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Yémen: Washington et Paris dans le viseur d'ONG pour la vente d'armes à l'Arabie

Alors que le monde a les yeux tournés vers les horreurs de la guerre en Syrie, le conflit sanglant continue au Yémen. Dans cette guerre qui aurait déjà fait quelque 6.500 morts, les bombardements saoudiens ont été mis en cause, provoquant des demandes d’arrêts de livraisons d’armes au Royaume saoudien. Des armes qui viennent essentiellement des Etats-Unis et de France.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Des Yéménites dans l'hôpital de Médecins sans Frontières, le 16 août 2016. Cet hôpital situé dans la zone tenue par les rebelles a été bombardé par l'aviation saoudienne faisant onze morts, selon MSF. (STRINGER / AFP)

Une série de bombardements meurtriers menés par l'Arabie Saoudite au Yémen, provoquant des pertes civiles, et notamment des enfants, ont amené plusieurs ONG à protester contre les ventes d'armes au Royaume saoudien.

Pétition d'Amnesty
En France, la polémique avait déjà commencé quand les écologistes d’EELV ont accusé Paris pour son action dans la région après le bombardement d’un hôpital de Médecins sans Frontières et une école. «Le silence de la France est coupable. Ces bombardements sur des écoles ou des hôpitaux sont effectués grâce aux armes que nos dirigeants se targuent d’avoir vendues à l’Arabie Saoudite, pays qui n’hésite pas à recourir massivement à la peine de mort pour les opposants politiques», ont affirmé les Verts.

Aujourd'hui, c'est Amnesty International qui demande à la France de cesser ses livraisons de matériels militaires via une pétition.

Les ventes d'armes à l'Arabie en 2015, selon l'ONG Control Arms. (controlarms.org/)

Mais les Verts français ne sont pas les seuls à monter au créneau. L’ONG New York Contol Arms accuse aussi les ventes d'armes. En continuant à en vendre à l'Arabie Saoudite, qui dirige depuis mars 2015 au Yémen une coalition militaire contre la rébellion chiite, les principaux exportateurs d'armes qui ont signé le TCA (Traité sur le commerce des armes) se rendent coupables de «la pire des hypocrisies», a dénoncé Anna Macdonald, directrice de l'ONG Control Arms. «Chaque jour, nous voyons l'impact dévastateur de la vente d'armes et de munitions utilisées contre les civils au Yémen», a-t-elle ajouté. 

Un éditorial du New York Times a, lui, titré: «L'Amérique est complice du carnage au Yémen.»

Conférence sur les armes à Genève
Les ONG se mobilisent à l'occasion la deuxième Conférence des Etats parties au Traité sur le commerce des armes (TCA), adopté par l'Assemblée générale de l'ONU le 2 avril 2013 et entré en vigueur le 24 décembre 2014. Conférence qui se tient du 22 au 26 août à Genève. 

Parmi les signataires, figurent la France et le Royaume-Uni. Les Etats-Unis l’ont signé mais pas ratifié… Le TCA prévoit notamment l'interdiction d'exporter des armes conventionnelles si l'Etat partie a des raisons de penser que celles-ci pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l'humanité, des crimes de guerre ou des attaques dirigées contre des civils (voir notamment l'article 6 du Traité sur le Commerce des Armes).

Selon Control Arms, en 2015, la France a autorisé la vente d'armes à l'Arabie Saoudite à hauteur de 18 milliards de dollars (16 milliards d'euros). Au cours de la même période, les Etats-Unis ont approuvé la vente d'armes à Ryad pour 5,9 milliards de dollars (5,2 milliards d'euros). Pour le Royaume-Uni, ce chiffre s'est établi à 4 milliards de dollars (3,5 milliards d'euros).

Le débat touche d'ailleurs aussi le Royaume-Uni avec cette accusation de l’ONG Oxfam qui affirme que Londres est un des plus importants «contrevenant» au traité sur les armes. 


Une guerre de 17 mois
Et si les critiques montent de partout, c’est que sur le terrain la situation est totalement bloquée. Un conflit «très largement négligé par nos diplomates», une crise humanitaire «beaucoup plus grave qu’on veut bien le dire», selon les termes du politologue Laurent Bonnefoy, chercheur au CNRS. Depuis mars 2015, la guerre fait rage entre les opposants houthistes (accusés par Ryad d’être soutenus par Téhéran) et la coalition emmenée par l’Arabie Saoudite.
 
Et pendant que la guerre s’enlise, Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA) et à la branche locale de l’organisation Etat islamique (EI) étendent leur influence dans le sud du pays...

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