Glyphosate : "On ne peut pas constater que c'est dangereux et ne rien faire", estime Julien Bayou
Quelques jours après la première victoire d'un Américain malade du cancer contre l'entreprise Monsanto, les Verts veulent déposer un recours devant le tribunal administratif pour faire interdire en France les herbicides Monsanto à base de glyphosate.
"Il faut une suspension pour les particuliers" affirme Julien Bayou ce dimanche 19 août sur franceinfo, à propos de l'herbicide Roundup de la firme Monsanto. Quelques jours après la première victoire d'un Américain malade du cancer contre l'entreprise Monsanto, les Verts veulent déposer un recours devant le tribunal administratif pour faire interdire en France les herbicides Monsanto à base de glyphosate. Pour le porte-parole d'EELV, "il faut arrêter de tergiverser".
franceinfo : En principe, la décision de la justice californienne ne peut pas faire jurisprudence en France, de quelle manière peut-elle être prise en compte ?
Julien Bayou : la décision californienne est historique bien sûr, mais ce qui est intéressant c'est que la juridiction s'est fondée sur les documents internes de Monsanto, qui montrent que la société est au courant depuis 1984 des dangers cancérigènes de son produit "Roundup". Et ça, c'est un élément nouveau que les autorités doivent prendre en compte. Donc finalement il y a une présomption de fraude, et dans ce cas-là, les autorisations de mise sur le marché devraient être réexaminées. On a constaté que le ministre de l'Écologie parlait de principe de précaution mais que pour l'instant il n'y avait pas les actes qui suivaient, et que l'Anses, l'autorité qui devrait réexaminer, fait silence radio. Et donc on dépose ce référé pour obtenir la suspension des produits dangereux pour les particuliers parce qu'ils ne sont pas du tout formés à l'utilisation d'un produit dangereux. Et concernant les professionnels, on sait que l'agriculture est trop dépendante du glyphosate pour interdire du jour au lendemain, donc on demande le réexamen en urgence de tous ces produits et toutes ces autorisations, et bien sur un plan d'accompagnement des agriculteurs puisqu'ils ont besoin d'un appui financier pour aller vers les alternatives au glyphosate.
Donc en attendant de réexaminer ces autorisations de mise sur le marché, que demandez-vous : un moratoire, une suspension ?
Il faut une suspension pour les particuliers, parce que vraiment c'est un produit qui est dangereux pour l'environnement et pour la santé humaine. Et donc on ne peut pas laisser des jardiniers qui pensent avoir un produit non toxique dans les mains, asperger autour d'eux et mettre en danger l'environnement et leur santé. Pour les agriculteurs, malheureusement, la France est trop dépendante des produits chimiques. Et donc ce ne serait pas raisonnable: il faut concilier le pragmatisme et le principe de précaution. Mais il faut un accompagnement de sortie. Il y a eu beaucoup de débat sur le glyphosate, et que le gouvernement a soufflé le chaud et le froid, et parlait d'une sortie d'ici trois ans "mais seulement si" ou avec beaucoup de dérogations. Il faut arrêter de tergiverser. En fait, ce que nous apprend la décision californienne c'est qu’on est face à un nouvel amiante, un nouveau scandale de chloredécone. On ne peut pas constater que c'est dangereux et ne rien faire.
Mais Monsanto fait appel de cette condamnation et assure que son produit n'était pas cancérigène, c'est parole contre parole non ?
C'est parole contre parole sauf que la parole de Monsanto est quand même nettement décrédibilisée. Il y a beaucoup d'études qui classent le glyphosate comme cancérigène, et les propres scientifiques de Monsanto, et ça on l'a découvert avec les Monsanto Papers – les documents internes qui avaient fuité – disent que le problème c'est le glyphosate, mais aussi les effets cocktail des produits qu'on met avec. Et malheureusement l'ANSES ne s'est prononcé que sur le glyphosate tout seul. Et donc on a un problème plus général. Même Nicolas Hulot disait qu'on a un problème avec les groupes de pression qui parfois tiennent la main du législateur. Donc on a un vrai problème de lobby et on a une emprise de Monsanto Bayer sur les décisions publiques.
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