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La victoire de Benoît Hamon à la primaire PS, vue par la presse internationale
Benoît Hamon a gagné la primaire socialiste. Preuve que les électeurs ont rejeté la politique du président François Hollande, observe la presse internationale le 30 janvier 2017. Pour autant, le candidat a peu de chances de gagner la présidentielle, ajoutent les journaux étrangers, à la fois ironiques et dubitatifs.
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La victoire de Benoît Hamon «est un petit triomphe», observe la version en français de Russia Today (RT). «Petit»… «La victoire de M.Hamon est le signe patent qu’à gauche les électeurs veulent une rupture avec la politique du président François Hollande», estime de son côté le New York Times. «C’est un verdict accablant sur la présidence ratée de François Hollande, qui s’est montré favorable au marché», constate de son côté le Guardian (centre-gauche) britannique. «Toute la campagne (du parlementaire PS) a consisté à ancrer fermement le parti à gauche alors que beaucoup d’électeurs socialistes jugent désastreux (…) le mandat» du président sortant, «accusé de louvoiement en matière économique et d’avoir trahi les idéaux socialistes».
L’adversaire malheureux de Benoît Hamon, Manuel Valls, qui «a pris une part hyper-active dans le (…) fiasco de Hollande», «est un sac sur lequel frappaient tous les camarades de la gauche du PS, alors que les coups visaient en fait l’âne» présidentiel, analyse le Süddeutsche Zeitung (centre-gauche), journal de Munich. N’en jetez plus!
Cette victoire aux primaires, on peut l’attribuer à une «image d’idéaliste et de candidat de la gauche traditionnelle, qui s’adresse aux électeurs venus du syndicalisme comme aux jeunes concernés par l’environnement et sensibles aux questions sociétales», ajoute le quotidien américain de référence.
Hamon, comme Corbyn et Sanders?
«Idéaliste». Le mot revient souvent à la lecture de la presse internationale. «Utopiste de gauche», précise le Süddeutsche Zeitung. Une posture à laquelle ladite presse ne croit pas forcément…
Ses titres rappellent, comme l’Independent (gauche britannique), que «l’ancien ministre de l’Education soutient le revenu universel de base et la légalisation du cannabis». Des titres qui ne vont pas, parfois, sans une certaine ironie: «Benoît Hamon, le leader qui veut taxer les robots», observe ainsi le journal espagnol El Páis, avec une photo du vainqueur de la primaire du PS affichant un sourire qu'on peut voir comme un peu béat. Au cours de la campagne, il a tenu «un discours dur, anticapitaliste, proche de celui des dirigeants anti-système. Vulgarisant la thèse de "la tension entre le peuple et les élites" ou de la confusion entre les lobbies et les gouvernements, il abhorre le culte sacré de la croissance sans fin.»
Dans ce contexte, le candidat du PS «est fréquemment comparé (au travailliste) James Corbyn au Royaume-Uni et (au démocrate) Bernie Sanders aux USA», rappelle The Independent. Il est le «représentant d’une nouvelle vague de populisme qui a balayé la gauche (française) alors que le parti (socialiste) rejette le style New Labour de la politique de centre-gauche mise en œuvre ces dernières années» en France.
Mais ni Corbyn ni Sanders, malgré leur indéniable succès populaire, n’ont encore su trouver la voie menant au pouvoir. Et à lire les journaux étrangers, Hamon est, lui aussi, loin du compte…
«Parti en ruine»
Pour parler franchement, ces derniers n’y croient pas. Ils ne croient pas que le candidat puisse faire des merveilles. Sa «victoire signifie que (son) parti, divisé, devra faire face à une bataille difficile pour surmonter des cotes de popularité sinistres et relever, à gauche, le défi d’un autre ancien ministre socialiste, Emmanuel Macron», estime The Independent.
Le Süddeutsche Zeitung est beaucoup plus catastrophiste: «On assiste là à la plus grave crise du PS depuis 1971 et sa fondation par François Mitterrand. Le parti est en ruine», constate le quotidien. Car «derrière les projets des deux professionnels de la politique (que sont Hamon et Valls), on trouve des fossés idéologiques jamais refermés, qui divisent le Parti socialiste français depuis des décennies et ont créé deux camps antagonistes: réformisme (et) radicalité», analyse le Spiegel allemand. Un réformisme «fondamentalement désavoué par la présidence désolante de Hollande», poursuit l’hebdomadaire de centre-gauche de Hambourg. «Le faible enthousiasme populaire que soulève (le PS) se mesure à la participation, relativement basse», lors de la primaire, constate le New York Times.
En clair, la presse internationale ne parie pas un euro sur la victoire finale de Benoît Hamon. «Ses chances de gagner la présidentielle (…) sont très minces», pense le Spiegel. Il est peu probable que son bon score lors de la primaire «soit à même de changer l’opinion répandue selon laquelle les candidats de gauche ont peu de chance d’accéder au second tour», ajoute le New York Times. «C’est toute la gauche cabossée qui risque (…) de se noyer au premier», poursuit le Süddeutsche. Pour RT, les jeux sont faits. Et la défaite de Benoît Hamon «certaine, selon la totalité des sondages depuis des mois». Lesquels sondages se sont pourtant trompés en Grande-Bretagne pour le Brexit, et aux Etats-Unis pour Donald Trump. Mais aussi en France… pour les primaires de droite comme de gauche. Réponse certaine le 23 avril.
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