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«Happy» : une reprise qui n'est pas au goût de la République islamique d'Iran
Le bonheur serait-il soluble dans la République islamique d'Iran? A l'instar du monde entier, des jeunes Iraniens ont posté sur Youtube une vidéo reprenant le tube planétaire «Happy» de Pharrell Williams. La sanction est tombée immédiatement : ils ont été emprisonnés quelques jours pour avoir «heurté la chasteté du public».
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Mi-avril 2014, trois filles et trois garçons se filment en train de danser sur le toit d'un immeuble de Téhéran. Les filles sont soigneusement maquillées et ne portent pas le voile. Publié sur Youtube, leur clip a été visionné et partagé par des dizaines de millers de personnes. Leur but est pourtant simple et reflète la belle insousciance due à la jeunesse : montrer qu'il est possible d'être heureux à Téhéran. «Le peuple de Téhéran est heureux. Regardez et partagez! Que le monde nous entende.»
Une vidéo retirée après l'arrestation de ces jeunes Iraniens peut-on lire dans Le Monde.fr. Car, visionné plus de 165.000 fois, le clip a attiré l'attention des autorités conservatrices de la République islamique. Une enquête a été confiée à la police et au ministère du Renseignement. Dans le pays, la charia fait loi depuis 1979 et les femmes doivent avoir la tête couverte. «Après la diffusion d'un clip vulgaire qui a heurté la chasteté du public sur Internet, la police a décidé d'identifier ceux impliqués dans le clip», a déclaré à l'agence Isna le chef de la police de Téhéran, Hossein Sajedinia. Des jeunes arrêtés pour «vulgarité». «Les chers jeunes ne doivent pas tomber dans le piège des gens opportunistes et des charlatans, et doivent savoir que la police réagit très rapidement contre ces délinquants», a conclu le chef de la police de Téhéran.
Considéré comme «modéré», le nouveau président iranien Hassan Rohani souhaite laisser un peu plus d'espace de liberté. Dans un message sur son compte twitter, il a repris une de ses déclarations de septembre 2013 «Le bonheur est un droit du peuple iranien. Nous ne devrions pas être trop sévères face aux démonstrations de joie.»
Avant son arrestation, une des interprètes avait expliqué au site Iranwire pourquoi elle et ses amis avaient pris le risque d'être sanctionnés: «Nous voulions dire au monde entier que la capitale iranienne fourmille de jeunes pleins de vie afin de changer l'image très dure que véhiculent les médias. Les jeunes en Iran ont des moments de joie même s'ils vivent avec beaucoup de difficultés.» Ces jeunes Iraniens ont d'ailleurs reçu le soutien de Pharell Williams.
Ces derniers mois, l'Iran souffle le chaud et le froid sur Internet. Début mai, l'Etat avait bloqué l'application de messagerie What's App, rachetée par le Facebook du «sioniste» Mark Zuckerberg. Une interdiction à laquelle le nouveau président Hassan Rohani avait mis son véto, explique Les Inrocks. Décrit comme un progressiste, il enjoint à ses compatriotes de ne pas voir Internet comme une menace.
Les conservateurs et les progressistes s'affrontent bel et bien en Iran. Dernier acte, le baiser de l'actrice iranienne Leila Hatami à Gilles Jacob au début du festival de Cannes 2014 qui a créé la polémique. Une mise en évidence du durcissement, voulu par certains, de l'application de la loi islamique. Leila Hatami a dû s'excuser pour sa bise. L'actrice s'est dite «vraiment désolée d'avoir heurté la sensibilité de certains et pour cet incident.» Elle affirme «toujours essayer de respecter les règlements» dans une lettre envoyée à l'Organisation du cinéma iranien a précisé Inra et relaté par Le Parisien.
Les six jeunes ont été remis en liberté après avoir payé une amende, à l'exception du réalisateur du clip vidéo.
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