Substances chimiques : "Les Européens vont continuer à être exposés", regrette une association après le report d'une directive européenne
La directive REACH devait être révisée prochainement par la Commission européenne et s'attaquer à de nombreuses substances chimiques. Cette révision a été repoussée à fin 2023, avec une grande incertitude sur son adoption finale.
"Les Européens vont continuer à être exposés à des substances chimiques dangereuses", regrette mercredi 19 octobre sur franceinfo François Veillerette, porte-parole de l'association de défense de l’environnement Générations Futures. La Commission européenne a décidé de déplacer à 2023 la révision du règlement européen REACH, qui classifie et potentiellement interdit les substances chimiques dans l'UE.
>> La Commission européenne présente son plan d'interdiction massive de substances chimiques nocives
Cette directive REACH est en vigueur depuis 2007 dans l'Union européenne. La Commission européenne avait prévu de lancer sa révision au cours de ce trimestre. Mais cette révision a été repoussée à fin 2023. Dans son collimateur : les phtalates, retardateurs de flamme, composés perfluorés et autres bisphénols. Tout un éventail de substances chimiques présentes dans de nombreux produits de consommation courante. Un cinquième des substances incriminées étant potentiellement cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.
Une révision "essentielle"
Cette révision devait toucher des familles de substances et être donc plus efficace que la version actuelle. Elle a officiellement été repoussé car il faut encore mener une préparation et une consultation approfondies. La Commission européenne justifie, entre autres, ce report par la nécessité de protéger la compétitivité des industries en temps de crise, dans le contexte de la guerre en Ukraine. Un argument qui a beaucoup de mal à passer chez les protecteurs de l’environnement ou de la santé
"C'est assez dramatique d'un point de vue environnemental et sanitaire", dénonce François Veillerette. Selon lui, cette révision était "essentielle", puisque "la volonté de la Commission était très bonne : évaluer les produits chimiques par famille et non un par un". Avec ce procédé, selon le porte-parole de Générations Futures, on gagne beaucoup de temps dans l'évaluation des produits, parmi lesquels on trouve "des cancérogènes, des mutagènes, des reprotoxiques [substances toxiques pour la reproduction], mais aussi des perturbateurs endocriniens."
Un doute sur l'adoption de cette révision
Or, le problème selon Générations Futures, c'est qu'en repoussant à 2023 cet examen, "on ne sait pas quand [aura lieu] la révision du règlement REACH". François Veillerette explique qu'en soi, "repousser d'un an, ce ne serait peut-être pas si grave si ça ne repoussait pas de manière quasi-certaine à la prochaine Commission européenne." "Comme les prochaines élections européennes sont en 2024, on risque de s'en remettre à la prochaine Commission européenne dont on ne sait absolument pas quelles seront les priorités", explique-t-il.
"Le risque, c'est qu'elle ne reprenne pas du tout le même axe et que tout ça parte à la poubelle."
François Veillerette, de Générations Futuresà franceinfo
Face à ceux qui disent qu'il faut protéger la compétitivité des industries en temps de crise, François Veillerette répond que "la guerre en Ukraine a bon dos : ça a été l'argument employé par les lobbies agrochimiques pour essayer de repousser à plus tard ou d'affaiblir la révision de la directive sur l'usage des pesticides aujourd'hui". Il confie que cet argumentaire commence à "agacer" les ONG. "Quand il faut agir sur l'environnement, c'est toujours plus tard", regrette-t-il.
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