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Nelson Mandela : un état de santé sous haut contrôle

REPORTAGE | La communication sur l'état de santé de Nelson Mandela est un sujet très sensible depuis que l'ancien président a été hospitalisé le 8 juin dernier. Seule la présidence sud-africaine est autorisée à donner des nouvelles de Madiba. Mais ses différents statuts - père de famille, père de la "nation arc-en-ciel" et icône internationale de la paix – entraînent des passes d'armes entre ses proches, les autorités et les nombreux médias internationaux présents sur place.
Article rédigé par Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
  (Antoine Krempf Radio France)

Pour la première fois depuis l'hospitalisation de Nelson
Mandela, sa famille s'en est prise aux nombreux journalistes étrangers présents
devant la Mediclinic de Pretoria. "Il y a une pointe de racisme chez les
médias étrangers qui se permettent de franchir toutes les limites. Ils sont une
vraie nuisance. Ils se comportent vraiment en vautours
", a lancé Makaziwe
Mandela, la fille aînée de l'ancien président sud-africain sur SABC. 

Une position également très partagée sur . Il faut dire que les médias sont omniprésents devant la Mediclinic de
Pretoria. La rue Celliers qui jouxte l'une des entrées de l'hôpital a été
bouclée. Sur les trottoirs, des dizaines de caméras et de projecteurs sont
braqués sur le portail. Une chaîne de télévision a même loué un balcon avec vue imprenable pour observer les allées et venues au sein de
l'établissement. "On peut vous faire un bon prix pour une fenêtre au
troisième étage
", propose un voisin. 

Le fils de George va arriver en retard à la crèche ce jeudi
matin. Mais son père a tenu à lui donner "un cours d'histoire " en
venant devant les grilles de l'hôpital. Il est arrivé à Pretoria il y a onze
ans en tant que réfugié politique. Le Congolais ne croit pas que "les
médias soient là uniquement pour le 'business'. Il ne peut pas y avoir
seulement le respect de la vie privée pour Mandela. Il appartient à sa famille,
mais aussi à son pays, à l'Afrique en général et à la communauté
internationale. On ne peut pas en vouloir aux gens du monde entier d'être
concernés par l'état de santé de cette icône de la paix et de la
démocratie
".

"Les médias ne comprennent pas "

C'est justement cette triple dimension qui poserait problème
à la famille de Nelson Mandela. D'après Maluti Oeuseng, journaliste à SABC
news, "les médias internationaux ne comprennent pas comment nous
réagissons, nous les Sud-africains, quand la mort arrive. Dans ma culture,
quand quelqu'un est malade, les proches ne disent rien ou désignent un
porte-parole. Et quand il y a un mort, la famille se réunit et donne le droit à
une seule personne de communiquer vers l'extérieur
".

C'est d'ailleurs, à
peu de choses près, le discours tenu par Makaziwe Mandela quand elle affirme
que "la famille ne peut donner aucun détail sur la santé de 'Tata'. Il n'y
a que le président qui peut communiquer
".

"On se fout de nous "

Et la présidence sud-africaine communique de façon
quasi-quotidienne des communiqués sur son compte Twitter. Après une visite de
trois quarts d'heures ce jeudi après-midi, Jacob Zuma a annoncé que
"Madiba allait beaucoup mieux par rapport à la veille ".

Pourtant,
l'un des membres de sa famille avait confirmé qu'il était "sous assistance
respiratoire
" et que son cas "était désormais très critique ".
Commentaire d'un journaliste britannique : "On se fout de nous ".

"Zuma a encore besoin de Madiba "

Au-delà de l'aspect culturel, ce "verrouillage" de
la communication par le président sud-africain inspire également une lecture politique
à Shokes Mnisi-Mzolo, journaliste freelance pour le magazine Destiny : "Regardez
autour de vous : il y a des milliers de personnes réunies ici. Cela montre
l'attachement des gens à Nelson Mandela. Je crois que Jacob Zuma a encore
besoin de Madiba
".

Signe de l'importance politique du sort de l'icône de
la lutte contre l'apartheid, des dizaines de militants de l'ANC, parti au
pouvoir, sont venus chanter et danser ce jeudi devant les grilles de la
clinique (et devant les caméras) pour soutenir leur ancien leader. Beaucoup
d'entre eux portaient des t-shirts jaunes avec une photo de Nelson Mandela et le
slogan "vote ANC in 2014". 

Car l'hospitalisation de Nelson Mandela intervient à moins
d'un an de la prochaine présidentielle en Afrique du Sud. Pour Toumy,
journaliste au service politique de SABC, "cela ne fait aucun doute que
les leaders de l'ANC vont utiliser l'aspect émotionnel lié à la disparition de
Nelson Mandela. Le message est le suivant : cet homme nous a libérés, il venait
de l'ANC, nous sommes ses héritiers. Mais le temps est encore long avant
l'élection, je ne crois pas que cet argument va tenir aussi longtemps
".

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