Recul du groupe État islamique en Irak : "Cela ne signifie pas que sa capacité de nuisance soit annihilée"
Pour David Rigoulet-Roze, chercheur à l'Institut français d'analyse stratégique, malgré le recul du groupe État islamique en Irak, il y a toujours la nouvelle génération qui constitue "des bombes à retardement".
Le groupe Etat islamique perd du terrain en Irak. La ville de Mossoul a été reprise, la moitié de Raqqa a été libérée. En trois ans, l'organisation aurait perdu 60% de son territoire, révèle un rapport de l'ONU. "Cela ne signifie pas que la capacité de nuisance du projet de Daech soit annihilée", explique David Rigoulet-Roze, chercheur à l'Ifas (Institut français d'analyse stratégique), sur franceinfo samedi 12 août. Même si le fait d'avoir eu "un territoire physique à cheval sur la Syrie et l'Irak a boosté l'organisation, Daech ne se réduit pas à une territorialisation. Au-delà de Daech, c'est l'idéologie qui sous-tend ce qu'a été le califat autoproclamé en 2014."
franceinfo : Le groupe État islamique communique à grand renfort de propagande. Ses finances sont-elles toujours bonnes ?
David Rigoulet-Roze : Il y a eu beaucoup de travail qui a été fait sur le tarissement des filières financières. Mais l'utilisation du système Hawala, qui est un système de transfert de fonds informel, qui ne transite pas par les banques et dont la traçabilité est compliquée, peut expliquer le repositionnement de l'organisation en Asie du Sud et du Sud-Est. Cela peut permettre à Daech de continuer d'avoir une manne financière non négligeable.
Qu'en est-il du côté de l'Asie ?
On peut noter que dans le rapport, deux aspects sont soulignés : la capacité à motiver, à rendre possible des attaques hors du Moyen-Orient et en poussant au passage à l'acte ceux qui prennent des initiatives en Occident et puis le volet plus territorial avec l'Asie du Sud et du Sud-Est avec des pays qui sont majoritairement musulmans comme le Bangladesh, la Malaisie, l'Indonésie et qui sentent la pression de l'organisation par le biais de filières. Il n'y a pas très longtemps, le chef de l'armée indonésienne expliquait que presque toutes les provinces de l'Indonésie avaient vraisemblablement des cellules dormantes de Daech. Il y a aussi des pays qui ont des minorités musulmanes comme la Thaïlande et les Philippines. Depuis mai 2017, l'armée philippine est aux prises avec une structure militaire bien ancrée et qui est extrêmement difficile à déloger dans le projet de consolidation territorialisée de Daech.
De plus en plus de mineurs formés par Daech migrent du Moyen-Orient vers des pays comme l'Indonésie ou la Malaisie. Daech est-elle en train de se chercher un nouveau terrain pour remplacer la Syrie et l'Irak ?
Dans l'idée des lionceaux du califat, la nouvelle génération qui a été préparée en Syrie et en Irak et qui constituent des bombes à retardement, Daech a anticipé la chute de Raqqa et Mossoul en sachant qu'une partie de la première génération de Daech allait être éliminée. Ces lionceaux du califat seraient éventuellement envoyés sur de nouveaux théâtres et de ce point de vue-là, l'Asie du Sud et surtout du Sud-Est font figures de pièces centrales. Le chargé de pouvoir de Daech est vraisemblablement à l'origine de l'opération sur Marawi.
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