Elections législatives au Royaume-Uni : quatre choses à savoir sur le travailliste Keir Starmer, bientôt Premier ministre après la victoire écrasante du Labour
La fin de 14 années de pouvoir conservateur outre-Manche. Les électeurs britanniques étaient appelés aux urnes, jeudi 4 juillet, pour des élections législatives anticipées décisives. Elles marquent le début d'une transition politique au Royaume-Uni, les travaillistes du Labour étant largement vainqueurs du scrutin. Le Labour a remporté 412 sièges selon la dernière estimation de la BBC, ce qui lui assure une majorité absolue à la Chambre des Communes.
Une défaite incontestable pour les Tories, qui pourraient connaître leur pire score depuis plus d'un siècle. Ils ont obtenu à ce stade 121 sièges, loin derrière les 365 sièges gagnés en 2019. Le chef de file des travaillistes, Keir Starmer, a été nommé Premier ministre par le roi Charles III vendredi, accompagné de son épouse Victoria. Il devra former un gouvernement et succéder au Premier ministre sortant, Rishi Sunak, au 10 Downing Street.
L'ancien avocat de 61 ans, anobli il y a dix ans, vient d'une famille modeste et tient une ligne modérée, vue comme trop centriste par une part de la base travailliste. Qui est cet amateur de football et fan d'Arsenal, dont certains disent qu'il manque de charisme ? Franceinfo dresse le portrait du futur dirigeant britannique.
1 Il est issu d'un milieu modeste
Derrière son titre de "Sir", le leader travailliste rappelle qu'il vient d'un milieu assez modeste, avec un père outilleur et une mère infirmière. "Il y avait des moments difficiles (...). Je sais ce que ça veut dire, une inflation incontrôlée", a-t-il souligné lors d'un discours de campagne, rapporte Associated Press. "Je sais à quel point la hausse du coût de la vie peut vous faire craindre le passage du facteur. 'Va-t-il apporter une nouvelle facture que nous ne pouvons pas payer ?'"
Keir Starmer, son frère et ses deux sœurs ont grandi en périphérie de Londres, précisément à Oxted, dans le Surrey. Leur mère souffrait de la maladie articulaire de Still, une affection inflammatoire rare qui l'a empêchée pendant des années de marcher. La maladie a entraîné, chez son fils, "une profonde gratitude" pour le service national de santé (NHS), pointe le Labour. La politique était déjà présente dans la famille de Keir Starmer, dont le prénom est aussi celui du fondateur du Parti travailliste, Keir Hardie. Son père était d'ailleurs un soutien du Labour.
Après la Reigate Grammar School, Keir Starmer est ensuite le premier de sa famille à suivre des études supérieures, relève la BBC. Il se lance dans un parcours de droit, d'abord à l'université de Leeds, puis à la prestigieuse université d'Oxford.
2 Avocat, il a dirigé le parquet d'Angleterre et du pays de Galles
L'enfant d'Oxted débute une carrière d'avocat en 1987 et se spécialise dans les droits humains. Il représente des syndicats et défend des prisonniers menacés de peine de mort dans les Caraïbes, en Ouganda, au Kenya ou au Malawi, précise l'université d'Oxford. Keir Starmer est aussi connu pour avoir représenté, à la fin des années 1990, des activistes écologistes accusés d'avoir distribué des brochures dénonçant les pratiques de McDonald's, notamment en matière environnementale.
Dans les années 2000, l'avocat travaille en tant que conseiller aux droits de l'homme sur les pratiques de la police d'Irlande du Nord, avant de devenir directeur des poursuites publiques, l'équivalent de procureur général. A la tête du parquet d'Angleterre et du pays de Galles dès 2008, il mène entre autres des poursuites contre des députés, accusés de profiter de leurs frais de mandat. Il poursuit aussi des journalistes pour des affaires de piratages téléphoniques ou encore des jeunes lors d'émeutes en Angleterre.
3 Il a été élu député en 2015, avant de prendre la tête du Labour en 2020
Le parcours de Keir Starmer prend un tournant politique en 2015, près de 30 ans après le début de sa carrière d'avocat. Peu après la mort de sa mère, le quinquagénaire est élu député du Labour dans la circonscription d'Holborn et de Saint-Pancras, dans le nord de Londres. Le parlementaire gagne aussi en responsabilités au sein du Parti travailliste : à l'automne 2016, il est nommé secrétaire d'Etat en charge du Brexit dans le "cabinet fantôme" du mouvement – une forme de cabinet alternatif constitué par l'opposition. Keir Starmer a pourtant voté contre la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne et appelé à un second référendum. Avant d'évacuer, en 2022, l'idée d'un retour britannique dans l'UE.
Après la débâcle travailliste des législatives de 2019, Keir Starmer succède à Jeremy Corbyn à la tête du Labour en avril 2020, recueillant plus de 50% des votes. Il promet "une nouvelle ère de confiance et d'espoir" et lutte notamment contre l'antisémitisme présent au sein du parti. Quelques mois après cette prise de fonctions, le Labour suspend son ancien leader Jeremy Corbyn, du fait de ses réserves sur une enquête accablante, fustigeant un "manque de volonté de s'attaquer à l'antisémitisme [dans le parti] plutôt qu'une inaptitude à le faire".
4 Il défend un programme plutôt centriste
Depuis 2020, Keir Starmer s'est éloigné des idées marquées à gauche de son prédécesseur. Il prône le "sérieux", "le pays d'abord, le parti ensuite" et défend une ligne plus centriste, après 14 ans de politiques conservatrices. Selon la BBC, le leader travailliste a notamment mis de côté une promesse de suppression des frais de scolarité à l'université, ou encore l'idée d'investissements annuels massifs (33 milliards d'euros) pour l'environnement. De quoi lui attirer les critiques de la frange plus à gauche de son électorat.
Dans cette campagne, le Labour a défendu la lutte contre l'évasion fiscale, la construction d'1,5 million de nouveaux logements, le recrutement de plus de 6 000 enseignants ou encore le déblocage de 40 000 rendez-vous médicaux supplémentaires au sein de la NHS. Le parti promeut aussi la création d'un "commandement de la sécurité des frontières", d'après la BBC.
La ligne politique du chef de file évolue, souligne auprès du Guardian Chris Ward, l'un de ses anciens conseillers. "Il n'a jamais été issu ou redevable d'une faction particulière du Parti travailliste. C'est la raison pour laquelle il a pu remporter la course à la direction du parti en s'appuyant sur la gauche modérée et qu'il le dirige aujourd'hui en s'appuyant sur le centre-droit." Avec pour objectif "de se rapprocher de son but, qui est de gagner les élections et de changer le pays."
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