Pollution du plastique : "Il faut changer de comportement", alerte la journaliste Dorothée Moisan
"L'industrie va essayer de parler d'alternative. Mais c'est exactement comme quand on parle du changement climatique", il faut "carrément changer de comportement", a alerté lundi 29 mai sur franceinfo la journaliste Dorothée Moisan, spécialiste des questions d’environnement, autrice de Les Plastiqueurs, enquête sur ces industriels qui nous empoisonnent, alors que les représentants de 175 nations aux ambitions divergentes se sont retrouvées au siège de l'Unesco à Paris pour une deuxième session du comité international de négociation, sur les cinq prévues, pour aboutir à un accord historique couvrant l'intégralité du cycle de vie du plastique.
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Selon Dorothée Moisan, "des technologies vont permettre d'avoir 80 % de plastique à partir d'un baril de pétrole". Elle rappelle par ailleurs que les industriels du plastique sont "extrêmement présents dans les négociations" derrière les Etats.
franceinfo : Est-ce que l'industrie du plastique fait des efforts ?
Dorothée Moisan : Elle fait des efforts pour produire du plastique. C'est une certitude. On estime que la production de plastiques vierges est en progression de 3 % par an. Les producteurs de plastique sont principalement la pétrochimie et les producteurs de pétrole, de gaz et de charbon, qui ont souvent des filiales ou qui produisent eux-mêmes des plastiques. Donc aujourd'hui, dire qu'ils font des efforts, on est un peu loin de la réalité. Et d'ailleurs, ils sont extrêmement présents dans les négociations. Ils sont vraiment derrière les Etats, notamment les États-Unis. On a derrière eux des personnes de l'industrie qui sont là.
Le poids de l'industrie du plastique est considérable. C'est 1 000 milliards de dollars par an.
C'est effectivement une puissance énorme. Et ce que l'on dit assez peu, c'est que le plastique c'est la planche de salut de l'industrie pétrochimique. Avec le changement climatique, le pétrole, le gaz naturel, les voitures thermiques vont être remplacés progressivement par des voitures électriques. Ils vont être de plus en plus en difficulté. Pour donner un exemple, un baril de pétrole aujourd'hui, ça donne à peu près 10 % de plastique. Il y a des raffineries où l'on est à 40 %. Et on est en train de mettre au point des technologies qui vont permettre d'avoir 80 % de plastique à partir d'un baril de pétrole.
Est-ce que c'est une loupe de toutes les problématiques qui se posent sur les questions de climat et d'environnement en général ?
C'est une loupe parce qu'on revoit un peu la même problématique qu'avec le climat et le fait de changer d'énergie. L'industrie va essayer de parler d'alternative, de comment faire pour faire autre chose. Mais c'est exactement comme quand on parle du changement climatique. Ce n'est pas changer une chose pour une autre. C'est carrément de changer de comportement.
Est-ce que l'on pourrait vivre sans plastique ?
Totalement, non. Ne serait-ce que pour des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques, on aura du plastique. Je vais prendre un exemple tout simple : le gel douche. L'industrie va vous dire, 'maintenant on fait des gels douche avec des bouteilles en plastique recyclé'. Le plastique est toxique. Recycler un produit toxique ne va pas aider. Au contraire, on augmente la toxicité. Pourquoi est-ce qu'on ne se dit pas, on va prendre du savon ? Cela veut tout simplement dire que, pour la plupart des personnes, on doit réapprendre à prendre du savon, ce qui n'est pas un énorme drame, mais qui va permettre de se passer de plastique pour un produit de tous les jours.
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