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La majorité de Netanyahu

Benjamin Netanyahu est en train de constituer son gouvernement, dans la douleur. Après avoir perdu l'allié qui lui permettait d'avoir une nette majorité, il a donné plusieurs ministères vitaux à ses coalisés. Mais pour boucler son gouvernement, il doit maintenant satisfaire ses propres troupes. Ce qui n'est pas gagné non plus. Un exercice politique à hauts risques.
Article rédigé par Frédérique Harrus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Jérusalem (Israël), le 10 mai 2015.  Benjamin Netanyahu, premier ministre israélien. (AFP PHOTO / POOL / SEBASTIAN SCHEINER)

Benjamin Netanyahu n’est pas au bout de ses peines. Il doit encore faire voter par la Knesset une loi l’autorisant à nommer plus de 18 ministres. Une limite décidée lors de la formation du gouvernement précédent et qu’il faut à présent annuler. Problème, il n’a pas une majorité de 67 députés comme il l’espérait mais, seulement de 61 car, à la dernière minute, Avigdor Lieberman, a décidé de passer à l’opposition avec les 6 mandats de sa formation de droite. Il ne s’entend plus avec le Premier ministre et sa défection est non seulement politique, mais aussi personnelle.
 
La colonisation
Dans ces conditions, deux heures avant la fin du délai légal, pour pouvoir annoncer au Président  qu’il avait réussi à former une coalition, Netanyahu a du céder au chantage de Naftali Bennett. Le patron du Foyer juif, le parti des colons, a ainsi obtenu le jackpot. Pour lui, personnellement, le très important ministère de l’éducation où il va pouvoir renforcer la diffusion de sa vision sioniste religieuse.
 
Et puis, sa formation va contrôler tous les éléments permettant le développement de la colonisation. Un vice-ministre de la défense chargé de ce dossier, et le portefeuille de l’agriculture pour Ouri Ariel, lui-même habitant en Cisjordanie sera également responsable de la commission de l’implantation de l’Agence juive. Le tout, accompagné de largesses budgétaires ad hoc.
 
La Justice
Ayelet Shaked, la n°3 du Foyer juif, reçoit ce dont elle rêvait depuis des années : le ministère de la Justice avec, en prime la présidence de la commission ministérielle des lois, où elle pourra décider de quel texte sera soumis au vote de la Knesset. Shaked devrait aussi diriger la commission de nomination des juges dont elle veut changer la composition. Son objectif : affaiblir la cour suprême qui a également la fonction d’une cour constitutionnelle. Ces juges ont, à plusieurs reprises, annulé des lois portant atteinte aux droits de l’homme ou à la liberté d’expression. Si la nouvelle ministre parvient à ses fins, il faudra une cour unanime de 9 juges pour retoquer un texte voté par la Knesset. Elle entend également promouvoir le projet de loi cher à Benjamin Netanyahu redéfinissant Israël comme « l’État nation du peuple juif » (Voir sur mon blog(Nouvelle fenêtre), la signification d’une telle loi fondamentale).  

Shaked va aussi pousser l’ensemble de la législation limitant les activités des ONG de gauche luttant contre l’occupation. Il faut dire qu’elle s’est faite remarquer à plusieurs reprises par ses prises de position anti-palestiniennes.  Durant l’opération israélienne à Gaza, l’été dernier, elle a publié sur sa page Facebook un post déclarant que « l’ensemble du peuple palestinien est l’ennemi d’Israël » et justifiant ainsi « sa destruction, y compris ses vieillards, ses femmes, ses villes etc.… » . Elle a par la suite retiré ce texte et démenti avoir appelé au génocide. 

A moins d’une surprise, elle devrait occuper ses nouvelles fonctions dans le courant de la semaine prochaine, lorsque Benjamin Netanyahu aura surmonté les dernières difficultés auxquelles il fait face dans la formation de son cabinet. La répartition des portefeuilles restants parmi les responsables de son parti, le Likoud. Plusieurs d’entre eux ruent dans les brancards et menacent de ne pas voter l’élargissement du gouvernement s’ils ne reçoivent pas de ministère. Déjà, de nombreux commentateurs prévoient une courte durée de vie à ce gouvernement, à la merci  du bon vouloir d’un seul député. Nahum Barnéa, le célèbre éditorialiste du quotidien Yediot Aharonot le qualifie de « Provisoire », peut-être. Mais le contraire est également possible. Les partis qui le composent ont tout à perdre en cas de dissolution.
Comment réagira la communauté internationale face à cette coalition nationaliste –religieuse formée par Netanyahu après sa promesse électorale « Si je suis réélu, il n’y aura pas d’état palestinien ! » ? On le saura certainement au cours des prochaines semaines. 

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