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Une couverture du Spiegel avec Erdogan envenime les relations Allemagne-Turquie
Ankara n’apprécie pas du tout, mais alors pas du tout, une édition spéciale du grand hebdomadaire d’info allemand «Der Spiegel» sur la Turquie. Une édition intitulée «La Turquie focalise l’attention». Avec comme titre «Un pays perd sa liberté». Et une photo du président Erdogan, l’air d’un parrain, lunettes de soleil sur le nez.
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L’édition spéciale est sortie le 13 septembre 2016. Mais curieusement, Der Spiegel n’en fait aucune promo. Il faut vraiment longtemps chercher avant d’en trouver une trace sur son site… Les commerciaux de l’hebdo en ont-ils un peu honte?
Il faut dire que la couverture est plutôt choc. La photo de Recep Tayyip Erdogan, le visage impassible, l’air un peu mafieux à l’italienne ou à la sud-américaine, illustre bien le propos sur l’avènement, dans son pays, de ce qui pourrait devenir une dictature après le putsch de juillet. Lequel Erdogan, «au départ réformateur, se transforme en despote», dixit l’hebdomadaire. Avec, en arrière-plan du portrait du dirigeant turc, un photomontage de deux minarets d'une mosquée d'Istanbul (qui ressemble fort à la célèbre Mosquée bleue), transformés en… missiles au moment de leur lancement. Une probable allusion aux interventions de l’armée d’Ankara contre les Kurdes et en Syrie.
En Turquie, on ne s’y est pas trompé. Le ministère des Affaires étrangères a jugé que cette publication traduisait «un état d'esprit tordu et biaisé» dans le traitement du pays.
«Particulièrement provocant»
Le porte-parole du ministère, Tanju Bilgic, est revenu sur l’affaire en jugeant la une de l’hebdomadaire allemand «particulièrement provocante» dans la mesure où elle a été publiée au moment où la Turquie célèbre la fête musulmane d'Al-Adha (fête du Sacrifice, intervenant un mois après la fin du Ramadan). Der Spiegel a cherché à véhiculer «une image négative, non seulement de la Turquie, mais également de l'islam», a-t-il estimé. Sans avoir peur de faire l’amalgame entre le pays et la religion...
Dans le passé, la couverture de la Turquie par Der Spiegel a déjà donné lieu à plusieurs passes d'armes avec les autorités turques. En mars 2016, le correspondant du magazine à Istanbul avait dû quitter le pays, son accréditation n'ayant pas été renouvelée.
Depuis des semaines, les relations germano-turques sont tendues en raison de l'adoption par le Bundestag (Parlement allemand) d'une résolution reconnaissant le génocide arménien. Mais aussi à cause des menaces turques de suspendre un accord crucial limitant l'afflux de migrants en Europe.
Début août, la Turquie a convoqué le chargé d'affaires allemand au lendemain d'une manifestation de Turcs à Cologne pour laquelle le président Erdogan s'était vu interdire de s'exprimer par vidéo.
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