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L'autopsie des corps des deux Français enlevés à Niamey a révélé des impacts de balles

C'est ce qu'a annoncé jeudi le procureur de Paris, Jean-Claude Marin. Celui-ci a précisé que Vincent Delory et Antoine de Léocour avaient été choisis au "hasard" par leurs ravisseurs et qu'aucun de ces derniers n'avait été placé en garde à vue au Niger.Un peu plus tôt, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avait revendiqué leur enlèvement.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Vincent Delory (à gauche) et Antoine de Léocour (à droite) (AFP - DENIS CHARLET)

C'est ce qu'a annoncé jeudi le procureur de Paris, Jean-Claude Marin. Celui-ci a précisé que Vincent Delory et Antoine de Léocour avaient été choisis au "hasard" par leurs ravisseurs et qu'aucun de ces derniers n'avait été placé en garde à vue au Niger.

Un peu plus tôt, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avait revendiqué leur enlèvement.

L'Elysée a par ailleurs annoncé que Nicolas Sarkozy assisterait, "en accord avec les familles", lundi à Linselles, près de Lille, aux obsèques d'Antoine de Léocour et Vincent Delory.

Le procureur a précisé qu'il n'y avait pas de prisonniers interrogés actuellement, contrairement à ce qu'ont d'abord déclaré le ministre de la Défense Alain Juppé, suivi par le Premier ministre François Fillon. "Il y a eu une confusion", a dit Jean-Claude Marin. Les personnes en question seraient en fait des gendarmes nigériens pris en otages par les ravisseurs lors des combats.

Une reconstitution du rapt a été organisée jeudi soir dans la capitale nigérienne, sous la conduite du procureur de Niamey et en présence du chef de la section antiterroriste du parquet de Paris. Une demi-douzaine de policiers enquêteurs français étaient également présents. La reconstitution s'est déroulée dans le petit restaurant "Le Toulousain" où Vincent Delory et Antoine de Léocour ont été enlevés le soir du 7 janvier. Des témoins des faits y ont participé.

La revendication d'Aqmi
"Un groupe de moudjahidines a mené vendredi 7 janvier une courageuse opération au coeur de Niamey, où ils ont pénétré dans le quartier diplomatique et sont parvenus à enlever deux Français", déclare Salah Abou Mohammed, porte-parole d'Aqmi. Il s'exprime dans un enregistrement audio diffusé par la chaîne Al-Jazira. Aucune précision n'est donnée sur la mort des otages.

Les deux Français ont été enlevés en réponse "à l'attitude répressive de la France à l'égard des musulmans et à sa croisade en Afghanistan", souligne le porte-parole.

Aqmi détient toujours cinq autres ressortissants français enlevés en septembre dernier sur le site d'extraction d'uranium d'Arlit, dans le nord du Niger, et qui se trouveraient au Mali. Le mouvement avait annoncé en juillet l'exécution du touriste français Michel Germaneau, enlevé trois mois plus tôt au Niger.

Les conclusions de l'autopsie
Après l'autopsie des corps des deux Français réalisée mercredi, le procureur de Paris Jean-Claude Marin a précisé jeudi que neuf personnes avaient trouvé la mort lors de l'intervention des forces spéciales françaises et de la gendarmerie nigérienne pour tenter de les libérer : outre Antoine de Léocour et Vincent Delory, trois gendarmes et quatre ravisseurs ont été tués.

Antoine de Léocour a été victime d'un tir "à bout touchant" de ses ravisseurs, en l'occurence d'une balle dans la tête. Mais les causes de la mort de son ami Vincent Delory sont moins claires, a déclaré le magistrat. Il a succombé à des brûlures, à l'inhalation possible de gaz toxiques ou en raison des cinq impacts de balles ou d'éclats qui ont été constatés sur son corps.

Jean-Claude Marin a indiqué que les autopsies avaient en effet démontré que le corps de Vincent Delory portait des impacts de balles d'armes utilisées par les preneurs d'otages. Mais tout le bas de la dépouille de Vincent Delory est à moitié carbonisé, ce qui contraint les autorités à procéder à d'autres analyses. "Ces conclusions seront affinées puisque nous avons ordonné un certain nombre d'analyses toxicologiques, balistisques et anatomo-pathologiques afin de préciser les choses", a dit le procureur de Paris.

Choisis "par hasard"
Selon Jean-Claude Marin, Antoine de Léocour et Vincent Delory ont été choisis au hasard dans le restaurant où ils se trouvaient. "C'est sans doute terrible à dire, mais c'est le hasard qui a fait que ces deux garçons ont été enlevés. Ils étaient à la table du restaurant la plus proche de l'entrée", a dit Jean-Claude Marin à la presse, faisant le récit du crime tels que reconstitués par huit policiers français sur place.

Cinq à six hommes sont arrivés à bord de deux voitures dans le restaurant "Le Toulousain" de Niamey, deux sont entrés dans le restaurant armés, deux surveillaient l'entrée et un ou deux autres sont restés au volant des voitures. Cette apparente maîtrise "laisse à penser qu'il s'agit de gens ayant reçu une formation", estimé le procureur.

Selon les témoignages recueillis, les deux ravisseurs qui ont fait irruption dans ce restaurant prisé de la communauté française "s'adressent en français aux occupants de la première table à l'entrée du restaurant", six personnes dont Antoine de Léocour et Vincent Delory à qui ils "intiment l'ordre de les suivre", a raconté Jean-Claude Marin.

Pour le magistrat, "on peut penser que dans l'équipe des ravisseurs, il y avait des personnes extérieures à la communauté nigérienne". "Les ravisseurs sont des blancs, c'est-à-dire vraisemblablement appartenant aux Touaregs. Ils sont d'ailleurs vêtus de manière traditionnelle touareg", selon Jean-Claude Marin. Mais "ils vont s'adresser dans un français parfait aux deux otages et entre eux ils parlent arabe. Or les Touaregs ne pratiquent pas l'arabe de manière usuelle entre eux", a encore dit le magistrat. Les ravisseurs ont pris la fuite à bord des deux voitures avec leurs otages.

Les échanges de coups de feu
La gendarmerie et la garde nationale nigériennes, alertées, ont ensuite tenté de les intercepter. Dans un premier échange de coups de feu, deux membres des forces de l'ordre ont été blessés, vers 2h00 ou 3h00 du matin. Plus loin, dans un village, les gendarmes ont découvert les deux véhicules dissimulés sous des bâches et un second échange de coups de feu s'est produit, au cours duquel un gendarme a encore été blessé et un véhicule de la gendarmerie saisi.

Plus tard - sans doute vers 7h00 du matin samedi mais l'heure reste incertaine - le dernier assaut du convoi de trois voitures, donné par des soldats français en territoire malien, a réussi à immobiliser le convoi. Les deux otages ont ensuite été retrouvés morts, sans qu'on sache s'ils ont été tués à ce moment ou avant. On ignore en fait les conditions exactes de l'assaut français. Deux des trois véhicules ont été calcinés.

Deux ou trois ravisseurs ont pu s'échapper. Il y a eu au total neuf morts : deux otages, trois membres des forces de l'ordre nigériennes et quatre ravisseurs, a dit le procureur. Cinq membres des forces de l'ordre ont été blessés.

Appel du Quai d'Orsay à la "plus grande vigilance"
Sur son site internet, le ministère français des Affaires étrangères recommande "la plus grande vigilance et la plus extrême prudence" à ses ressortissants voyageant dans les pays du Sahel - Mali, Mauritanie, Niger -, où "aucun endroit ne peut désormais plus être considéré comme sûr".

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