Législatives au Portugal : courte victoire du centre droit, poussée de l'extrême droite... Ce qu'il faut retenir du scrutin

Les législatives de dimanche ont mis fin à huit ans de règne socialiste.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le candidat de centre droit de l'Alliance démocratique, Luis Montenegro, après avoir remporté les élections législatives, à Lisbonne (Portugal), le 10 mars 2024. (MIGUEL RIOPA / AFP)

L'opposition de centre droit a remporté une très courte victoire, dimanche 10 mars, lors des élections législatives au Portugal, devant les socialistes au pouvoir depuis huit ans. Le pays bascule cependant clairement à droite après une nouvelle poussée des populistes, selon des résultats presque complets publiés lundi. L'Alliance démocratique (AD, centre droit) a ainsi emporté 29,49% des voix, tandis que le Parti socialiste (PS) arrive en deuxième position avec 28,66% et le parti d'extrême droite Chega troisième avec 18,06%.

Le scrutin a été précipité par la démission surprise, en novembre, du Premier ministre sortant Antonio Costa, qui ne briguait pas de nouveau mandat. A trois mois des élections européennes prévues le 9 juin en France, ce vote vient confirmer que l'extrême droite progresse à travers le Vieux Continent, comme l'avaient déjà montré les électeurs italiens ou néerlandais. Voici ce qu'il faut retenir des résultats de ces élections.

Des résultats plus serrés que prévu entre le centre droit et les socialistes

Les élections anticipées avaient été convoquées après la démission du Premier ministre sortant, Antonio Costa, début novembre. Le socialiste avait été cité dans une enquête pour trafic d'influence. Le pays était l'un des rares en Europe à être dirigé par la gauche. Le bilan du gouvernement socialiste sortant a été terni par l'inflation, des dysfonctionnements dans les hôpitaux et les écoles et une importante crise du logement, malgré de bons résultats économiques. Même si le PS enregistre son pire score depuis 2011, les résultats sont plus serrés que ce que laissaient entrevoir les sondages. Aucun parti n'a réussi à obtenir la majorité absolue dans ce scrutin marqué par le taux de participation le plus élevé en près de 30 ans.

Alors que seuls les quatre sièges des circonscriptions de l'étranger n'ont pas encore été attribués, l'AD, emmenée par Luis Montenegro, 51 ans, a remporté 29,49% des voix et 79 députés sur un total de 230. Le PS, qui avait obtenu une majorité absolue en 2022 avec un score de 41,4%, est désormais en deuxième position avec 28,66% des voix et 77 sièges. "Je m'attends à ce que le président de la République me nomme pour former un gouvernement", a annoncé Luis Montenegro dans la soirée. "Malgré la différence minime entre nous et l'AD, (...) nous n'avons pas gagné les élections et nous irons dans l'opposition", a confirmé le candidat socialiste Pedro Nuno Santos, ancien ministre de 46 ans. 

Une forte poussée de l'extrême droite

Le parti populiste Chega ("Assez") dirigé par André Ventura, 41 ans, a plus que doublé son score en obtenant 18,06% des suffrages, contre 7,2% lors des précédentes législatives de janvier 2022. Fervent catholique, cet ancien professeur de droit et commentateur de football est connu pour ses attaques xénophobes contre la minorité tsigane. Il a fait campagne en accusant l'AD et le PS, qui se partagent le pouvoir depuis l'avènement de la démocratie, d'être "les deux faces d'une même pièce qu'il faut combattre". En nombre de sièges, la formation a quadruplé sa représentation en passant de 12 à 48 députés, renforçant ainsi son rang de troisième force politique du pays.

Cette nouvelle percée de l'extrême droite intervient alors que le Portugal commémore le mois prochain le 50e anniversaire de la Révolution des œillets, qui a mis fin à la dictature fasciste de Salazar et à treize années de guerres coloniales. "Chega a demandé à devenir la pièce maîtresse du système politique et a atteint cet objectif", s'est félicité André Ventura après avoir salué "un résultat absolument historique". A trois mois des élections européennes, ces résultats sont un signal positif pour les alliés européens de Chega, dont le Rassemblement national en France et l'AFD en Allemagne. "Bravo à notre ami André Ventura pour ce beau résultat", s'est ainsi félicitée Marine Le Pen sur X.

La formation d'un gouvernement minoritaire sur les rails

Le président portugais Marcelo Rebelo de Sousa doit inviter le chef du centre droit à former un gouvernement cette semaine, après des consultations avec les chefs de partis politiques. Le résultat des élections ne permet pas au centre droit de former une majorité absolue d'au moins 116 élus à lui seul, ni même en coalition avec le petit parti Initiative libérale, arrivé en quatrième position avec 5% des suffrages et huit sièges. Si André Ventura s'est dit "disponible" pour "donner un gouvernement stable au Portugal" au sein d'"une majorité forte à droite", Luis Montenegro a rejeté toute collaboration avec l'extrême droite. "C'est non", a-t-il répondu à des journalistes qui lui demandaient si une alliance avec Chega était possible, rapporte le média public portugais RTP.

Cette alliance ne devrait cependant pas être nécessaire. Pedro Nuno Santos a ainsi assuré que le PS n'empêcherait pas la formation d'un gouvernement minoritaire. Le candidat socialiste a cependant rejeté tout soutien direct à un gouvernement de droite, promettant de "renouveler" son parti dans l'opposition, et a laissé planer la menace de voter contre son prochain budget. Ainsi, face à l'absence de majorité absolue, le pays se retrouve confronté à un risque d'instabilité politique. "Sans le soutien des socialistes, il n'est pas certain que le centre droit puisse adopter des lois", souligne le média spécialisé Politico. Luis Montenegro a promis de réduire les impôts afin de doper la croissance, tout en disant vouloir améliorer les services publics. 

Dans ce contexte, le président de la République, le conservateur Marcelo Rebelo de Sousa, sera sans doute appelé à intervenir davantage, puisque la Constitution portugaise lui attribue un rôle d'arbitre en cas de crise ou d'impasse. Mais, quoi qu'il arrive, le Parlement ne peut pas être à nouveau dissous dans les six mois suivant son élection.

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