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TotalEnergies accusé de fournir du carburant à l'aviation russe : comment le groupe français reste-t-il engagé en Russie ?

TotalEnergies est accusé par l'ONG Global Witness et une enquête du quotidien "Le Monde" de contribuer à fournir du carburant à l'aviation russe. Le groupe dément participer à ces livraisons et affirme ne pas avoir connaissance du détail des activités de ses partenaires russes.

Article rédigé par Grégoire Lecalot, Raphaël Ebenstein
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le site Arctic LNG 2, qui exploite du gaz naturel liquéfié (GNL) sur la péninsule de Gydan, en Russie. TotalEnergie détient une participation directe de 10% aux côtés de son partenaire russe Novatek, dont il est actionnaire à hauteur de 19,4%. (NATALIA KOLESNIKOVA / AFP)

L'un des partenaires russes de TotalEnergies participe à la fabrication du kérosène envoyé sur les bases aériennes d'où ont décollé les avions qui ont notamment bombardé le théâtre de Marioupol, en mars dernier. C'est ce que dévoile l'enquête de l'ONG Global Witness et du journal Le Monde.

Alors que le groupe s'est désengagé de certaines activités en Russie, TotalEnergies garde un pied dans le secteur gazier, mais pas en faisant tourner des installations. C'est sous forme de capital qu'il reste engagé dans des sociétés russes qui sont, elles, les opératrices de terrain : Ternefetgaz, dont il détient 49%, et Novatek, son partenaire dans Ternefetgaz, à hauteur de 19,4%.

Il y a aussi les deux champs gaziers du grand nord russe, Yamal et Arctic LNG 2, que TotalEnergies possède respectivement à hauteur de 20% et 10%, et qui sont considérés comme le joyau de la couronne russe du groupe. Cela permet au groupe d'encaisser les bénéfices de la vente de gaz naturel liquéfié vers l'Asie et vers l'Europe, où le gaz russe est toujours le bienvenu.

La Russie, pierre angulaire de la stratégie de TotalEnergies

Mais si TotalEnergies reste en Russie, c'est aussi parce que l'entreprise française en a fait la pierre angulaire de sa stratégie de transition énergétique grâce au gaz. À lui seul, il représente un cinquième de ses réserves d'hydrocarbures. TotalEnergies a investi 40 milliards d'euros dans les deux champs gaziers. C'était le pari de son ancien PDG, Christophe de Margerie (mort à Moscou en octobre 2014).

Le groupe affirme que conserver ses participations est la meilleure façon d'appliquer les sanctions internationales car sinon, elles tomberaient entre les mains d'oligarques liés au Kremlin. Mais il y une autre raison : Vladimir Poutine ne sera pas éternel et TotalEnergies n'entend pas laisser ses concurrents récolter les bénéfices qu'il estime avoir semés.

TotalEnergies s'est bien retiré de certaines activités. Mis sous pression médiatique et politique après les décisions de retrait de plusieurs concurrents comme Shell ou BP par exemple, le groupe a condamné publiquement "l'agression militaire de la Russie". Il a décidé de ne plus apporter de de capital pour de futurs projets de développement, y compris dans le champ gazier Arctic LNG 2 encore en construction.

En mars dernier, TotalEnergies avait annoncé qu'il se désengageait de ses activités pétrolières qui, elles, seront sous sanctions à la fin de l'année. À cette date, il a promis de ne plus importer de produits pétroliers russes. Il s'agit bien là d'un retrait, mais dans un champ d'activité minoritaire pour le groupe dans le pays. Pour compenser, il s'est tourné vers d'autres fournisseurs.

D'autres entreprises françaises encore présentes

TotalEnergies n’est pas le seul groupe français à être encore présent en Russie. Cela concerne également une vingtaine de grandes entreprises françaises telles que les hypermarchés Auchan, les magasins Leroy Merlin ou encore les salons de coiffure Jacques Dessange. Le gouvernement n'exige pas leur départ et demande juste de se conformer aux sanctions internationales prises contre la Russie, notamment dans le domaine pétrolier.

Toutefois, Renault, Sodexo ou la Société Générale ont quand même décidé de quitter le pays au prix de lourdes pertes financières. Michelin, qui compte encore un millier de salariés en Russie, s'apprête à se retirer également d'ici la fin de l'année.

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