: Reportage "Maintenant ce ne sont que des restaurants pour touristes" : à Florence, les habitants n'en peuvent plus du surtourisme
En Italie, le débat sur les nuisances du tourisme de masse est particulièrement vif à Florence cet automne. Dans le centre historique de la ville de Toscane, qui fait la taille d’un arrondissement parisien, devraient affluer 15 millions de visiteurs cette année. Le nombre de meublés touristiques a bondi d’un tiers en deux ans et les prix des loyers grimpent en flèche alors que 7 000 habitants quittent la ville chaque année. Un collectif fait pression sur la mairie pour qu’elle prenne des mesures fortes mais ses moyens sont limités.
Un cortège de valises à roulettes résonne dans le centre de la ville. "On est 11 à loger en AirBnb", dit Jennifer. Ces touristes, Lida, qui habite Florence depuis 30 ans, en voit passer tous les jours. À la porte de son immeuble, il y a dix interphones. "Pour de vrais habitants, il y en a deux, déplore-t-elle. Et jusqu'à peu, la boîte à clés était fixée sur la poignée de la porte."
Ces boîtes à clés sont devenues les cibles du collectif "Sauvons Florence" dont Massimo Torelli est membre. D'après lui, même quand il n’y a plus de logements à mettre sur les plateformes, il y en a encore. "Ce sont trois appartements à louer, avant c'était un local commercial, explique-t-il dans une rue jadis populaire. À chaque fois que nous passons, nous mettons ces adhésifs en forme de croix sur les boîtes qui permettent de retirer la clé avec la carte."
Au-delà des prix qui montent en flèche et des nuisances pour les habitants, ce que déplore Lida, c’est une cité qui perd son âme : "Avant, il y avait des commerces pour les habitants, deux boulangeries, une quincaillerie. Maintenant dans toute la rue, ce sont des restaurants pour les touristes."
Pas de loi nationale
D’après la fédération des hôteliers, 40% des propriétaires de locations touristiques ont au moins quatre appartements sur le marché. Selon Marco Celani, qui préside l’association qui regroupe ces propriétaires en Italie, "la raison pour laquelle beaucoup de propriétaires ne louent pas avec des contrats longue durée, c'est qu'en Italie, la loi ne les protège pas. Si un locataire avec un contrat de huit ans cesse de payer le loyer, il faut entre deux et quatre ans avant de le chasser. Entre temps, le propriétaire doit payer des taxes sur des revenus qu'il ne perçoit pas", argumente-t-il.
La mairie vient d’annoncer la suppression des boîtes à clés, au nom de la sécurité. Mais l’interdiction de nouveaux appartements sur les plateformes se jouera devant le tribunal. La maire, Sara Funaro, a fait passer la mesure, contestée, car il n'y a pas de loi nationale sur le sujet, au nom de la défense de la propriété privée. "Il existe une loi spéciale pour Venise, nous avons demandé au gouvernement qu'elle soit appliquée aussi à Florence", avance-t-elle. Sur l'interdiction des nouvelles locations, l’audience au tribunal se tiendra au mois de mai prochain.
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