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Israël: un chercheur palestinien symbolise le régime de détention administrative
Un astro-physicien palestinien, Imed Barghouthi, comparaissait le 2 juin 2016 devant un tribunal militaire palestinien pour avoir, selon l’accusation, publié des commentaires considérés comme des incitations à la violence, sur sa page Facebook. Il était détenu depuis le 24 avril sous le régime de la détention administrative, qui permet de maintenir un suspect en prison sans procès.
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Sur quelque 7.000 Palestiniens détenus par Israël, plus d'un sur dix sont en détention administrative (selon l’AFP), un régime critiqué par des organisations de défense des droits de l'Homme. Cette législation de la détention administrative permet de maintenir en détention des suspects sans justification pendant six mois renouvelables. C'est ainsi qu'en 2012, Israël a détenu «24 membres du Conseil législatif palestinien – dont son président, Aziz Dweik. Des défenseurs des droits humains, comme Walid Hanatsheh, quatre journalistes au moins ainsi que des étudiants et des professeurs d'université», dénonçait Amnesty International.
Au delà du cas de M.Barghouthi, âgé de 52 ans et père de deux enfants, qui exerce comme professeur de physique dans une université de Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël, la détention administrative est un moyen de contrôle de la population (notamment dans ces territoires occupés) souvent mis en cause par les organisations de défense des droits de l’Homme.
La détention administrative est une procédure qui permet à l’armée israélienne de détenir une personne pour une période de six mois maximum, renouvelable de manière indéfinie, sans inculpation ni procès. Le détenu administratif est emprisonné le plus souvent sur la base d’informations considérées comme «secrètes» par l’armée et qui ne sont donc accessibles ni au détenu ni à son avocat. Seul le juge du tribunal et le procureur peuvent être informés des éléments à charge, souvent fournis par des services de renseignement. En l’absence d’accès au dossier, réservé aux seuls procureurs et juges militaires, il est impossible au détenu ni à son avocat de contester efficacement leur placement en détention.
«L'Etat israélien se sert de la détention administrative comme une véritable politique depuis 1948, et y a progressivement eu recours dans tous les territoires conquis depuis 1967. Depuis des dizaines d'années, des milliers de Palestiniens ont été emprisonnés en tant que «détenus administratifs» sans qu'aucun d'entre eux ne soit informé de la raison de son emprisonnement», dénonce l’ONG palestinienne Addameer qui ajoute que ce type de pratique «a été largement utilisé en Irlande du Nord, en Afrique du Sud (sous le régime d'Apartheid), ainsi qu'à Guantanamo par les Etats-Unis. En Israël, certains opposants sont ainsi détenus depuis plus de 6 ans, sans inculpation, ni procès».
Le droit international autorise la puissance occupante à recourir à la détention administrative à condition qu'il s'agisse d'une mesure «absolument nécessaire», justifiée par d'«impérieuses raisons de sécurité», selon la quatrième Convention de Genève. Ce système juridique avait été institué par les Anglais en 1945 qui occupaient la région depuis 1918. Il a été ensuite actualisé par Israël.
Les personnes détenues sous ce statut sont quasi essentiellement des Palestiniens. Quelques juifs israéliens ont cependant aussi été arrêtés sous ce statut. En 2015, un extrémiste juif avait été placé en détention administrative à la suite de l'attaque d'une famille palestinienne provoquant la mort d'un bébé et de ses parents. Cet extrémiste, Meïr Ettinger, a été libéré le 1er juin 2016.
Amnesty International, comme plusieurs autres organisations de défense des droits de l'Homme, réclament la suppression de ce statut. «Avec son système de détention administrative – au départ une mesure exceptionnelle contre des personnes représentant un danger extrême et imminent pour la sécurité – Israël bafoue les droits fondamentaux des détenus depuis des dizaines d'années. Cette pratique héritée du passé doit être mise au rebut», écrivait déjà Amnesty International en 2012.
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