L’ex-porte-avions Foch, ancien fleuron de la marine française, passé sous pavillon brésilien en 2000, va être coulé dans l'Atlantique en raison de la détérioration de sa coque. Il n’y a pas d’autre solution qu'"un naufrage spontané", estime la marine brésilienne dans un communiqué. Une zone située à quelque 350 km au large des côtes brésiliennes, avec 5 000 mètres de profondeur, a été considérée comme étant "la plus sûre" pour ce sabordage.>>> Brésil : on vous raconte la longue dérive du porte-avions "Foch" qui s'achèvera au fond de l'océan AtlantiqueCe n’est pas une première. En 2004, la Royal Navy avait sabordé une ancienne frégate au large de la Cornouaille et en 2006, ce sont les États-Unis qui ont coulé un ancien porte-avions, l’Oriskany, au large de la Floride. Ils avaient toutefois pris la précaution de le dépolluer avant. Car malgré les dangers écologiques et sanitaires qu’induit la démolition de ces bâtiments, il n’existe pas réellement d’instruments juridiques internationaux l’encadrant. Pour l’heure, seule la convention de Bâle de 1989 établit un règlement communautaire sur les transferts de déchets, en interdisant notamment l'exportation de déchets dangereux comme l’amiante vers des pays non membres de l'OCDE. Mais elle ne concerne que les navires d'une jauge brute inférieure à 500 et est souvent contournée par la pratique du dépavillonnement.Des démantèlements majoritairement effectués dans des pays mal équipésÀ l’heure actuelle, selon la Commission européenne, les Européens détiennent 35% de la flotte mondiale de commerce, soit près de 15 000 navires dont 10 000 sous pavillon d’un État membre. Mais seuls 7% de ces navires sont démantelés en Europe. L'organisation professionnelle Armateurs de France, estime qu'en tout, 90 à 95% des déconstructions de navires s'effectuent en Inde, Bangladesh, Chine et Turquie. "Il y a des risques physiques pour les ouvriers parce qu'ils sont mal protégés, dans ces pays-là, pointe Jacky Bonnemains, porte-parole de l’association de défense environnementale Robin des bois. Ils ont à peine des gants, pas toujours de casque ni de chaussures de sécurité. Il y a des risques d'accidents soudains, souvent mortels ou conduisant à des mutilations". En 2013, le démantèlement en Turquie de l'ex-Pacific Princess, le paquebot de la série La croisière s’amuse, a causé la mort de deux ouvriers, empoisonnés par des gaz toxiques échappés de la salle des machines. L’Italie, qui avait passé le Pacific Princess sous pavillon exotique juste avant son transfert, ne sera pas jugée responsable.Pour tenter de pallier ce type de drame, les États membres de l'Organisation maritime internationale (OMI) ont adopté en 2009 à Hongkong, la première convention internationale pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires en fin de vie. La France a été le premier des 15 États à la ratifier. Mais elle n’est toujours pas entrée en vigueur. En 2013, les Européens ont donc élaboré un règlement s’en inspirant, en vigueur depuis janvier 2019. Il met en place des mesures spécifiques applicables aux grands navires de mer commerciaux (existants et neufs) d'une jauge brute supérieure ou égale à 500 tonneaux battant pavillon d'un État membre de l'UE. Il ne s'applique pas aux navires de guerre ou aux autres navires appartenant à un État.Un inventaire des matières dangereusesCe règlement contraint les propriétaires des bâtiments d'avoir à bord un inventaire des matières dangereuses (amiante, métaux lourds, hydrocarbures, substances appauvrissant la couche d’ozone…), certifié par l'administration et établit que le recyclage ne peut être effectué que dans une installation agréée par Bruxelles. La liste européenne comprenait en avril 2022, 46 installations agréées, 37 en Europe (UE + Norvège et Royaume-Uni), huit en Turquie et une aux États-Unis. En France, les quatre installations agréées sont Démonaval Recycling (Seine-Maritime), Gardet & de Bézenac Recycling – groupe Baudelet Environnement (Seine-Maritime), GPM Bordeaux (Gironde) et Navaléo – groupe Recycleurs Bretons (Finistère).