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Droits de l'homme : comment la tension est montée entre la Turquie et l'Allemagne

Depuis l'arrestation d’un militant des droits de l’homme d'origine allemande, Berlin multiplie les sanctions à l'égard de la Turquie. Elle a annoncé vendredi avoir gelé ses livraisons d'armement à la Turquie. Franceinfo revient sur la brouille en quatre actes. 

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Recep Tayyip Erdogan, lors d'un discours à Istanbul (Turquie), le 15 avril 2017. (BULENT KILIC / AFP)

Ce n'est pas la première fois que l'Allemagne et la Turquie s'écharpent, mais les conséquences ont rarement été aussi fortes que cette fois. Voilà trois semaines que Berlin demande la libération d'un militant des droits de l'homme d'origine allemande. Bien décidées à faire plier Ankara, les autorités allemandes ont annoncé, vendredi 21 juillet, avoir gelé ses livraisons d'armes à la Turquie. Franceinfo vous résume la brouille en quatre actes.

Acte 1 : la Turquie arrête des militants des droits de l’homme

Tout commence le 5 juillet. Ce jour-là, les autorités turques arrêtent dix militants des droits de l'homme. Quelques jours plus tard, le 18 juillet, un tribunal turc décide d'en relâcher quatre et d'en maintenir six en prison. Parmi eux, un Suédois et un Allemand "qui étaient en Turquie pour animer un atelier numérique", explique Le MondeIls sont accusés de "commettre un crime au nom d’une organisation terroriste", explique Andrew Gardner, chercheur spécialiste de la Turquie à Amnesty, à l’AFP. L'ONG dénonce un "simulacre de justice".

Acte 2 : l'Allemagne "réoriente" sa politique vis-à-vis de la Turquie

Excédée par l'incarcération de son ressortissant, Berlin monte aussitôt au créneau. "Nous sommes solidaires avec Peter Steudtner, dont la détention est injustifiée et œuvrons à tous les niveaux pour le soutenir", écrit sur Twitter le porte-parole de la chancelière, Steffen Seibert. L'ambassadeur turc est immédiatement convoqué. Et le chef de la diplomatie, Sigmar Gabriel, rappelle que ces violations systématiques de l'Etat de droit ne peuvent "pas rester sans conséquences". 

Le 20 juillet, Berlin annonce donc une "réorientation" de sa politique vis-à-vis de la Turquie. En clair, elle décide la frapper au portefeuille en mettant en place des mesures qui pénalisent économiquement le pays. La première d'entre elles est une mise en garde du ministère des Affaires étrangères pour les voyages en Turquie, destination traditionnellement très prisée des vacanciers allemands.

Acte 3 : la Turquie dénonce un "chantage" de l'Allemagne

La Turquie réplique tout de suite. "Nous voulons continuer à voir en l'Allemagne un pays allié et ami. Nos relations ne sauraient être basées sur le chantage et la menace, mais doivent être régies par les normes et principes internationaux", déclare le ministère des Affaires étrangères turc dans un communiqué daté du jeudi 20 juillet.

Mais les propos les plus virulents proviennent du chef de la diplomatie turque, Mevlut Cavusoglu. Il a expliqué que l'Allemagne était devenue "un pays depuis lequel tous les terroristes qui nous sont hostiles (...) déclenchent leurs activités" et que les décisions allemandes avaient des "considérations électoralistes" à l'approche du scrutin législatif de septembre.

Acte 4 : l'Allemagne gèle ses livraisons d'armement à la Turquie

Vendredi, l'Allemagne, ne voyant toujours pas venir la libération de son ressortissant, a décidé d'aller encore plus loin en gelant ses livraisons d'armements prévues à la Turquie. La "réorientation" des relations entre les deux pays "inclut tous les domaines, y compris la politique en matière d'exportations d'armes, indique à l'AFP, un porte-parole du ministère de l'Economie. C'est pourquoi les demandes d'exportations d'armements font actuellement l'objet d'un réexamen."

Berlin souhaite également obtenir le gel de fonds européens destinés à Ankara dans le cadre de son rapprochement avec l'Union européenne. Près de 4,45 milliards d'euros étaient prévus pour la période 2014-2020 mais, signe des tensions déjà existantes, seulement 200 millions ont été versés. 

Enfin, dernière conséquence directe : les deux chaînes de télévision allemandes d'information en continu, n-tv et N24, ont arrêté la diffusion de publicités de promotion de la Turquie sur leur antenne. "Nous avons décidé de ne plus diffuser les spots compte tenu de la situation politique actuelle, a expliqué N24 dans un communiqué. Nous avons à cœur de ne pas irriter notre public au vu de l'évolution en cours" avec la Turquie.

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