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L’article à lire pour comprendre les (nouvelles) élections législatives en Espagne

Les Espagnols sont de nouveau appelés aux urnes dimanche. Le scrutin de décembre n'a pas permis d'aboutir à la formation d'un gouvernement, aucun parti n'ayant recueilli la majorité absolue et les négociations pour une coalition ayant échoué. 

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8 min
De gauche à droite, le chef du gouvernement conservateur et candidat à sa réélection Mariano Rajoy, le leader du Parti socialiste (PSOE) Pedro Sanchez, celui de Ciudadanos (centre droit) Albert Rivera et celui de Podemos (gauche, anti-austérité) Pablo Iglesias, lors d'un débat télévisé avant les législatives espagnoles, le 13 juin 2016.  (JUAN MEDINA / REUTERS)

On prend les mêmes et on recommence. Les Espagnols sont appelés aux urnes, dimanche 25 juin, pour la deuxième fois en six mois. Après l’échec des différents partis à former un gouvernement de coalition à l’issue des précédentes législatives, le roi Felipe VI a dû convoquer de nouvelles élections. Les conservateurs restent favoris, devant le nouveau parti anti-austérité Podemos, qui supplanterait le Parti socialiste comme première force d'opposition.

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Des élections en Espagne ? Mais je croyais qu'elles avaient déjà eu lieu en fin d'année dernière…

Eh oui ! Des législatives ont été organisées le 20 décembre. Mais aucun des deux partis historiques, le Parti populaire (PP, droite) et le Parti socialiste (PSOE, gauche), qui alternent au pouvoir à Madrid depuis trente ans, n’ont bénéficié d’une majorité suffisante pour gouverner (176 voix requises). Le scrutin a été bousculé par l’irruption au Parlement de deux outsiders : Podemos, le parti anti-austérité de gauche, né du mouvement citoyen des Indignés de 2011, et Ciudadanos, un parti libéral surnommé le "Podemos de droite".

Au Congrès, le PP de Mariano Rajoy n’a remporté que 123 sièges, le PSOE 90 sièges, Podemos et ses alliés 69 et Ciudadanos 40.

Arrivé en tête, le Parti populaire a échoué à se trouver un ou des partenaire(s) pour gouverner. Même chose du côté du PSOE, qui n’a pas réussi à former une coalition avec Podemos et Ciudadanos, dont les positions sont trop éloignées. Faute de majorité, le socialiste Pedro Sanchez n'a pu être investi chef du gouvernement, et les électeurs ont été rappelés aux urnes… En attendant, le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy expédie les affaires courantes depuis décembre.

Alors les Espagnols retournent voter… avec les mêmes candidats ?

Vous avez tout compris. Trois jeunes candidats briguent à nouveau le poste de chef du gouvernement, occupé depuis fin 2011 par Mariano Rajoy. Ce dernier, âgé de 61 ans, veut incarner "la stabilité, le sérieux et la confiance" face à ces novices en politique. Après des années de crise, il se targue d'avoir remis la quatrième économie de la zone euro sur la voie de la croissance –au prix de politiques d'austérité draconiennes– et a fait baisser le chômage, dont le taux reste cependant le deuxième plus élevé de l'UE (20,9% en 2015).

En face donc, trois candidats :

Pedro Sanchez, 44 ans, a été élu secrétaire général du PSOE en juillet 2014, à l'issue d'inédites primaires. Professeur d'économie, ce grand brun fringant, surnommé "beau gosse", se flatte de ne pas être un homme de l'appareil politique. Ambitieux et déterminé, il a tenté de rénover un parti déprimé, auquel les électeurs reprochent la mauvaise gestion de la crise économique. Il a cependant obtenu en décembre le pire résultat électoral de l'histoire récente de son parti, avec seulement 90 députés sur 350.

Pablo Iglesias, 37 ans, retente aussi l’aventure sous la bannière de Podemos. Ce politologue et professeur d'université, entré en politique début 2014, a conservé son look de toujours: queue de cheval et simple chemise. Arrogant et populiste pour les uns, charismatique et sincère pour les autres, Iglesias est un orateur brillant qui a forgé son image à la télévision.

Albert Rivera, 37 ans, le leader de Ciudadanos, va lui aussi de nouveau tenter sa chance. Le président du parti fondé en 2006 pour contrer l'essor de l'indépendantisme catalan est partisan d'un libéralisme économique, ce qui lui vaut les faveurs des marchés financiers. Mais certains ne lui ont pas pardonné son éphémère alliance avec les eurospectiques de la coalition Libertas aux élections européennes de 2009.

On risque donc d'avoir le même résultat qu'en décembre ?

Pas nécessairement. Les sondages prévoient la même division de l'électorat en quatre, mais cette fois-ci le rapport de forces changerait à gauche. Podemos s'est en effet allié à la petite formation d'extrême gauche Izquierda Unida, héritière du Parti communiste. Ensemble (Unidos Podemos), les sondages leur donnent 4 points de plus qu'au PSOE et davantage de députés. Sur un scénario à la grecque, le parti anti-austérité supplanterait donc le vénérable Parti socialiste, vieux de 137 ans, comme première force d'opposition.

Le Parti populaire arriverait de nouveau en tête, et Ciudadanos serait en quatrième position, derrière Unidos Podemos et le PSOE.

Que va-t-il se passer s'il n'y a toujours pas de majorité au Parlement ?

Même si les conservateurs devraient garder la première place, avec quelque 120 députés sur 350, ils ne seront toujours pas assez nombreux pour gouverner seuls. Comme la dernière fois, d’intenses tractations vont donc suivre le scrutin pour parvenir à former un gouvernement de coalition. S’il arrive en troisième position comme les sondages le prédisent, le PSOE sera en position d’arbitre dans ces négociations.

Comme l’explique Le Figaro, une déroute du Parti socialiste espagnol pourrait conduire son secrétaire général et tête de liste, Pedro Sánchez, à la démission. Il reviendrait alors à un autre socialiste de répondre à l'injonction faite par le dirigeant de Podemos, Pablo Iglesias : "Choisir entre un gouvernement de gauche et un gouvernement du PP."

Quelles sont les alliances possibles pour parvenir à une majorité ?

Le pari de Podemos et d'Izquierda Unida de s'allier pourrait fonctionner. Ensemble, ils auraient davantage de voix et peut-être même plus d'élus que le PSOE, relégué à la troisième place. Leur candidat, Pablo Iglesias, a annoncé qu'il tendrait la main aux socialistes pour former un gouvernement de coalition de gauche.

A droite, Mariano Rajoy table sur la rivalité acharnée entre Podemos et le PSOE pour se maintenir au pouvoir. Il propose une grande coalition que les socialistes refusent. "S'ils n'en veulent pas, je demande que le parti qui a recueilli le plus de voix gouverne", a-t-il annoncé.

Et si les négociations entre les partis échouent à nouveau ?

C’est ce qui se profile. Il semble presque impossible que le Parti socialiste accepte la proposition de Podemos. "Le PSOE ne peut accepter d'entrer dans une alliance qu'il ne dirigerait pas" car cela serait sa mort, estime un responsable socialiste. Il pourrait par ailleurs refuser l'alliance au nom de la défense de l'unité de l'Espagne car Unidos Podemos est favorable à la tenue d'un référendum d'autodétermination en Catalogne, une option inacceptable pour les socialistes.

Si le Parti socialiste conservait sa deuxième place, le renoncement à ce référendum d’autodétermination sera la condition express pour qu’il tende la main à Podemos pour former une alliance des gauches dirigée par un socialiste.

Un scénario difficile à envisager tant la méfiance est forte entre les deux partis rivaux. Certains socialistes estiment que Podemos trouvera un prétexte pour refuser l'alliance, terminer son travail "d'élimination" du PSOE et remporter les élections dans quatre ans.

Du coup, quelle est l’issue la plus probable ?

Le PP devrait former un gouvernement minoritaire, qui obtiendrait la confiance du Parlement grâce à l'abstention du PSOE et de Ciudadanos. "C'est le scénario le plus probable, et de loin", estime Pablo Simon, professeur de sciences politiques à l'université Carlos III. "Il est plus probable que notre seule option soit de nous abstenir plutôt que gouverner avec Podemos", reconnaît un membre de l'équipe de campagne socialiste. Ce gouvernement serait formé à l'automne. Les partis ont tous promis qu'il n'y aurait pas de troisième tour.

Encore le Parti populaire, malgré tous les scandales de corruption ?

Le Parti populaire oui, mais a priori, sans Mariano Rajoy. Ciudadanos demande ouvertement le départ de Rajoy contre son appui au PP. Les socialistes refusent de se prononcer publiquement sur cette option, mais en privé ils l'envisagent. "Il y aura une pression énorme pour qu'il s'en aille", pronostique Fernando Vallespin, professeur à l'Université autonome de Madrid.

Mariano Rajoy, 61 ans, dirige le Parti populaire depuis 2004. Des années noires pour le PP en termes de corruption. Selon plusieurs enquêtes judiciaires, l'argent public coulait à flots dans les régions tenues par le parti et était parfois utilisé pour du financement politique. Rajoy n'a jamais été mis en cause par la justice mais ses adversaires l'accusent d'avoir "une responsabilité politique" dans ces affaires.

La récente mise en cause de son ministre de l’Intérieur n’arrange rien. Après la diffusion dans la presse d’enregistrements de conversations avec le responsable de la lutte contre la corruption en Catalogne, Jorge Fernadez Diaz est accusé d’avoir instrumentalisé ses services pour tenter de discréditer les indépendantistes catalans. Mariano Rajoy sera seul à décider, mais s'il reste, les tractations seront plus longues.

J'ai eu la flemme de tout lire, pouvez-vous me faire un résumé ?

Les Espagnols sont de nouveau appelés aux urnes, dimanche 26 juin, six mois après l’échec des précédentes législatives, qui ont mis fin au bipartisme et marqué l’émergence de deux partis : Podemos à l’extrême gauche et Ciudadanos au centre droit. Faute de majorité absolue, le Parti populaire (droite) et le Parti socialiste (gauche) ont échoué à composer un gouvernement.

Pour mettre fin au blocage institutionnel, le roi Felipe VI a donc convoqué de nouvelles élections, avec les mêmes candidats. Cette fois-ci, Podemos pourrait arriver en deuxième position, devant le Parti socialiste. Un résultat qui ne changera pas fondamentalement la donne pour la formation d'un gouvernement, car aucune des quatre grandes formations n'atteindrait la majorité nécessaire. Et des blocages persistent pour la mise en place d'alliances. Mais la droite devrait tirer son épingle du jeu et former un gouvernement minoritaire, tous les partis ayant assuré qu'il n'y aurait pas de troisième scrutin. 

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