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Travail, amour et cadeaux : comment l'EI vend du rêve à ses recrues occidentales

Alors que le nombre d'Occidentaux sur les terres du groupe Etat islamique est évalué par les spécialistes à 3 000, dont environ 550 femmes, francetv info revient sur la façon dont l'organisation terroriste séduit les jeunes filles. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des femmes marchent à Raqqa (Syrie), bastion des jihadistes de l'Etat islamique, le 31 mars 2014.  (REUTERS  )

Trois fugueuses britanniques font la une de l'actualité outre-Manche : elles ont rejoint la Syrie, vraisemblablement après être entrées en contact avec Aqsa Mahmood, une jeune femme qui serait partie l'an dernier de Glasgow (Ecosse) pour épouser un combattant de l'organisation Etat islamique (EI). Sur son blog, cette dernière chante les louanges de la vie sous le régime des terroristes jihadistes. Une propagande qui masque une cruelle réalité, déplore une spécialiste citée dimanche 8 mars par l'AFP.

Alors que le nombre d'Occidentaux sur les terres de l'EI est évalué par les spécialistes à 3 000, dont environ 550 femmes, francetv info revient sur la façon dont l'organisation terroriste séduit les jeunes, à commencer par les adolescentes. 

La promesse faite aux filles : un mari, un travail, une maison et des cadeaux

"Les filles qui rejoignent cette organisation sont en quête d'aventures (...) et certaines se projettent dans un monde imaginaire, en rêvant de se marier avec un combattant", assure Hassan Hassan, auteur du livre EI : à l'intérieur de l'armée de la terreur. Sur son blog en anglais, Aqsa Mahmood s'adresse à elles : intitulé "le journal de Mouhajira" ("le journal d'une émigrée"), il est devenu l'un des principaux outils de propagande féminine de l'EI. "Ici, pas de loyer à débourser. Les maisons sont gratuites. Nous ne payons ni l'eau, ni l'électricité. En plus, nous recevons chaque mois un colis de nourriture, avec des spaghettis, des pâtes, des boîtes de conserve, du riz, des œufs", y écrit la jeune femme.

Ce territoire, ajoute-t-elle, offre des emplois, notamment dans les domaines de l'éducation et de la santé, pour les femmes qui veulent être actives. Selon le guide de "bonne conduite" à destination des femmes de l'EI, traduit en février, "les épouses peuvent quitter la maison si elles sont médecins pour femmes ou enseignantes". 

Puisque le mariage est valorisé, l'époux jihadiste obtient sept jours de congés pour célébrer ses noces, raconte la blogueuse, ajoutant que les épouses peuvent choisir leur dot. Souvent une kalachnikov. "Les mariés reçoivent 700 dollars et s'il n'y pas de feu d'artifice, il y a des tirs de joie et de nombreux Takbir", le célèbre "Allah Akbar" ("Dieu est grand"), raconte-t-elle.

"Il y a plein de maisons et d'avantages matériels pour te satisfaire, toi et ta famille", clame également la revue de propagande anglophone en ligne, Dabiq. Selon des responsables irakiens, l'EI distribue en effet à ses combattants les maisons désertées par les habitants qui ont fui les combats. 

La réalité : une propagande qui masque "un projet vide"

Pour la chercheuse Lina Khatib, directrice du Centre Carnegie pour le Moyen-Orient, basé à Beyrouth, les propagandistes comme Aqsa Mahmood agissent sous la supervision de l'Etat islamique. Si cette blogueuse "existe réellement, il ne fait aucun doute qu'elle est contrôlée par l'EI. Elle est un instrument du recrutement", dit-elle. Les experts affirment que beaucoup d'"émigrants" sont choqués par ce qu'ils découvrent sur place. "J'ai interrogé deux jeunes gens qui ont réussi à revenir. Ils étaient amers et avaient le sentiment d'avoir été roulés", assure Lina Khatib.

Au lieu de l'"utopie" promise par le groupe terroriste, ils ont découvert un lieu régi par "l'oppression et l'interdiction de réfléchir". "Ils avaient le sentiment de s'être embarqués dans un projet vide", selon la chercheuse.

Une fois le rêve évanoui, de nombreuses recrues s'aperçoivent que sortir des mailles de l'EI peut leur coûter la vie. Plus de 120 personnes auraient ainsi été tuées entre octobre et décembre en voulant s'échapper des territoires ddu groupe, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). 

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