Les jeunes, premières victimes de la crise en Grèce
La plupart des jeunes grecs sont contraints de rester ou de revenir dans le giron familial. A 30 ans, Andrianna vit avec sa sœur aînée et sa mère, après une première tentative d’indépendance ratée : "Quand j’habitais avec mon copain, on travaillait. On gagnait 600 euros chacun par mois… Notre loyer c’était 400, 200 pour l’électricité, 200 pour les courses, le téléphone, quelques sorties… Au final même à deux, on n’y arrivait pas ! "
La jeune femme a donc dû mettre de côtés quelques-uns de ses rêves et un peu de sa liberté : "C’est vrai, ça me freine un peu… Je ne peux pas inviter des amis, quand mon copain vient il faut que je vois avec ma mère pour qu’elle aille dormir ailleurs… Mais bon, je suis habituée. La plupart de mes amis vivent la même chose que moi, et ceux qui sont propriétaires de leur appartement, ils ont quand même besoin de l’aide de leurs parents pour manger ".
La solidarité familiale permet encore de faire rempart à la crise mais les jeunes grecs manquent à la fois d’illusions et de perspectives. Un horizon barré par les chaînes de télévision, qui ressassent la situation dramatique dans laquelle se trouve le pays.
52 % de chômage chez les moins de 24 ans
Et puis l'autre défi, c'est de trouver du travail, et là non plus, ce n'est pas tâche facile. Un seul coup d'œil sur les statistiques en dit long : 52 % de chômage chez les moins de 24 ans et parmi eux une majorité de femmes, comme Eléna. Après son diplôme de comptabilité, Eléna n’a rien trouvé. Sauf la spirale des petits boulots : "Alors... j’ai été serveuse dans des bars et des restaurants, j’ai eu ma propre pâtisserie, j’ai fait secrétaire, comptable - au noir, j’ai été fleuriste aussi, j’ai travaillé dans la librairie de ma mère… dans une épicerie où j’emballais les fromages et dans une banque…"
En ce moment, Elena travaille en usine, sur une chaîne d’emballage. Elle gagne 22 euros par jour pour huit heures de travail : "Des fois je fais des heures supp', mais bon ce n’est pas bien payé… En général, trois euros de l’heure" (Elle en rigole tellement c’est bas) " Est-ce qu’on est vraiment dans un pays développé ? Pour moi, on ne fait que reculer…"
Pour son anniversaire, Eléna a demandé à ses copines de lui offrir des vêtements, ses loisirs sont rares... Opposée aux mesures d’austérité, la jeune fille croyait que son pays allait gagner son bras de fer avec l’Europe : "Pendant une semaine, j’ai eu un vrai sentiment d’espoir, j’ai cru qu’on pourrait dire 'non' à de nouvelles mesures d’austérité, mais là avec cet accord qui a été signé… J’ai été tellement déçue que là j’ai juste envie de quitter le pays ".
De plus en plus de candidats à l'exil
Eléna devrait rejoindre son oncle qui vit aux Etats-Unis. Entre rester pauvre ou partir, elle a fait son choix. Et elle n'est pas la seule candidate au départ. Des jeunes comme Ionna, 28 ans, qui vient de décrocher un contrat dans la finance aux Etats-Unis, là où elle a fait une partie de ses études. Elle repart la semaine prochaine. Avec un petit pincement au cœur mais la certitude de faire le bon choix :
"C’est très difficile de partir à l’étranger. Mais ici, même quand on veut vraiment faire quelque chose, il y a trop d’obstacles. Il faut absolument réformer l’administration publique, mais aussi le secteur privé. Il y a en plus une sclérose administrative qui crée une atmosphère de misère, de dépression… C’est ça qui m’a poussée à partir ".
Mais on observe aussi le mouvement inverse. Et il y a des jeunes qui sont quand même heureux de vivre en Grèce, ou pour qui l’insouciance est aussi une forme de protection. Marisa, croisée dans le quartier d’Exarchia, a tout de suite voulu montrer une photo sur son téléphone : "Regarde, ça, c’est une plage à 20 minutes du centre-ville… On habite l’un des plus beaux pays au monde. Alors oui, ça va être difficile mais on a déjà souffert au cours de notre histoire. Ce ne sera pas la première fois, et ce ne sera pas la première fois non plus qu’on s’en sortira. Il faut rester positif, garder la joie de vivre !!! "
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