Le Grenelle de l'environnement n'est pas "mort", assure l'inspirateur de la taxe carbone dans Le Parisien/Aujourd'hui
La Fondation Hulot a suspendu sa participation au Grenelle fin mars, en dénonçant l'abandon de la taxe carbone et le recul des responsables politiques sur la question de l'écologie.
Nicolas Hulot déplore que la taxe carbone soit devenue "l'objet d'une navrante dispute politicienne" et dénonce la tentation de marginaliser le débat écologique.
"Loin de moi l'idée de dire que le Grenelle est mort ou inutile", déclare le président de la Fondation Hulot dans l'édition de vendredi du Parisien/Aujourd'hui en France. "Dans le domaine du logement avec l'éco-prêt à taux zéro, du transport avec le bonus-malus écologique, on progresse. Pour autant, le Grenelle 2 n'est toujours pas voté."
"Les écolo-climato-sceptiques ont un succès médiatique grandissant et l'écologie est devenue un simple ingrédient de la tambouille politique", déplore-t-il. "On peut mentir à tout le monde une fois, mais pas tout le temps à tout le monde. On ne peut pas enfiler les mensonges, les injures et les anathèmes dans un débat aussi essentiel (...) Entre un Jean Jouzel, vice-président du GIEC (le Groupe d'experts sur le climat mandaté par l'ONU) et la morgue, la suffisance et la grossièreté de Claude Allègre (fer de lance des écolo-sceptiques français, ndlr), j'ai fait mon choix", conclut Nicolas Hulot.
Vendredi matin, sur RTL, confirmant sa position nuancée quelques jours après le retrait de sa fondation, Nicolas Hulot a réaffirmé que "le dialogue n'est pas rompu". Toutefois, "on demande des clarifications", a-t-il souligné. "On est un peu déçu" et "plus que surpris", a-t-il indiqué, évoquant "un sentiment de gâchis" et dénonçant "un travail de sape systématique des uns et des autres sur une mesure complexe qui devait précéder une réforme de la fiscalité".
Pour son retour médiatique, après trois mois de silence, Nicolas Hulot a exprimé "une volonté d'apaiser", soulignant que grâce au Grenelle, "la France est leader en Europe sur ces sujets". Mais la question est de savoir, désormais, s'il y a "une remise en cause des ambitions écologiques après les régionales".
La Fondation Nicolas Hulot ( FNH) a annoncé lundi 29 mars qu'elle suspendait sa participation au Grenelle de l'environnement. Ce retrait est survenu quelques jours après le report sine die de la taxe carbone. "L'abandon pur et simple de la taxe carbone (...) est symptomatique d'un net recul de la classe politique qui, à droite comme à gauche, n'a pas pris la mesure des enjeux écologiques, et les considère comme une variable d'ajustement politique", regrettait alors la FNH.
Un sondage plébiscite Hulot
L'animateur de télévision écologiste est considéré par une nette majorité comme la personnalité défendant le mieux l'environnement, selon un sondage BVA pour La Matinale de Canal + de vendredi. Choisissant sur une liste, 53% des sondés ont vu en lui la personnalité qui défend "le mieux l'environnement", 37% citant le photographe-cinéaste Yann Arthus-Bertrand et 25% l'eurodéputé Europe Ecologie Daniel Cohn-Bendit. Viennent ensuite à égalité à 16% le numéro un des Verts Cécile Duflot et le ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo, puis la présidente de Cap 21 (ex-MoDem) l'eurodéputée Corinne Lepage, ex-aequo avec le député-maire Verts de Bègles Noël Mamère. Les deux ministres Nathalie Kosiuscko-Morizet et Chantal Jouanno ferment le ban à 8%.
27% des personnes interrogées voient en Nicolas Hulot leur candidat écologiste préféré pour la présidentielle de 2012, 4 points devant Daniel Cohn-Bendit et 13 points devant Cécile Duflot.
Sondage réalisé par internet du 31 mars au 1er avril auprès d'un échantillon de 1127 personnes (méthode des quotas).
Le Grenelle lancé en grande pompe par le nouveau président Sarkozy en 2007
Pour expliquer son retrait, la Fondation a déploré en particulier que l'engagement des participants aux groupes de travail "soit de moins en moins suivi d'effet". Pour Cécile Ostria, directrice générale de la FNH, cette suspension s'impose "dans un souci d'efficacité et de respect vis-à-vis des 750.000 citoyens qui ont signé le Pacte écologique" porté par Nicolas Hulot lors de la campagne présidentielle de 2007.
"Les événements de ces derniers mois montrent que nous n'avons pas été compris", a expliqué Cécile Ostria. "Alors que les crises écologiques et climatiques menacent directement l'économie et l'emploi, et en particulier les plus vulnérables d'entre nous, le discours politique nous explique presque systématiquement que l'environnement est une contrainte pour l'économie et qu'il crée des déséquilibres sociaux", déplore-t-elle.
Les principaux engagements du Grenelle ont été annoncés lors d'un lancement en grande pompe par Nicolas Sarkozy en octobre 2007 à l'issue d'une consultation inédite rassemblant autour d'une même table représentants des ONG, du patronat, des syndicats, des collectivités locales et de l'Etat.
Son retrait du Grenelle n'empêchera pas la FNH d'être présente, selon un communiqué, avec des projets concrets de mobilisation des citoyens sur la biodiversité et le climat tout au long de l'année 2010. Elle en profitera également pour dresser un bilan du Grenelle de l'environnement, trois ans après son lancement, et restera mobilisée autour du vote du projet de loi Grenelle II.
WWF demande une réunion d'urgence à l'Elysée
Pour le WWF, l'annonce faite par la Fondation Nicolas Hulot de se retirer des comités de suivi du Grenelle, suite à l'abandon de la taxe carbone, "est une très mauvaise nouvelle". L'organisation a demandé lundi au président de la République d'organiser "dans les plus brefs délais" une réunion avec les ONG associées au Grenelle de l'environnement. Pour Serge Orru, l'abandon de la taxe carbone ne constitue "pas un enterrement mais un reniement du président et un très mauvais signal". Cette annonce "fait suite à un certain nombre d'annonces d'abandon et de remises en question : déclarations du président de la République au salon de l'Agriculture, report de l'étiquetage écologique, rapport léonin sur l'éolien, 3e EPR, etc...) qui donnent à penser que le Grenelle de l'environnement n'a été qu'une parenthèse que les conséquences du second tour des régionales seraient en train de clore", a souligné le WWF dans un communiqué.
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