"Je naviguais vers mon espoir", dit le migrant afghan sauvé dans la Manche
L'Afghan repêché sur un radeau lundi au large de Sangatte témoigne dans "Libération" : "Si on m'avait laissé faire, je serais arrivé en Angleterre."
"Si on m'avait laissé faire, je serais arrivé en Angleterre", assure Assef Husseinkhail, migrant afghan de 33 ans, qui a tenté lundi 5 mai la traversée de la Manche sur un radeau de fortune, et que Libération a retrouvé à Calais.
"Il était bien, mon bateau", assure Assef, qui, parti lundi de Calais, a dérivé plusieurs heures au large de Sangatte sur un radeau, avant de se faire intercepter dans l'après-midi par la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). Trois sobres planches de bois pour le cadre, trois autres pour le fond, un bloc de polystyrène enveloppé dans une bâche pour le flotteur, un pied de table et une canne à pêche en guise de mât, et un drap d'hôpital pour la voile, détaille Libération. Le journal précise que l'homme était à genoux sur les planches, en survêtement et bonnet.
"Ah ! Si j'étais arrivé !"
Assef Husseinkhail affirme qu'il était "content" sur son bateau. "Je naviguais vers mon espoir. Je m'imaginais déjà arriver. J'avais avancé jusqu'à la mer sombre. J'avais de l'eau jusqu'aux genoux et je disais des poèmes", raconte-t-il au quotidien. Il poursuit : "Je sais nager. Mon bateau n'aurait pas pu se renverser, je l'ai testé avant de le mettre à l'eau. J'ai mis vingt jours à le fabriquer. Un jour je ramassais un clou, un autre un morceau de bois. J'allais tous les jours à la plage pour construire mon bateau. Je l'avais bien caché. Les autres me traitaient de fou. Ils me disaient : 'Ne pars pas'. J'étais déterminé. Ah ! Si j'étais arrivé !"
"Il était au large de Sangatte, à 2 milles [3,6 km] des côtes, dans le chenal d'accès des car-ferries", a indiqué à Libération Bernard Barron, président de la SNSM locale. "La mer était très calme, heureusement. L'eau est à 12 degrés. A cette température, on s'endort au bout d'une demi-heure dans l'eau", souligne le sauveteur.
"Tout le monde me dit que c'était dangereux, que j'ai risqué ma vie. Mais, moi, je suis en danger tous les jours ! Ce n'est pas dangereux de vivre ici ?" demande Assef, qui erre entre Asie et Europe depuis quatorze ans, en montrant le campement de tentes et de bâches où près de 200 Afghans vivent face au port. Depuis lundi, "dans les locaux du Secours catholique, les bénévoles veulent être pris en photo avec lui", écrit Libération, à qui Assef a confié : "J'aimerais bien recommencer. Mais je sais qu'ils ne me laisseront pas."
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