Le Portugal va-t-il connaître le cauchemar de la Grèce ?
Le président portugais Anibal Cavaco Silva a récemment appelé l’UE à se "débarrasser du mot ‘crise’ pour se concentrer sur d'autres objectifs importants pour l'Europe". La méthode Coué pour éloigner le spectre de la conjoncture actuelle ? Car sous l’effet de la sévère politique d’austérité, le PIB pourrait reculer de 3 % en 2012.
Depuis 2010, la situation financière du pays n’a cessé de se dégrader, malgré l’austérité. Et malgré un prêt de 78 milliards d’euros obtenu auprès de la " troïka" des créanciers, en l’occurrence l’UE, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque centrale européenne (BCE). En échange, Lisbonne a dû s’engager à mettre en œuvre un plan d'austérité draconien, voté par 80 % des parlementaires et négocié avec les partenaires sociaux.
Le plan prévoit une hausse des impôts directs et de la TVA (à 23 %), le gel des retraites, une baisse des salaires dans la fonction publique, une réduction des aides sociales et aux chômeurs, une suppression de sept jours fériés et de congé. Les règles de licenciement ont été assouplies, les expulsions de leurs logements des mauvais payeurs sont facilitées.
L'austérité va-t-elle aggraver la récession ?
Mais aux dires des économistes, ce programme risque d’aggraver la récession. Ainsi, la consommation des ménages devrait se replier de 11 % sur la période 2011-2013, selon la Banque du Portugal.
Le pays n’a peut-être pas besoin de cela. Le taux de chômage s’élève à 13 %, un record historique. Une personne sur cinq vivrait déjà sous le seuil de pauvreté dans un pays où le salaire minimum s’établit à 475 euros brut par mois (sur 14 mois). Dans le même temps, l’endettement des ménages est colossal. Conséquence : entre 50.000 et 100.000 Portugais quitteraient chaque année leur pays, notamment pour aller en Suisse.
Sujet de la TSR (Télévision Suisse Romande), Dailymotion, 30-6-2009
La fin du consensus ?
Dans ce contexte, le large consensus qui régnait jusque là sur la nécessité de l’austérité pourrait commencer à se lézarder. Des dizaines de milliers de personnes, venues de tout le Portugal, ont manifesté le 11 février contre la politique économique du gouvernement de centre-droit. Selon certains observateurs, il s’agit de l’un des plus importants rassemblements depuis 30 ans.
Des voix de plus en plus nombreuses se font entendre sur le fait que les objectifs de retour à la stabilité sont beaucoup trop ambitieux pour être atteints dans les délais impartis. La troïka doit "faire un réajustement" et "revoir" ses "hypothèses", a ainsi estimé l’ex-ministre des Finances Eduardo Catroga qui avait, le premier, négocié avec les bailleurs de fonds pour le compte d’un gouvernement de centre-gauche.
Mais le premier ministre portugais, Pedro Passos Coelho, ne cesse de répéter que "le Portugal n’est pas la Grèce" et qu’il tiendra ses engagements. Il a même annoncé qu’il comptait aller "au-delà de la troïka" et accélérer les réformes structurelles. Pour l’hebdomadaire Expresso, cette stratégie est dangereuse. Le consensus qui prévalait a disparu. "De ce malentendu à la Grèce, il n’y a qu’un pas. Un tout petit pas"...
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