Crise ukrainienne : "Le problème de l'Europe c'est qu'elle n'a pas anticipé la discussion", estime un journaliste spécialisé
Pour certains Européens "la Russie est un ennemi, pour d'autres c'est un partenaire, voire un ami", souligne Nicolas Gros-Verheyde, rédacteur en Chef de Bruxelles2 (B2), un quotidien sur la géopolitique européenne.
Alors que Sergueï Lavrov, le chef de la diplomatie russe et son homologue américain Antony Blinken se rencontrent vendredi 21 janvier à Genève pour tenter de désamorcer la crise ukrainienne, l'Europe paraît muette. "Le problème de l'Europe c'est qu'elle n'a pas anticipé la discussion", estime sur franceinfo Nicolas Gros-Verheyde, rédacteur en Chef de Bruxelles2 (B2), le quotidien sur la géopolitique européenne et correspondant de Sud-Ouest à Bruxelles.
franceinfo : On a l'impression que le grand absent de cette séquence diplomatique c'est l'Europe ?
Nicolas Gros-Verheyde : Je ne vais pas vous dire le contraire, vous le voyez sur la photo. Ce sont les États-Unis qui négocient avec la Russie. L'Union européenne n'est pas un tout, c'est 27 États membres qui ont chacun leur stratégie, leur histoire et leur politique. Pour certains, la Russie est un ennemi, pour d'autres c'est un partenaire, voire un ami. Donc avant même d'avoir une discussion avec les Russes, il faut se mettre d'accord sur ce qu'on va discuter et le problème de l'Europe, elle est absente, parce qu'elle n'a pas anticipé la discussion.
Quel regard porte la Russie sur l'UE ?
En 2009, la Russie proposait un accord de sécurité à l'Europe, qui n'a pas voulu ou pas pu saisir la perche qui était tendue. En 2008, Nicolas Sarkozy était à Moscou pour négocier un accord de cessez-le-feu lors de l'intervention russe en Géorgie. Aujourd'hui il n'y a rien de tout cela. En une dizaine d'années, il y a eu un changement complet de la position russe : elle était de considérer l'UE comme un partenaire pour diviser l'OTAN par rapport aux États-Unis et maintenant elle compte plus sur les États-Unis et veut en fait diviser l'UE. Peut-être que les Européens n'ont pas su saisir ce changement-là.
Aujourd'hui la Russie préfère discuter directement avec les Américains ?
C'est plus facile. L'ambition de la Russie c'est de retrouver la splendeur qu'elle avait perdu du côté de l'URSS et d'avoir un espèce de glacier autour d'elle, qui lui assure une certaine sécurité et un bassin économique.
"Avec les États-Unis, vous jouez avec le premier de la classe, donc vous êtes par nature grand."
Nicolas Gros-Verheyde, journaliste spécialisé dans les questions européennesà franceinfo
Il faut donc discuter avec les USA et peut-être qu'on arrivera à avoir une sorte de compromis, sous la table, qui est que l'Ukraine ne rejoigne pas le camp occidental. C'est l'enjeu stratégique depuis toujours.
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