Irlande du Nord: l'IRA occupe toujours la scène politique
Il s’agit d’un sérieux accroc au fameux accord de paix dit du Vendredi saint (Good Friday), signé le 10 avril 1998. Cet accord avait mis un terme à trois décennies d’affrontements (à l’origine de la mort de 3500 personnes) entre unionistes protestants, qui veulent que la province reste au sein du Royaume-Uni, et républicains nationalistes catholiques, qui demandent un rattachement à l’Irlande.
Peter Robinson a demandé à Londres de suspendre l’assemblée régionale (impliquant que le gouvernement de David Cameron reprenne les affaires en main). Une demandé rejetée par les autorités britanniques. Pour l’instant, le fait que son intérim soit assuré par la ministre des Finances permet d’éviter des élections. Et laisse du temps pour la recherche d’une solution. De son côté, Gerry Adams, le président du Sinn Fein, parti républicain longtemps considéré comme l’aile politique de l’IRA, a estimé que même fragilisées, les institutions nord-irlandaises étaient «préférables à une institution de guerre». La formation nationaliste joue aujourd’hui le jeu parlementaire.
Les tensions au sein du gouvernement de la province ne sont pas nouvelles. Mais elles ont été exacerbées par le meurtre de Kevin McGuigan, vétéran de l'IRA, abattu le 12 août 2015 devant sa maison à Belfast. Le mode opératoire de son assassinat rappelle les assassinats punitifs commis par l’IRA. Selon la police, une partie de l'organisation, qui avait annoncé en 2005 avoir définitivement déposé les armes, est «toujours largement en place». Même si ses activités semblent désormais liées au crime organisé et non au terrorisme.
L’IRA est-elle toujours opérationnelle ?
Pour les partis unionistes, l’assassinat est la preuve que, contrairement aux affirmations du Sinn Fein, le groupe républicain est toujours actif. Ce que nie le Sinn Fein : à l’écouter, l’IRA a «quitté la scène» après le cessez-le-feu de 2005. Pour Martin McGuinness, un de ses responsables et vice-Premier ministre du gouvernement de Belfast, il est «ridicule» de penser que des meurtriers de droit commun «aient la capacité de mettre à bas des institutions démocratiques qui ont le soutien écrasant du peuple irlandais».
Dès la fin août, l’UUP, deuxième parti unioniste derrière le DUP du Premier ministre, avait claqué la porte du gouvernement nord-irlandais en dénonçant le manque de crédibilité du Sinn Fein. La tension est montée d’un cran, le 9 septembre, avec l’arrestation de trois hommes, dans le cadre de l’enquête policière sur la mort de Kevin McGuigan. Parmi eux : le président du Sinn Fein en Irlande du Nord, Bobby Storey. Moins d’une heure après la démission de Peter Robinson, la police nord-irlandaise a annoncé sa remise en liberté sans conditions, rapporte Reuters.
«On ne peut pas continuer comme si de rien n’était lorsque le président de votre principal partenaire au gouvernement est arrêté» dans une affaire de meurtre, a déclaré le Premier ministre.
Reste à savoir comment la situation va évoluer. Le chef du gouvernement britannique, David Cameron, s’est dit «gravement préoccupé» par la situation. En 2002, une précédente crise avait conduit à la suspension des institutions nord-irlandaises. Il avait alors fallu cinq ans pour que les partis des deux communautés acceptent de siéger à nouveau.
«C'est un triste jour pour le processus politique en Irlande du Nord. Mais je crois qu'il importe aussi de se rappeler qu'il y en a déjà eu un certain nombre et que des solutions ont été trouvées par les dirigeants d'Irlande du Nord en s'asseyant autour d'une table et en coopérant», a déclaré de son côté la secrétaire d’Etat chargée de la province, Theresa Villiers. Histoire de dire que la province en a vu d’autres depuis la conquête de l’Irlande par Oliver Cromwell au XVIIe siècle.
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