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Élargissement de l'Otan à la Finlande : "La Russie ne comprend que le rapport de force”, estime un ancien conseiller politique de l'Otan

La Finlande a officialisé ce dimanche sa demande d'adhésion à l'Otan. Selon Alexis Vahlas, ancien conseiller politique de l'organisation, cette adhésion serait "très salutaire".

Article rédigé par franceinfo
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La Finlande a officialisé dimanche sa demande d'adhésion à l'Otan. (TOMS KALNINS / EPA)

Une adhésion de la Finlande et de la Suède à l’Otan serait “très salutaire” car “la Russie ne comprend que le rapport de force”, a estimé dimanche 15 mai sur franceinfo Alexis Vahlas, enseignant chercheur à Scienco Po Strasbourg et ancien conseiller politique de l’Otan.

La Finlande a effectivement officialisé sa demande d’adhésion à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord. La Suède devrait emboîter le pas puisque le parti social-démocrate au pouvoir dans le pays a donné son feu vert à une candidature, ouvrant ainsi la voie à une demande d’adhésion par le gouvernement. Ces deux pays membres de l’Union européenne sont motivés par la guerre en Ukraine.

franceinfo : Est-ce la fin d'un certain équilibre face à la Russie avec une Union européenne presque entièrement sous les couleurs de l'Otan ?

Alexis Valhlas : Effectivement, c'est peut-être la création ou la recherche d'un nouvel équilibre. Comme vous venez de le dire, la plupart des États membres de l'Union européenne font aussi partie de l'Otan. Dans le cas où la Finlande et la Suède rejoindraient l'Otan, on se retrouvera avec 23 des 27 États membres de l'Union européenne qui seront également membres de l'Alliance atlantique.

Est-ce par conséquent la fin du vaste projet d'une défense européenne commune, d'un régime de sécurité propre à l'Europe ?

Je ne pense pas. Et c'est vrai qu'on a souvent tendance, en particulier en France, à voir les choses de manière exclusive, comme s'il y avait une lecture disjonctive "c'est l'Otan ou l'Union européenne". En réalité, dans le domaine de la défense, les choses sont organisées de manière totalement différentes. Pour la plupart des États membres, on est dans une position très confortable : on a à la fois l’Otan et l'Union européenne. L'Otan offre un potentiel militaire avec les États-Unis, la Turquie, le Royaume-Uni dont ne disposent pas l'Union européenne et l'Union européenne se construit sur le plan de la défense de manière autonome mais complémentaire par rapport à l'Otan. C'est ça la ligne et de ce point de vue là, ça ne fait que renforcer le partenariat stratégique entre les deux organisations. Pour les menaces majeures, l'Otan et l'Union européenne en acteur militaire autonome mais complémentaire de l'Alliance atlantique.

Cela veut dire que juridiquement, militairement, toute action de la Russie vis-à-vis de ces deux pays va être une action contre l'Otan. Quelles conséquences cela va avoir ? Cela va créer de nouvelles tensions au sein de l'Union européenne puisque la Russie promet une réponse en cas d'adhésion ?

Franchement, je pense qu'au contraire, cela montre à la Russie que tout le monde s'adapte à la situation. Il y a une menace russe qui paraît réelle, qui paraît dangereuse pour un grand nombre d'États. Dans le rapport de force que nous impose la Russie, on a été jusqu’à maintenant assez passifs, systématiquement à s’interroger, à se demander s’il ne fallait pas donner des gages pour essayer de sauver la face. Non, la Russie ne comprend que le rapport de force jusqu'à ce que nous ayons gagné, jusqu'à ce que la Russie arrête son invasion de l'Ukraine. Il faut continuer le rapport de force. L'Otan a un article 10 qui permet l'élargissement de l'organisation à tout Etat européen et à partir du moment où l'Otan est une organisation attractive, il n'y a aucune raison de refuser des candidatures de pays européens.

Quelle peut être tout de même la capacité de nuisance de la Russie, désormais ?

C'est difficile à dire. Ce qui est inquiétant pour nous, c'est que la Russie ne se privera d'aucun instrument pour essayer de nous diviser, de nous affaiblir. C'est pour cela, il faut être fort, il faut être prêt à tout. Mais il ne faut pas être sur une position trop défensive. Et c'est pour cela que cette initiative-là de la Finlande et éventuellement de la Suède, à mon avis, est très salutaire dans le rapport de force actuel.

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