Autriche : quatre questions sur la démission surprise du chancelier Sebastian Kurz, visé par une enquête pour corruption
Les formations de l’opposition réclamaient la démission du chancelier depuis l’annonce, mercredi, de l’ouverture d’une enquête pour corruption qui le visait directement.
Ce scandale de corruption lui a coûté son poste. Sebastian Kurz a annoncé avoir quitté, samedi 9 octobre, ses fonctions pour assurer "la stabilité" du pays tout en réfutant de "fausses accusations", quelques jours après l'ouverture d'une enquête à son encontre pour corruption. Les Autrichiens connaîssent désormais le nom de leur nouveau chancelier : Alexander Schallenberg, jusque-là ministre des Affaires étrangères. Franceinfo revient sur les raisons et les conséquences de sa démission.
1Qui est Sebastian Kurz ?
Aujourd'hui âgé de 35 ans, Sebastian Kurz était devenu, à la fin 2017, le plus jeune dirigeant élu de la planète en accédant à la chancellerie. Il était entré au gouvernement en 2013, à 27 ans, en tant que secrétaire d'Etat. Il est membre du Parti populaire autrichien (ÖVP), une formation conservatrice.
En mai 2019, un premier scandale de corruption nommé "Ibizagate" avait bousculé son gouvernement. Sebastian Kurz avait spectaculairement réussi à surmonter cette crise. En janvier 2020, il avait regagné sa place de chancelier en formant une coalition avec le parti des Verts.
2De quoi est-il soupçonné ?
Sebastian Kurz est soupçonné d'avoir utilisé par le passé des fonds gouvernementaux pour s'assurer une couverture médiatique favorable. Selon le parquet, entre 2016 et 2018, des articles élogieux et des études d'opinion "partiellement manipulées" auraient été publiés en échange de l'achat d'espaces publicitaires par le ministère des Finances, géré à cette époque par les conservateurs.
L'ancien chancelier, neuf autres suspects ainsi que trois organisations sont visés par une enquête pour diverses infractions liées à cette affaire. Des perquisitions ont eu lieu mercredi, notamment au siège du Parti populaire autrichien et à la chancellerie.
Le dossier des procureurs se base sur une série de messages téléphoniques. En attendant l'issue de l'enquête, Sebastian Kurz reste à la tête du parti conservateur et siégera au Parlement.
3Pourquoi a-t-il démissionné ?
Sebastian Kurz est emporté par le scandale pour la deuxième fois. "Il serait irresponsable de glisser vers des mois de chaos ou d'impasse", a-t-il déclaré samedi, devant la presse à Vienne, expliquant se retirer pour "la stabilité" du pays tout en réfutant de "fausses accusations".
"Je veux céder la place pour éviter le chaos", a-t-il ajouté. Depuis l'annonce mercredi par le parquet de l'ouverture d'une enquête à son encontre pour corruption, Sebastian Kurz était sous pression pour se retirer. Il avait jusqu'alors refusé, dénonçant des allégations "fabriquées". Mais il a finalement préféré prendre les devants alors qu'il était sous la menace, mardi, d'une nouvelle destitution par le Parlement.
Werner Kogler, le chef des Verts, qui gouvernent en coalition avec les conservateurs, a salué, samedi, "une décision appropriée". Le leader des écologistes avait jugé, la veille, que Sebastian Kurz n'était "plus apte à exercer ses fonctions", à l'issue d'entretiens avec les chefs des autres partis. Les conservateurs (ÖVP) doivent maintenant proposer quelqu'un "d'irréprochable", avait-il estimé.
4Qui le remplace ?
Le ministre des Affaires étrangères, Alexander Schallenberg, deviendra lundi le nouveau chancelier. Ce diplomate de 52 ans est un proche du chancelier sortant et son nom a été proposé dès samedi par Sebastian Kurz pour lui succéder. le futur chancelier a évoqué "un moment et une tâche particulièrement difficiles, compliqués pour nous tous", se félicitant que son parti, l'ÖVP, fasse preuve "d'un incroyable degré de responsabilité envers ce pays".
Alexander Schallenberg a rencontré dimanche le président autrichien Alexander Van der Bellen. A l'issue de cet entretien, le président a déclaré qu'Alexander Schallenberg prêterait serment lundi afin que "le travail pour notre pays puisse continuer". "Cette crise gouvernementale est terminée", a déclaré Alexander Van der Bellen dans un discours télévisé.
Le chef de la diplomatie s'était également entretenu avec le vice-chancelier, Werner Kogler. Celui-ci a fait savoir dès samedi soir qu'il soutiendrait la nomination d'Alexander Schallenberg à la chancellerie, afin de maintenir au pouvoir la coalition conservateurs-Verts. "Surtout, je suis heureux qu'il existe une possibilité d'ouvrir un nouveau chapitre dans le travail du gouvernement de coalition", a-t-il ajouté. Le reste de l'opposition s'est montrée moins enthousiaste, déplorant la poursuite du "système Kurz".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.