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La fin des quotas laitiers, une mesure qui divise les agriculteurs européens

Le temps des quotas de production laitière dans l’Union européenne est terminé. Depuis le 1er avril 2015, les agriculteurs européens de la filière peuvent désormais produire les quantités qu’ils veulent dans un marché désormais libéralisé et sans aucun risque de sanction.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Manifestation contre la suppression des quotas laitiers à Bruxelles. (AURORE BELOT / NURPHOTO)

Ce système des quotas remontait à 1984 après un siècle marqué par une forte surproduction. Cette pratique permettait de contrôler et de stabiliser les prix. En France, les quotas laitiers ont aussi servi d’outil de politique d’aménagement du territoire. 

Les autorités françaises ont misé sur des exploitations gérées par de jeunes agriculteurs en leur facilitant fiscalement la vie. L’Etat s’est assuré que ce système permettait de faire vivre des structures familiales de taille moyenne.
 
Cet outil n’est aujourd’hui plus adapté à la réalité du marché
Sa disparition va permettre aux agriculteurs de produire plus et de conquérir de nouveaux marchés en pleine expansion. Une dérégulation que de nombreux agriculteurs français ne sont pas prêts à affronter. La plupart craignent que cette libéralisation tire la production vers le bas.

Une chute des prix aurait un impact catastrophique tant sur les grosses exploitations qui se sont fortement endettées que sur les petites qui se sont modernisées.


Et si des crises surgissent, les quotas laitiers ne seront plus là pour réguler la production. Evénement climatique, alerte sanitaire mais aussi hausse de la production vont agir sur les cours du lait.

Les agriculteurs redoutent également la concurrence de L’Europe du Nord et notamment de l’Allemagne avec ses fermes géantes de plus de 1000 vaches. Ces dernières permettent de réduire les coûts de production pour vendre le lait moins cher et sont devenues la norme outre-Rhin, alors que dans l’Hexagone, le cheptel moyen ne compte qu’une soixantaine de vaches.
 
Nos voisins allemands, grands gagnants de cette réforme
Premier producteur européen avec 32 millions de tonnes en 2014, l’Allemagne voit comme une libération la levée des quotas : en 30 ans, elle a dépassé plus de 20 fois son quota, préférant payer près de deux milliards d'euros de pénalités.
Ce pays devrait faire partie de ceux qui vont augmenter la production, au même titre que l'Irlande, les Pays-Bas ou encore le Danemark.

Le MIV, principal syndicat germanique du secteur, table sur une production en hausse de presque 20% d'ici à 2020. La branche s'estime suffisamment préparée pour que ces volumes supplémentaires trouvent preneur à prix raisonnable.

Les entreprises du secteur ont fortement investi, à l'image de Deutsches Milchkontor, l'une des plus grosses laiteries allemandes. Cette coopérative de 9400 producteurs a dépensé 500 millions d'euros dans des nouvelles lignes de production de fromage et de lait pasteurisé. L’entreprise mise sur les exportations pour écouler ses stocks vers l'Asie, la chine surtout, où la demande de produits laitiers devrait augmenter de moitié d’ici 2022.
  
La Suisse l’a déjà experimenté  
En 2009, la Suisse a mis fin aux quotas laitiers en vigueur chez ses éleveurs. Et en 2014, le bilan n'est pas des plus positif, selon un rapport de l’European Milk Board remis à Bruxelles.
 
Si la production de lait a augmenté, cela a surtout bénéficié aux grandes exploitations situées en plaine, creusant les écarts avec les régions montagneuses.

De plus, depuis la suppression des quotas, les industriels de l'agro-alimentaire ont eu tendance à encore plus se concentrer pour obtenir des prix bas de la part des éleveurs. Le rapport conclut que la suppression des quotas est défavorable aux producteurs mais aussi aux consommateurs qui y perdent en qualité.

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