Le plus grand procès jamais organisé sur l'amiante se tient depuis jeudi matin à Turin, au nord de l'Italie
Ce procès est celui de deux ex-dirigeants d'Eternit responsables selon l'accusation de la mort de plus de 2.000 personnes.
L'ex-propriétaire suisse du groupe de matériaux de construction, le milliardaire Stephan Schmidheiny, et un ancien haut dirigeant belge, Jean-Louis Marie Ghislain de Cartier de Marchienne, sont jugés pour avoir provoqué intentionnellement une catastrophe et enfreint les règles de la sécurité au travail.
Les deux hommes sont accusés d'être responsables de la mort de plus de 2.000 personnes et d'en avoir rendu malades plusieurs centaines d'autres, anciens ouvriers ou habitants de Casale Monferrato et Cavagnolo (région de Turin, nord), Rubiera (nord) ou Bagnoli (sud), villes où le groupe avait ses usines.
La filiale italienne d'Eternit a fait faillite en 1986, six ans avant l'interdiction de l'amiante.
Le nombre des parties civiles pourrait monter à 2.000, selon les associations de victimes, alors que 700 ont déjà été enregistrées.
A l'issue des audiences préliminaires qui avaient débuté en avril, le tribunal avait décidé le renvoi en justice des deux ex-dirigeants qui risquent de 3 à 12 ans de prison. Les victimes devraient demander plusieurs centaines de millions d'euros de dédommagements. L'Etat italien est cité à comparaître pour responsabilité civile.
Pour les victimes et leurs proches, l'ouverture de ce procès est une victoire. Après une enquête de plus de cinq ans, le procureur-adjoint Raffaele Guariniello est remonté au plus haut niveau du groupe en matière de responsabilité. "Nous avons découvert que les deux accusés avaient les réels pouvoirs de décision en matière de sécurité au travail pour les usines italiennes", explique-t-il. "Il n'y avait pas de précaution prise pour éviter d'exposer les salariés", dénonce Bruno Pesce, coordinateur de l'association des victimes de Casale Monferrato, "même quand ils ont donné des masques, ils étaient inefficaces". "L'amiante fait partie de l'Histoire (...) et ce serait une erreur de chercher à faire un procès à l'histoire à travers ces hommes", avait rétorqué en juillet la défense.
Outre obtenir justice, les victimes entendent faire de ce procès un symbole."C'est une grande opération vérité qui contribuera à la lutte internationale contre l'amiante alors que des pays comme la Chine et l'Inde l'emploient dans des proportions folles comme nous avons pu le faire", souligne M. Pesce.
L'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) française souhaite d'ailleurs que le procès de Turin serve "d'exemple à la France", pays dans lequel un ancien dirigeant d'Eternit a été mis en examen fin novembre.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.