la société britannique. Mais je crois que ça ne les empêchera pas de regarder le couronnement à la télévision, voire de se rendre à la cérémonie. 
 
Vous pensez que ce couronnement sera une parenthèse dans ce contexte assez difficile ? Est-ce que cela peut changer la dynamique, inverser la tendance ?  

Je pense que cela fera un peu oublier, bien sûr, la difficulté du quotidien à pas mal de Britanniques. Cependant je pense que la situation économique n'est pas un élément qui va remettre en cause le soutien à la monarchie, c'est-à-dire qu'on peut être très affecté par la situation économique, qu'on peut être très touché dans son quotidien par la difficulté de la vie et en même temps soutenir le couronnement, la royauté et tout son faste.  

Pourtant, on note un rejet de la monarchie, minoritaire certes, autour de 25 % de la population, selon les enquêtes d'opinion. Ce rejet de la monarchie, est-ce un phénomène nouveau ?  
 
C'est vrai. Alors ce chiffre n'est pas un chiffre nouveau. Il y a toujours eu environ un cinquième de la population britannique depuis 50 ans qui rejette la royauté. Mais ce rejet ne vient pas des gens les plus modestes de l'Angleterre. Ce rejet de la couronne vient plutôt des jeunes, parmi les gens éduqués et parmi ceux qui n'appartiennent pas à l'Angleterre, en particulier on observe un certain nombre d'Ecossais qui ont des sentiments indépendantistes. La Grande-Bretagne, ce n'est pas que l'Angleterre.  

Dans les transports ou dans les hôpitaux, le pays connaît des grèves massives depuis près d'un an pour les salaires, pour réclamer plus de protection de l'Etat. Est-ce que la situation peut s'améliorer à court terme ?  

Je pense que tout est lié à la question de l'inflation. Si on réussit à juguler un peu cette inflation à deux chiffres, les choses pourront se calmer mais on n'est pas parti sur ce schéma puisque c'est un pays où on a du mal à réguler. En comparaison avec la France, où on a introduit quand même un certain nombre de barrières tarifaires sur l'énergie ou on a eu des discussions entre le gouvernement et les industriels de l'alimentaire et la grande distribution pour essayer de contrôler les prix. Ces mesures n'existent pas en Angleterre. On est dans un pays où c'est la loi du marché qui fait la décision et donc je ne crois pas que la situation s'améliorera à court terme.  

Est-ce que dans ce contexte de spirale de crise économique, sociale et politique, le roi Charles III peut être une sorte de boussole ? 

Il peut être une boussole parce que la royauté incarne finalement l'identité de la Grande-Bretagne et plus encore l'identité de l'Angleterre. Donc le roi, si vous voulez, c'est l'histoire de la Grande-Bretagne, le passé glorieux. Et ce sont toutes ces choses auxquelles les Britanniques sont attachés et qui expliquent d'ailleurs pourquoi le Brexit a eu lieu. C'est en effet un pays qui est très attaché, avec une certaine nostalgie à ce qu'il a été dans le passé et peut-être que c'est le problème et un paradoxe. Ça permet, je crois, à la fois de calmer pas mal de mouvements du quotidien et en même temps, ça ne permet pas à la Grande-Bretagne d'envisager l'avenir avec objectivité et réalisme. 

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