La France a exprimé samedi son "inquiétude" après la condamnation du principal opposant chinois, Liu Xiaobo
Liu, 54 ans, a été condamné vendredi à onze ans de prison pour "incitation à la subversion contre le pouvoir d'Etat" avait participé en 1989 aux manifestations de Tiananmen.
Il est l'un des principaux rédacteurs de la "Charte 08", une pétition qui a appelé, notamment sur internet, à des réformes majeures du système politique chinois.
"Son action résolue en faveur du respect des droits de l'homme et de la liberté d'expression joue un rôle essentiel dans la promotion des valeurs démocratiques en Chine", écrit samedi le Quai d'Orsay. "La France, attachée au respect de la liberté d'expression partout dans le monde, rappelle aux autorités chinoises leurs engagements dans le cadre du dialogue avec l'Union européenne sur les droits de l'homme", est-il ajouté dans le communiqué.
Liu, écrivain et ancien professeur d'université qui avait déjà connu la prison après la répression du mouvement démocratique de Tiananmen, s'est également vu priver de ses "droits politiques pendant deux ans", ont indiqué ses avocats.
Sa femme, Liu Xia, qui n'avait pas pu assister au procès mercredi, était cette fois présente et a pu le voir après le verdict, pour la première fois depuis mars. Selon elle, son mari a décidé de faire appel. L'appel peut être déposé dans un délai de dix jours à partir de samedi, a précisé l'un de ses avocats, Ding Xikui.
Cité par l'agence officielle Chine Nouvelle, le tribunal a affirmé "avoir suivi strictement la procédure judiciaire dans cette affaire et protégé pleinement les droits à la défense de Liu".
Réactions immédiates
Son procès et sa condamnation ont été vivement condamnés par ses soutiens dans le pays, les ONG étrangères et plusieurs gouvernements. A l'instar de l'organisation Reporters sans frontières, qui s'est insurgée contre cette condamnation et a appelé la communauté internationale à faire pression pour obtenir sa libération, les Etats-Unis ont de nouveau appelé la Chine à libérer le dissident chinois Liu Xiaobo.
"C'est une peine très, très sévère, qui reflète aussi un durcissement politique, que nous avons observé depuis la préparation des jeux Olympiques", a pour sa part estimé Nicholas Bequelin, chercheur à la division Asie de l'organisation Human Rights Watch, basé à Hong Kong.
L'ONG Amnesty International s'est également déclarée "extrêmement inquiète pour les autres signataires de la 'Charte 08' et pour la liberté d'expression en Chine". Selon l'organisation, la Chine a condamné depuis 2003 plus de 35 personnes "sous l'accusation vague d''incitation à la subversion du pouvoir de l'Etat'".
Premier pays occidental à réagir, les Etats-Unis ont fait part de leur inquiétude, estimant que "la persécution d'individus pour l'expression pacifique d'idées politiques est incompatible avec les normes des droits de l'Homme reconnues internationalement". Washington a de nouveau appelé à la libération du dissident, qui "a oeuvré pacifiquement à l'établissement d'un processus démocratique en Chine".
La chancelière allemande Angela Merkel s'est dite "consternée" par la sentence.
De son côté, la présidence suédoise de l'UE s'est dite "très préoccupée par le caractère disproportionné de la condamantion".
A l'ONU, la Haut commissaire aux droits de l'Homme, Navi Pillay, s'est dite "profondément inquiète", évoquant "un développement malheureux qui porte une ombre de mauvais augure aux récents engagements de la Chine pour protéger et promouvoir les droits de l'Homme".
Jeudi, Pékin avait dénoncé les "ingérences grossières" de certains pays étrangers après le procès de Liu, demandant le respect de la "souveraineté judiciaire chinoise".
Une charte qui met à mal le régime de Pékin
La "Charte 08", appelant à des réformes démocratiques en Chine et signée initialement par plus de 300 personnes, intellectuels et militants, a comme modèle la Charte 77 des dissidents tchécoslovaques des années 70.
Elle réclame le respect des droits de l'Homme et de la liberté d'expression et l'instauration d'élections démocratiques pour un "pays libre, démocratique et constitutionnel".
Publiée le 10 décembre 2008 à l'occasion du 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, elle réunit aujourd'hui plus de 10.000 signatures, selon le réseau China Human Rights Defenders.
Elle plaide notamment pour une "nouvelle Constitution", une "séparation des pouvoirs", une "démocratie législative", une "justice indépendante", un "contrôle public des fonctionnaires", la "garantie des droits de l'Homme" et l'"élection des responsables publics". Réclamant un plus grand respect de l'environnement, ses auteurs soutiennent une "république fédérée" afin de respecter les minorités chinoises.
Enfin, le texte demande aussi une "Commission d'enquête pour la vérité", comme dans l'Afrique du Sud de l'après-apartheid, afin de faire la lumière sur les différents épisodes de répression politique et indemniser leurs victimes.
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