Transport aérien : à la conquête du ciel africain
Le constat est unanime. Il y a un potentiel de développement important du transport aérien en Afrique. Comme l’explique à l'AFP Sylvain Durantois, spécialiste du trafic au sein du cabinet Boston Consulting Group, «le transport aérien est directement lié à la croissance économique. Or, le produit intérieur brut croît de près de 5% depuis cinq ans en Afrique».
Résultat, une classe moyenne grandissante et désireuse de voyager émerge dans plusieurs pays. C’est cette nouvelle clientèle qui devrait bouleverser la donne durant les toutes prochaines années.
La concurrence est rude
Aujourd’hui, le continent ne représente que 3% du trafic mondial. Les liaisons intercontinentales partant d’Afrique (20%) sont l’apanage des grandes compagnies aériennes, comme Air France, l’une des plus anciennes sur le continent. «Notre objectif est de conserver notre leadership des vols vers l’Europe et l’Afrique» explique Frank Legré, directeur Afrique du groupe Air France/KLM. Celui-ci réalise 20% de parts de marché sur le trafic entre l’Afrique et l’Europe.
A mesure que l’économie africaine s’ouvre au monde, le trafic aérien s’est développé avec l’arrivée sur le marché des compagnies du Golfe. De nombreux voyageurs africains transitent désormais par Dubaï avec des vols d’Emirates pour se rendre dans les pays de l’Est. Quand à Turkish Airlines, elle a fait de l’Afrique une priorité. Pour son PDG, Temel Kotil, «C’est la nouvelle Chine proche de l’Europe».
Les compagnies africaines restent démunies
Dans cette course à la conquête du ciel africain, les opérateurs du continent restent démunis. L’aviation africaine est malheureusement connue pour ses crashs et peu de gens font confiance à ses compagnies qui opèrent souvent avec des appareils âgés et mal entretenus. «la plupart d’entre elles naissent et meurent en l’espace de quatre ans», se désole Abderrahmane Berthé, ancien PDG d’Air Mali.
Parmi les transporteurs africains qui gardent difficilement le cap, on peut citer notamment South African Airways, Ethiopian Airlines, Royal air Maroc, Kenya Airways et Egyptair. Mais les passagers leur préfèrent souvent les concurrents européens. «Ne nous y trompons pas », avertit Djibril Traoré, bon connaisseur du secteur aérien sur le continent, «si les compagnies européennes sont souvent préférées aux transporteurs africains, c’est parce qu’en matière de qualité de service, elles sont bien meilleures. Dès qu’un passager a un problème quand il voyage avec une compagnie africaine, il n’y a plus personne pour lui répondre», regrette-t-il.
Une liste noire très décriée sur le continent.
Parmi les 200 opératreurs aériens africains recensés en 2013, plusieurs ont été jugés trop dangereux pour voler dans l’espace européen. 17 pays du continent ne peuvent accéder au ciel du vieux continent. La république démocratique du Congo est placée en tête avec une trentaine de transporteurs aériens indésirables.
L’Association des compagnies aériennes africaines dénonce une liste fondée sur des critères discriminatoires. Mais elle a demandé à ses membres de se mettre en règle au plus tard fin 2015. Aux contraintes de sécurité s’ajoutent les coûts trop élevés des réparations. La révision d’un moteur d’avion de moyenne portée peut coûter entre 1,5 et 2,5 millions de dollars. Une somme que la plupart de ces compagnies sont incapables de payer. Et le pétrole revient 30% plus cher au départ d’Afrique qu’au départ d’Europe.
Les transporteurs africains le reconnaissent: il ne suffit pas d’avoir un avion pour se lancer dans l’aérien. Pour exister dans le ciel africain de demain, il faudra désormais se regrouper et créer de grandes compagnies aériennes. L’heure n’est plus à l’amateurisme et à l’improvisation.
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