Cet article date de plus d'onze ans.

Les difficultés du dialogue israélo-palestinien

Malgré l’annonce par le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, d’une reprise du dialogue au Proche-Orient, Israéliens et Palestiniens minimisent les chances réelles d’aboutir. Les pourparlers de paix sont gelés depuis 2010.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La négociatrice israélienne, Tzipi Livni, et son homologue palestinien, Saeb Erekat, le 15 août 2007 (avec à droite le ministre japonais Taro Aso) lors d'une conférence de presse à Jéricho le 15 août 2007. (AFP - Emilio Morenatti)

Apparemment, les parties en présence éprouvent quelques difficultés à trouver une date pour la tenue des nouvelles discussions. John Kerry avait indiqué le 19 juillet que Tzipi Livni, ministre israélienne de la Justice (centriste) et négociatrice pour Israël, et le négociateur palestinien Saëb Erekat pourraient se rendre à Washington «vers la semaine prochaine, à peu près» pour une première réunion destinée à négocier les termes d'une reprise des pourparlers.
 
Mais selon un responsable israélien, on ignore pour l’instant si le gouvernement de l’Etat hébreu se prononcera sur le processus lors de sa prochaine réunion, le 28 juillet, ou si une réunion restreinte au cabinet de sécurité avant cette date suffirait. De son côté, la présidence palestinienne a fait savoir que Saëb Erekat n’avait pas encore reçu d’invitation à se rendre à Washington.

Le porte-parole de la Maison blanche a précisé que Washington espérait une réunion «dans les semaines à venir». Il a ajouté que parvenir à un accord de paix entre l'Etat hébreu et les Palestiniens demeurait «un immense défi, pour les Israéliens, les Palestiniens et toutes les administrations qui se sont succédé à Washington». De fait, les obstacles restent nombreux sur le redémarrage et l’aboutissement de négociations entre les deux parties.

Divisions en Israël
Obstacle parmi d’autres : la coalition à la tête de l’Etat hébreu est divisée sur la reprise des pourparlers. Le premier ministre Benjamin Netanyahu explique que le processus «est dans l’intérêt stratégique» du pays. Tout en insistant «sur les exigences d’Israël sur le plan de la sécurité et ses intérêts vitaux». Il a réaffirmé sa  promesse de soumettre tout accord à référendum. Selon les sondages, une majorité de l’opinion israélienne soutient le principe d’une solution à deux Etats. Même si les personnes interrogées sont moins nombreuses à accepter le démantèlement de colonies en Cisjordanie.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, à la Knesset (Parlement israélien), à Jérusalem le 22 juillet 2013.  (Reuters - Baz Ratneram)

 
L'ancien ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, partenaire de Benjamin Netanyahu au sein de l'alliance Likoud (droite)-Beitenu (parti russophone) au pouvoir, a relativisé l'idée de pourparlers, estimant que la diplomatie ne servait qu'à «gérer» le conflit israélo-palestinien. Pour le ministre Likoud des Transports, Yisrael Katz, le président palestinien Mahmoud Abbas «a encore moins de pouvoir sur les Palestiniens qu’Assad en Syrie». Et d’ajouter : «Tout comme personne ne songerait à céder des territoires à Assad dans la situation actuelle, personne ne songe sérieusement à céder des territoires à Abou Mazen (nom de guerre d’Abbas), alors qu'il ne gouverne qu'une partie de la population palestinienne.»    
 
Quant aux ultranationalistes du Foyer juif, ils ont menacé de quitter le gouvernement si ce dernier acceptait le tracé des frontières antérieures à 1967 comme base de discussions.
 
Les demandes palestiniennes
Le tracé des frontières de 1967 fait partie des exigences palestiniennes, transmises à John Kerry, pour une reprise des discussions. Ces demandes impliquent la reconnaissance par Israël d'une solution à deux Etats sur la base des frontières de 1967 (avant l’occupation par Israël de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est), ainsi que des éclaircissements à propos de la libération prévue de prisonniers palestiniens. L’Etat hébreu a annoncé la libération à partir de septembre de 82 personnes emprisonnées avant 1993, année de la signature des accords de paix d'Oslo. Mais le responsable palestinien Kadoura Fares a déclaré que Mahmoud Abbas souhaitait, pour sa part, que 103 prisonniers soient libérés.

Libération de prisonniers palestiniens ?

eurosnews.fr, 21-7-2013

Les Palestiniens ont indiqué à plusieurs reprises qu’ils n’entameraient aucune négociation tant qu’il ne leur sera pas clairement signifié que les pourparlers porteront sur leur futur Etat sur la base des frontières antérieures à 1967. Tzipi Livni a assuré que «tout sera sur la table» des négociations, y compris la question des frontières et celle de Jérusalem-Est, dont les Palestiniens veulent faire la capitale de leur futur Etat.

«Gâteau à moitié cuit»
A Gaza, le Hamas a rejeté «la reprise des négociations», réaffirmant que «M. Abbas n'a aucune légitimité pour négocier au nom du peuple palestinien sur des questions fondamentales».
 
D'autres mouvements palestiniens se montrent également sceptiques. «Retourner aux négociations hors du cadre de l'ONU et de leurs résolutions reviendrait à un suicide politique», a prévenu le Front populaire de libération de la Palestine (gauche nationaliste). «L'expérience de vingt ans de négociations suffit pour prouver que c'était une erreur de signer les accords d'Oslo avant un arrêt de la colonisation, le nombre de colons dans les territoires occupés étant passé depuis de 150.000 à 600.000», relève le mouvement du député indépendant Moustapha Barghouthi.
             
Des observateurs se montraient également critiques, soulignant les zones d'ombre de l'accord. «C'est un gâteau à moitié cuit que Kerry a sorti du four. Il a convaincu les Israéliens et les Palestiniens qu'il était comestible, et les deux parties ont accepté de le manger», a résumé le commentateur politique de la radio publique israélienne.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.