Reportage "Il faut conserver les traces de l'histoire" : sans repreneur, l'ancienne villa de Joseph Goebbels, figure du nazisme, pourrait être rasée

Que faire de l’ancienne villa de Joseph Goebbels, à Wandlitz, au nord de Berlin ? C’est la question que se pose la capitale allemande, qui en est propriétaire. Personne n’a les moyens de réhabiliter ce site, qui abrite plusieurs bâtiments.
Article rédigé par Sébastien Baer
Radio France
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Temps de lecture : 3min
Oliver Borchert, maire de Wandlitz, en Allemagne, où se trouve l'ancienne villa de Joseph Goebbels. (SÉBASTIEN BAER / RADIO FRANCE)

La capitale allemande a bien du mal à trouver une utilité à la luxueuse ancienne propriété de Joseph Goebbels, construite pourtant dans un cadre enchanteur, près d’un lac, à la fin des années 30. La ville propose même de céder l’édifice du ministre de la Propagande d'Hitler, contre un euro symbolique. Mais sans succès jusqu’à présent. 

Cachée dans la forêt, la propriété s’étend sur près de 17 hectares. En forme de U, l’édifice abrite plusieurs salons, une douzaine de chambres, une salle de cinéma privée. "Une villa ultramoderne, où les sols sont en marbre, décrit Thomas Drachenberg, le conservateur régional, pour les années 30, c’était très luxueux".

Après son installation en 1936, c'est là que Goebbels travaillait "loin de l’enfer des bombes qui tombaient sur Berlin", et qu'il "a écrit son célèbre discours du Palais des Sports, qui a précédé le terrible rouleau-compresseur de la Seconde Guerre mondiale", énumère encore Thomas Drachenberg.

Une villa qui coûte 300 000 euros par an

Avec le temps, le complexe, inoccupé depuis 24 ans, se dégrade et la réhabilitation complète du site pourrait atteindre les 350 millions d’euros. Même si "la structure est bonne" et que "les toits ont été refaits", grâce à un investissement de quatre millions et demi d'euros, "les fenêtres, les portes, tout ça a vieilli", déplore Hansi, le gardien de la propriété. "Il faut aussi refaire l’électricité. Si on avait commencé plus tôt, on aurait économisé beaucoup d’argent."

"On ne peut pas payer éternellement. On a besoin d’argent ailleurs, car on a beaucoup de retard dans les rénovations des casernes de police et de pompiers."

Joanna Steinke, porte-parole de la société immobilière

à franceinfo

Pour entretenir le complexe, la ville de Berlin, qui en est propriétaire, dépense chaque année 300 000 euros. Une somme de plus en plus difficile à réunir, d’autant que la municipalité a d’autres priorités, explique Joanna Steinke, la porte-parole de la société immobilière chargée de gérer le site. "Il y a du gardiennage, de l’élagage, des réparations quand les vitres ou les portes sont cassées, et cette somme augmente bien sûr au fur et à mesure que l’état des bâtiments se dégrade."

"Si on les efface, peut-être que dans deux générations, plus personne ne saura ce qui s’est passé ici avec le nazisme et la RDA. Ce site a une valeur historique, il est unique."

Oliver Borchert, maire de Wandlitz

à franceinfo

La ville a bien tenté de vendre les bâtiments, mais les 350 millions d’euros nécessaires pour les réhabiliter ont dissuadé les potentiels acquéreurs. Faute de repreneur, le complexe, pourtant classé monument historique, pourrait être rasé. Une perspective à laquelle s’oppose le maire de la commune, Oliver Borchert. Pour lui, "il faut conserver les traces de l’Histoire pour la postérité, les rendre visibles".

"Si on les efface, peut-être que dans deux générations, plus personne ne saura ce qui s’est passé ici avec le nazisme et la RDA. Ce site a une valeur historique, il est unique." Le maire a encore l’espoir d’offrir au site une seconde vie. Parmi les pistes imaginées, la reconversion du complexe en logements, en musée ou en pôle universitaire.

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