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Guerre en Ukraine : les conseillers de Poutine craignent de lui dire la vérité, selon les services de renseignements britanniques

Une armée en déroute et un Poutine trop craint pour être correctement informé : c’est le tableau dressé, cette nuit, par le chef du renseignement britannique.

Article rédigé par Richard Place
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le président russe Vladimir Poutine lors d'un conseil de sécurité, à Moscou (Russie), le 3 mars 2022. (KREMLIN PRESS OFFICE/HANDOUT / ANADOLU AGENCY / AFP)

C'est sans doute ce qu'on appelle la solitude du pouvoir. Vladimir Poutine fait peur, jusque dans ses propres rangs, analysent les renseignements britanniques et américains. Lors d'une conférence de presse depuis l'Australie, le 30 mars 2022, le patron du renseignement britannique, le GCHQ, Jeremy Fleming, estime que la conséquence est directe : les conseillers du Kremlin n’osent pas lui dire la vérité et refusent donc de lui parler pas de sa stratégie défaillante lors de l'offensive en Ukraine, qui dure depuis 35 jours désormais. 

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Jeremy Fleming détaille ainsi quelques-uns des faits marquants notés par son service : "Nous avons vu des soldats russes - à court d'armes et le moral en berne - refuser d'exécuter les ordres, saboter leur propre équipement et même abattre accidentellement leur propre avion", a-t-il déclaré lors d'un discours à l'Université nationale australienne de Canberra, estimant que Vladimir Poutine avait surestimé la capacité de son armée à remporter une victoire rapide.

Un enjeu personnel et une "branche fantôme"

Toujours selon Jeremy Fleming, cette guerre est d'ailleurs devenue un enjeu personnel pour le président russe. Et elle n’est pas finie, malgré les avancées dans les pourparlers. D’abord, la stratégie russe sur le terrain n’est pas claire malgré les déclarations récentes de son état-major. Ensuite, la désinformation reste une arme privilégiée par le Kremlin, par le biais de médias d’Etat, de sites internet et d’influenceurs : la cyberguerre a également bien lieu. Enfin, le patron du renseignement britannique confirme que le groupe Wagner renforce sa présence sur le sol ukrainien. Il décrit ces mercenaires comme une "branche fantôme de l’armée russe" lui permettant de se dédouaner des opérations les plus risquées.

Enfin, selon Jeremy Fleming, le Kremlin n'a pas mesuré la résistance ukrainienne, ni évalué assez rapidement l'impact des sanctions économiques, mis en place par de nombreux pays. 

Les renseignements mis en cause ?

Plus largement, la question du renseignement militaire est mis en cause, y compris en France. "Le problème, c'est qu'on a tous vu le conflit venir. Sauf qu'on ne l'a pas vu avec la même précision", précise ainsi Gérald Arboit, responsable de l'étude du renseignement au Cnam, spécialiste du renseignement.

Invité à réagir sur le départ du général Éric Vidaud à la tête du renseignement militaire français, mis en à cause dans sa gestion de la guerre en Ukraine, Gérald Arboit estime ainsi que les conflits comme celui-ci sont difficilement prévisibles, malgré "deux sources britanniques implantées dans l'appareil politique russe" : "On s'attendait à ce que les Russes interviennent après le printemps, c'est-à-dire à partir du moment où les terres étaient sèches et où on pouvait faire passer des chars ou des véhicules blindés à travers champs", explique-t-il. Et de conclure : "On n'est pas dans la divination."

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