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Témoignage "Je suis comme un renard dans un poulailler" : les confidences d'un sniper ukrainien qui opère dans le Donbass

Alors que l'armée russe fait toujours pression pour avancer dans le front du Donbass, franceinfo a rencontré Artem, un sniper ukrainien qui travaille seul et sans formation militaire.
Article rédigé par Agathe Mahuet - avec Laurent Macchietti
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Artem, sniper ukrainien, dans la pièce où il entrepose son matériel. (AGATHE MAHUET / FRANCEINFO)

Depuis près de 10 mois, la guerre continue en Ukraine. Alors que Kiev, la capitale, a été visée lundi 19 décembre par une nouvelle attaque de drones, certains Ukrainiens décident de rendre justice eux-mêmes, à l'image d'Artem. Quand on se glisse dans sa tanière, des munitions roulent au sol. Le sniper s'excuse pour le bazar. "Je suis rentré à trois heures du mat', explique-t-il, c'était une bonne nuit de chasse !"

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Artem est un sniper solitaire. La nuit, aux quatre coins du Donbass, cette zone de l'Est de l'Ukraine, au plus près de l’ennemi, que ce soit à 30 ou 300 mètres, il tue des soldats russes avec son viseur nocturne installé sur sa kalachnikov. Et cela parfois quelques heures durant : "Je suis comme un renard dans un poulailler", glisse-t-il. 

Pour agir dans l'ombre, il commence par repérer les lieux, "pendant quelques jours", puis il passe à l'attaque. Sur son arme, il a installé une caméra, et montre les images. "Franchement, c’est devenu très facile, estime Artem. Ils sont très nombreux. Tu tires, tu en touches forcément un !"

"Mon rôle, c’est de sauver le plus de vies possibles chez les soldats ukrainiens, en semant la terreur au sein des troupes russes."

Artem, sniper ukrainien

à franceinfo

 "Sans Dieu, ici, t'es foutu"

Artem est un homme plutôt sûr de lui. A 34 ans, il affiche un visage aimable, malgré ce boulot qui fait froid dans le dos. Et, pour lui, "c'est la routine ! C'est juste mon travail", dit-il. Et il le confie sans sourciller : il est "autodidacte". Il n’a pas fait son service militaire, il a même et recalé pour entrer dans l’armée. De toute façon il n’aime pas travailler en groupe. Quand on lui demande comment on devient, un jour, sniper, ou ce qu'il faut pour cela, sa réponde fuse, sur un ton très neutre : "Il faut avoir des couilles. C'est suffisant."

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Dans cette grande pièce aux fenêtres barricadées qui lui sert de repaire, on trouve une collection d’armes, dont beaucoup sont russes, d'ailleurs, et pour certaines, encore pleines de boue. Des lance-grenades, des mitraillettes... De quoi se muscler, aussi. Sur sa table, ouverte comme s’il venait de la reposer, la Bible est posée.

La table d'Artem, sniper ukrainien, sur laquelle est posée sa Bible. (AGATHE MAHUET / FRANCEINFO)

Artem est croyant. "Je prie tous les jours, raconte-t-il. Sans Dieu, ici, t'es foutu. L'humain est un être faible". C'est de la religion qu'il tient sa motivation.

"C'est Dieu qui m'a dit : 'tu resteras vivant. Vas-y et agis'."

Artem, sniper ukrainien

à franceinfo

"J'efface tout de ma mémoire"

Ce père de famille a deux jeunes enfants et bientôt un troisième. Selon Artem, sa femme ne comprend pas qu’il soit sniper, mais n’essaie pas de le dissuader pour autant. Lui ne veut pas compter combien de Russes sont tombés dans son viseur depuis le début de la guerre, en février dernier : "Je ne me souviens pas. Je fais abstraction de tout ça, assure-t-il. En fait, j’efface tout de ma mémoire."

"Je le fais parce qu’ici, c’est chez moi."

Artem, sniper ukrainien

à franceinfo

Il affirme qu’il n’en rêve même pas dans son sommeil et jure surtout que jamais il ne ferait ce travail ailleurs que dans son pays. C’est sa façon à lui de défendre l’Ukraine. 

Portrait d'un sniper ukrainien dans le Donbass, par Agathe Mahuet

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