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En Suisse, la croissance n'est pas en berne

Le ministère suisse de l’économie s'attend à une croissance du Produit intérieur brut de 1% en 2012. Un chiffre, certes en baisse par rapport aux précédentes prévisions, mais nettement supérieur aux pays de l’Union européenne. Zoom sur un pays qui ne semble pas connaître la crise.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le siège de la multinationale suisse Nestlé à Vevey, sur le lac Léman. (FABRICE COFFRINI / AFP)

Berne estime cependant que la Confédération ne doit pas plonger dans une forte récession, grâce à une demande intérieure soutenue et au taux de changes plancher du franc suisse face à l'euro qui protège ses exportateurs.

La Suisse, dont l'économie dépend en grande partie des performances de ses exportations, subit avec un léger retard les remous conjoncturels dans le monde et notamment chez ses voisins européens.

Signe de ce dynamisme helvétique, «les exportations helvétiques ont décollé de 12,1% en août par rapport au même mois de 2011 en valeur nominale, et de 4,4% en valeur réelle», selon l'Administration fédérale des Douanes. Des exportations tirées par la chimie et les industries de précision.

Pas étonnant que la presse suisse parle parfois de surchauffe.

Surchauffe sur le Léman

Le bord du Lac à Genève (ULI DECK / DPA / DPA/AFP)

«Face à son boom économique, des politiciens de tous bords demandent une trêve. Ou comment la décroissance s’impose en Romandie», la région francophone suisse... Voila ce qu’on pouvait lire dans le journal suisse L’Hebdo, en avril 2011.

La région en pleine surchauffe, c’est l’Arc lémanique, la riviéra qui borde le lac Léman côté suisse. Il suffit d’ailleurs d’assister aux retours des transfrontaliers le soir sur la route qui vient de la Suisse vers Besançon pour comprendre l’importance qu’a pris ce bassin d’emploi, tout comme la région du Jura suisse. «Chaque jour, 39.000 frontaliers quittent la Franche-Comté pour venir travailler en Suisse», rappellent les promoteurs d’un système de covoiturage destiné à alléger les nuisances de ce trafic.

Côté suisse, ce boom ne va pas sans poser des problèmes. «Sur les seuls rails du périmètre Lausanne-Genève circulent au quotidien 50.000 passagers. Deux fois plus qu’il y a dix ans, deux fois moins qu’en 2030», précisait L’Hebdo.

Une croissance qui pèse sur les prix de l’immobilier
«Le secteur immobilier a affiché une dangereuse surchauffe dans pas moins de 102 communes suisses au 4e trimestre 2011», dont 69 dans cette région, précise pour sa part La Tribune de Genève.

Les hommes politiques de la région vont même jusqu’ à demander d’«arrêter d’attirer des sièges de sociétés multinationales, cela surstresse toute la région». D’après les derniers scénarios de l’Office fédéral de la statistique, la population vaudoise devrait grimper de 23,8% d’ici à 2035, celle du canton de Genève de 18,2%.

Genève et Zurich, salaires les plus élevés au monde

Zurich, les berges de la Limmat (AFP/Tibor Bognar / Photononstop)


La capitale économique suisse, Zurich, n’est pas en reste. Le journal économique Bilan titrait fièrement en septembre sur «Les secrets du dynamisme zurichois». L’auteure de l’article, Mary Vakaridis, écrivait : «En arrivant à Zurich, le visiteur découvre une forêt de grues érigeant de nouvelles tours le long des voies de chemin de fer.»

Pour le journal, la croissance zurichoise est du même ordre que celle de l’Arc lémanique, mais que dans ce canton ─ qui a vu sa population croitre de 13% en 10 ans ─ la ville a su « développer ses infrastructures à mesure que son économie et sa population croissaient».

Une étude de la banque suisse UBS a montré que c’est dans les villes suisses de Zurich et de Genève que les salaires bruts sont les plus élevés au monde, suivi en troisième position de Copenhague. Dans la même étude, New York n'arrive qu'en sixième position, tandis que Berlin figure à la dix-neuvième position et Paris à la vingt-et-unième.

Mais comme on a rien sans rien, le journal The Economist a consacré la capitale économique suisse comme la ville la plus chère du monde.

Des chiffres qui n'empêchent pas la Suisse d'être ultra-compétitive
«La Suisse demeure, pour la quatrième année d'affilée, le pays le plus compétitif au monde dans le rapport sur la compétitivité mondiale (édition 2012)», publié par le World Economic Forum (WEF). «Singapour conserve sa deuxième place, tandis que la Finlande se classe troisième, faisant reculer la Suède à la quatrième place, suivis des Pays-Bas et de l'Allemagne», rappelait Les Echos, le 5 septembre 2012. «La Suisse mérite la première place grâce à l'innovation, aux performances de son système scolaire, aux dépenses élevées en recherche et développement et la solide coopération entre le monde universitaire et le secteur privé», soulignait encore le WEF.

Politique monétaire active

La Banque nationale suisse a tout fait pour empêcher son envolée (AFP)
 

Les exportations de la Suisse ─ huit millions d'habitants ─ pèsent autant que celles de l'Espagne : «Par habitant, la Suisse fait ainsi largement mieux que l'Allemagne en termes d'export comme de solde commercial», expliquait dans un article du Monde, l'économiste Philippe Askenazy.

Pour assurer ses capacités exportatrices, Berne a réussi à juguler la montée de sa monnaie qui, en 2011, approchait la valeur de l’euro en fixant une parité de 1,20 FS pour un euro. Pour cela, la Banque Nationale Suisse a acheté en masse des euros. «Comme la Chine, ses réserves de change ont ainsi explosé et dépassent celles de l'ensemble des banques centrales de la zone euro», ajoutait l'économiste.

Des achats massifs qui expliquent en partie pourquoi l'Allemagne et même la France empruntent à des taux extrêmement bas, voire négatifs. Une politique qui, selon Philippe Askenazy, amplifie l'écart entre les pays du sud et du nord de l'Europe. Au risque de déstabiliser les principaux marchés...

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