Reportage Guerre en Ukraine : à Odessa, les juifs ukrainiens prennent la route de l'exil
Vladimir Poutine a justifié son offensive en parlant de "dénazifier" le pays. Les juifs d’Ukraine sont pourtant nombreux à fuir, notamment dans la ville portuaire du sud, multiculturelle. Des départs massifs qui sont aussi liés à des enjeux locaux.
Au lendemain du déclenchement de la guerre en Ukraine, le rabbin de l’une des quatre synagogues de la ville a quitté Odessa. En pleurs, il demande à ses fidèles de prier pour leur ville, leur pays. Avant la Seconde Guerre mondiale, 350 000 juifs vivaient dans la cité portuaire du sud du pays, raconte Elia, un fidèle d’une synagogue du centre historique : "C'est impossible de le dire avec exactitude, mais certains disent qu'aujourd'hui, il y a 50 000 juifs, d'autres 30 000. Je ne sais pas combien exactement, mais entre 30 et 50 000 personnes. Nous sommes une communauté importante."
>> Guerre en Ukraine : suivez les dernières actualités sur la situation dans notre direct
Elia ne veut pas parler de la situation actuelle. Cet habitant d'Odessa se réfugie dans l’histoire du continent. Il n’accorde pas plus d’attention que cela au terme de "dénazification" utilisé par Vladimir Poutine pour justifier l'invasion de l'Ukraine : "Je vais vous dire franchement : tous les mots de tous les politiciens, de tous les partis, je dis bien tous les politiciens, tous leurs mots, c'est juste de la propagande. Ils n'ont rien d'authentique dans leur discours, ni dans leur façon d'agir."
Un nouveau gouverneur proche de l'extrême droite
Il faudra du temps à Elia pour nous livrer le fond de sa pensée. Il marche sur des œufs. Odessa a un nouveau gouverneur, depuis une semaine. C’est un ancien commandant du bataillon Aïdar, un groupe paramilitaire qui a combattu dans le Donbass pour mater l’insurrection prorusse. Certains hommes et dirigeants de cette unité ont été vus arborant des symboles néonazis. Quelques-uns sont aujourd’hui des élus de partis d’extrême droite.
Elia ne cite aucun nom, ne donne aucune référence, mais ses propos sont bien ceux d’un homme qui n’a pas qu’un seul ennemi : "Il y a un proverbe ici qui dit : une mauvaise paix est meilleure qu'une bonne dispute. Notre avenir se meurt et c'est ce qui nous fait peur. Le problème, c'est que tout le monde cherche une réponse simple. Mais... il n'y en a pas."
"Ceux qui sont vus comme des héros nationaux ici en Ukraine ne le sont pas forcément pour tous et peuvent être vus ailleurs comme des salauds."
Elia, fidèle d'une synagogue d'Odessaà franceinfo
Les synagogues d’Odessa aident ceux qui le veulent à partir vers la Roumanie et la Moldavie voisines. Près de la moitié de la communauté juive serait déjà partie à l’étranger.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.