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Intervenir en Syrie ? Le retraité Sarkozy contredit le président Sarkozy

Lorsqu'il était chef d'Etat, il estimait qu'il était impossible de lancer une opération militaire sans le feu vert du Conseil de sécurité. Il a, depuis, changé d'avis.

Article rédigé par Bastien Hugues
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, quitte l'hôtel Regina, à Paris, le 28 juin 2012. (SIPA)

POLITIQUE - La France doit-elle intervenir militairement en Syrie pour aider les rebelles qui luttent depuis plusieurs mois contre le régime de Bachar Al-Assad ? "Nous ne ferons rien tant qu'il n'y aura pas une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. (...) Chaque fois que nous sommes intervenus, en Côte d'Ivoire comme en Libye, (...) il y a eu préalablement une délibération du Conseil de sécurité, c'est quand même le droit international !" Voici ce qu'expliquait le président Nicolas Sarkozy le 2 mars 2012, à l'issue d'un sommet européen à Bruxelles. "L'intervention militaire ne peut être la réponse à toutes les crises, aussi graves soient-elles", disait-il quelques jours plus tôt, dans un entretien mis en ligne sur le site de l'Elysée

"Une intervention militaire en Syrie est exclue pour trois raisons, confirmait Alain Juppé, alors ministre des Affaires étrangères, dans un entretien à La Voix du NordPremièrement, il n'y a pas de feu vert du Conseil de sécurité. Ensuite, l'opposition syrienne elle-même est divisée sur la question. Enfin, si la société libyenne est homogène, la Syrie est composée de plusieurs minorités (...). Le risque de guerre civile est majeur."

Pour l'UMP, "la morale commande d'agir sans l'ONU"

Cinq mois plus tard, Nicolas Sarkozy n'est plus président de la République, et sa position a radicalement évolué. Derrière le communiqué publié mardi 7 août, dans lequel il souligne "la nécessité d'une action rapide de la communauté internationale pour éviter des massacres", l'ancien chef de l'Etat estime, selon ses proches, que la France peut finalement outrepasser le veto russe et chinois au Conseil de sécurité de l'ONU, et intervenir avec l'appui de la Ligue arabe et de certains pays occidentaux.

C'est aussi ce que considère l'UMP qui, via un communiqué de son secrétaire national, Philippe Juvin, estime désormais que "comme en Libye, la France doit intervenir militairement pour faire cesser les massacres en Syrie". "La morale commande d'agir maintenant sans l'ONU : avec les Turcs, la Ligue arabe et ceux qui voudront bien", juge l'UMP. 

"Personne n'imagine que la France soit le shérif du monde"

Un revirement aussitôt dénoncé par le parti socialiste. "Ce changement de pied est aussi démagogue que dangereux", déplore le député Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire national du PS aux Relations internationales, joint par FTVi. Quand il était président, Sarkozy jugeait qu'une action en Syrie sans feu vert de l'ONU était irresponsable. Maintenant, voilà qu'elle est nécessaire ! Tout ceci n'a pas de sens." "Personne n'imagine, malgré quelques tartarins de l'UMP et peut-être les arrières-pensées de M. Sarkozy, que la France soit le shérif du monde chargé d'intervenir militairement en tout et pour tout", tance le député socialiste Jean-Marie Le Guen.

Quant au ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, il voit dans cet appel de l'UMP et de Nicolas Sarkozy une volonté de "susciter une polémique". "Sur le fond, la situation de la Syrie est évidemment très différente de celle de la Libye. (...) Les différences sont si manifestes qu’aucun pays n'a demandé ni souhaité une intervention militaire, ce qui n’était pas le cas pour la Libye, souligne-t-il dans un entretien au ParisienTout ceci fait que je suis en effet surpris qu'on puisse avoir exercé d’importantes responsabilités et livrer une analyse aussi rapide…"

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