L'agriculture indienne menacée par la pollution à l'ozone
Plus de 50 ans déjà que le gouvernement indien, pour éviter une catastrophe alimentaire, lançait un programme de réforme de l’agriculture. La révolution verte, mise en place dans les années 60, avait pour but de nourrir la population en augmentant les rendements agricoles. Résultats: la production de riz a été multipliée par 3, celle du blé par 10 entre 1960 et 1995.
Mais depuis des années, la démographie de l’Inde ne cesse d’augmenter. La malnutrition refait son apparition dans un tiers des foyers et la pollution à l’ozone pourrait encore aggraver la situation, menaçant la sécurité alimentaire du pays.
Ce polluant, situé dans les dix premiers kilomètres de l'atmosphère, se compose d'oxydes d'azote, de monoxyde de carbone et de composés organiques volatils. Il est généré par la circulation automobile, la combustion du charbon ou encore l'incinération des déchets à ciel ouvert. En trop grande quantité, l'ozone réduit l'activité de photosynthèse, de développement des plantes et entraîne d'importantes baisses de rendements.
94 millions d’Indiens en sursis
C’est un constat inquiétant que dressent des chercheurs de l’American Geophysical Union (AGU) dans la revue Geophysical Research Letters du mois d’août 2014. La recherche, unique en son genre, quantifie les impacts de l’ozone sur les champs de coton, de soja, de riz et de blé de 2000 à 2010.
Chaque année, des pertes colossales ont été enregistrées allant de 2,1 millions de tonnes de riz jusqu’à 3,5 millions de tonnes de blé. «La pollution à l’ozone a un impact considérable sur les cultures. Les pertes de rendement enregistrées pour le riz et le blé représentent de quoi nourrir 94 millions d’Indiens vivant en dessous du seuil de pauvreté», explique l’équipe de recherche. 9,2% des besoins annuels en céréales du pays, à savoir 62 millions de tonnes, seraient donc perdus chaque année.
Pour le Dr Sachin Ghude, de l’Institut indien de météorologie tropicale, la perte de rendements risque d’être exponentielle dans le futur. «Les plants commencent à montrer des dommages quand ils sont exposés à des taux d’ozone atteignant 40 parties par milliards de particules ou plus. Les recherches ont montré que l’augmentation des températures va créer des taux plus élevés d’ozone». A terme, c’est toute une tranche de la population qui risque de souffrir d’une grave crise alimentaire.
L’agriculture en perte de vitesse
La pollution à l’ozone se répercute donc sur le secteur agricole, qui voit ses rendements en blé, riz, coton et soja diminuer d’année en année. Les tonnes de riz perdues représentent la moitié des exportations de cette céréale par l’Inde et celle du blé, le double de la production vendue à l’export.
Des chiffres qui inquiètent le secteur primaire du sous-continent, qui fait vivre 58% de la population et représente 17% du PIB du pays. Les agriculteurs estiment à 1,29 milliard de dollars (1 milliard d’euros) le manque à gagner auquel ils font face en raison de l’ozone.
A la recherche de nouvelles solutions pour endiguer le phénomène
Face à ces constats, les chercheurs interpellent le gouvernement. Ils préconisent l’adaptation des cultures à la pollution atmosphérique en remplaçant le blé par d’autres céréales plus adaptées. La protection des rendements agricoles est également en ligne de mire, les scientifiques proposant de développer de nouvelles variétés de plants, résistantes à l’ozone.
Ces recherches agronomiques pourraient bien devenir l’avenir de l’agriculture en Inde. En effet, le pays le plus pollué du monde, n’est pas près de sortir de ses difficultés environnementales.
Selon l’Organisation météorologique mondiale, tous les principaux gaz à effet de serre ont atteint des pics de concentration dans l’atmosphère en 2013. L’Inde n’échappe pas à la règle.
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