La loi sur la fin de vie en France peut-elle influencer le reste de l'Europe?
Le cadre du texte d'Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP) avait été fixé dès juin 2014 à travers une mission confiée par Manuel Valls dans un «esprit de rassemblement». François Hollande, qui avait promis durant la campagne présidentielle un droit à «une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité», a fait «siennes» les propositions des deux parlementaires.
Un débat sociétal loin d'être apaisé
Le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone (PS) souhaite un «débat apaisé» sur un sujet pouvant faire l'objet de «convictions» mais «point de certitude». Pas si simple, car cette question sensible qui touche à la fin de vie, et donc à la vie, divise. Chacun a son point de vue. Plus de mille amendements ont été déposés sur le texte qui vise à aménager la législation de 2005. Dans la rue, on assiste à une bataille entre anti et pro-euthanasie. Pourtant, ce projet de loi ne propose pas de légaliser l’euthanasie et le suicide assisté. Le débat ne devrait pas se situer là. Finalement, le texte pourrait ne satisfaire personne.
Témoignages sur la fin de vie
Que dit le texte sur la fin de vie en France ?
Il préconise un «droit à la sédation profonde et continue» jusqu'au décès pour les malades incurables dont le pronostic vital est engagé à court terme. Les «directives anticipées», grâce auxquelles chacun peut stipuler son refus d'un acharnement thérapeutique, deviendraient contraignantes. Ainsi, le patient «pourra réclamer de dormir avant de mourir pour ne pas souffrir». Avec l'arrêt des gestes de réanimation, «la mort intervient dans quelques heures ou quelques jours», a même expliqué Jean Leonetti. Ce texte est censé aller plus loin que la loi Leonetti de 2005 relative aux droits des malades et sur la fin de vie.
L'Europe divisée sur cette question
Même si certains Etats membres font pression sur le Parlement européen, le poussant à adopter une position politique sur la fin de vie, l'Union européenne reste muette car elle aurait bien du mal à imposer une directive à l'ensemble des pays tant les histoires, les cultures et les traditions sont différentes. Il faut dire que cette question fait appel à la morale, au religieux et au politique. Schématiquement, on peut dire que si au nord de l'Europe les pays sont plutôt libéraux, les pays du Sud, fortement marqués par la tradition catholique, sont davantage réticents sur cette question.
Pays où tout ce qui se rapporte à l'euthanasie est strictement interdit
En Grèce, tout comme en Roumanie, en Bosnie, en Croatie, en Serbie et en Pologne, l'euthanasie, sous toutes ses formes, est strictement interdite. On parle même d’homicide. Tout contrevenant s'expose à une peine de prison pouvant aller de quelques mois pour la Pologne à 7 ans pour la Grèce.
C'est en Irlande que la législation est la plus sévère. La loi irlandaise ne fait pas mention de l'euthanasie. Toute forme d'assistance à la mort est passible de 14 ans de prison.
Pays où l'euthanasie est interdite, mais où l'arrêt des soins est possible
Certains Etats membres interdisent l’euthanasie mais permettent l'abstention thérapeutique : le médecin pourra alors avec l'accord du patient, ou à défaut de la famille, mettre un terme à l'acharnement thérapeutique. C'est le cas de la France, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Espagne, le Portugal, la Norvège, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie.
Les pays qui autorisent l'euthanasie
Dans cette catégorie, une mention spéciale pour les Pays-Bas qui sont les premiers à avoir accordé ce droit. La loi, votée en 2001 assure une plus grande sécurité aux médecins qui peuvent pratiquer l'euthanasie sans risque de poursuites judiciaires à condition de respecter certains critères. Au Luxembourg, l’euthanasie a été autorisée en 2009 mais reste interdite pour les mineurs.
En Belgique, on parle de suicide assisté. La loi votée en 2002 a été complétée d’une autre loi en février 2014 autorisant l’euthanasie des mineurs en phase terminale qui en font la demande. Ce droit autorisé pour la première fois au monde est soumis à l’accord des deux parents et à l’évaluation du discernement de l’enfant. Une nouvelle étape dans le questionnement sur la fin de vie mais que les législateurs devront prendre en compte. L'acharnement thérapeutique à la naissance d'un enfant malade peut déjà poser la question de sa fin. Le cas d'Emma, enfant très prématuré, en est une parfaite illustration. Et c'est ce débat que son père veut lancer aujourd'hui.
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