Raja et ses cinq enfants, âgés de 6 à 14 ans, n'arrivent plus à dormir chez eux, dans leur maison du camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée. "Quand les soldats (israéliens) sont entrés dans la maison, ils ont laissé les chiens attaquer ma fille aînée. Pour cette raison, j'ai quitté la maison", confie Raja. Alors, elle a trouvé refuge dans l’hôpital de la ville, car ses enfants ne se sentent plus en sécurité chez eux. "Mon fils a été insulté et il se réveille en pleine nuit. Il se met à crier, m'appelle 'Maman ! Maman !'. Il me serre très fort et refuse de dormir sans moi." à lire aussi REPORTAGE. "Et à la fin, le gouvernement israélien dira que c’est de la légitime défense" : en Cisjordanie, le quotidien infernal des Palestiniens face aux colons "Honnêtement, je n'ose pas rentrer chez moi de peur qu'ils reviennent. Dans ce cas-là, je devrais à nouveau partir de chez nous", dit Raja. Alors que les violences entre les colons israéliens et les Palestieniens se multiplient depuis les attaques du 7 octobre, l'autorité palestinienne a annoncé la fermeture des écoles dans plusieurs villes de Cisjordanie, notamment dans le Nord, à Jénine, où la situation se crispe toujours un peu plus. Cette violence continue et permanente entraîne des troubles psychologiques importants, notamment chez les enfants qui baignent dans cette tension. Et les conséquences à moyen terme sont incommensurables.Troubles du sommeil, de la concentration, hypersensibilité...Parmi les troubles les plus réguliers qu'elle rencontre, Rimal Salah liste les problèmes de sommeil, de concentration, d’hypersensibilité. La psychologue dirige une association, basée à Ramallah, qui apporte une assistance psychologique à ceux qui en éprouvent le besoin. Un programme spécifique a été développé récemment pour les enfants. "Quand les enfants ont recommencé à dessiner, ils ont dessiné des morceaux de corps d'enfants. Ils ont imaginé que l'armée était entrée dans l'école, comme dans les films, nous disaient-ils, et qu'ils leur tiraient dessus puis les découpaient en morceaux", raconte-t-elle. En 24 ans d’expérience, cette psychologue a été confrontée à des consultations douloureuses avec les jeunes qu’elle suit, notamment dans la ville de Jénine. à lire aussi REPORTAGE. "Les gens n'en peuvent plus" : à Jénine, "la petite Gaza", épicentre des tensions en Cisjordanie Certains enfants commencent à refuser d'aller à l'école depuis le début de la guerre. Ceux qui doivent passer par des checkpoints de l'armée israélienne ne veulent pas le faire. Ils peuvent être envahis par une peur incontrôlable alors que sans écoles, leur éducation sera affectée."Imaginez à quel point ce sera long avec ces enfants pour qu'ils se sentent à nouveau en sécurité à l'école, pour qu'ils la voient comme un lieu sûr."Dr. Rimal Salah, psychologueà franceinfoC’est donc aussi avec les parents que travaille le Dr. Rimal Salah. Car chez eux aussi, même s’ils ne veulent pas en parler, les traumatismes sont souvent bien ancrés.