Jeux asiatiques d'hiver en Arabie saoudite : "Écrire l'histoire avec le sport, c'est essentiel pour un régime autoritaire", analyse un spécialiste en géopolitique du sport
L'Arabie saoudite a été désignée pour accueillir les Jeux asiatiques d'hiver dans sept ans. L'événement sportif sera organisé à Neom, une mégapole futuriste en construction dans le nord-ouest du royaume désertique, a annoncé mardi le Conseil olympique d'Asie (OCA).
L'Arabie saoudite accueillera les Jeux asiatiques d'hiver en 2029 dans une ville en pleine construction, Neom, un chantier à 500 milliards d'euros. "Écrire l'histoire avec le sport, c'est essentiel pour un régime autoritaire", analyse mardi 4 octobre sur franceinfo Jean-Baptiste Guégan, spécialiste en géopolitique du sport qui décrit une opération de communication en plus d'une "hérésie environnementale et énergétique".
franceinfo : Jusqu'à quel point ce projet est important pour le Royaume ?
Jean-Baptiste Guégan : Le projet Neom s'inscrit dans cette volonté de mettre en avant l'Arabie saoudite, de montrer un autre visage du pays. Que ce soient les Jeux asiatiques d'été organisés en 2034 ou les Jeux asiatiques d'hiver en 2029, même si ces derniers sont quand même une surprise. On a déjà eu l'exemple avec Pékin 2022 : ces Jeux ont été organisés avec zéro neige naturelle, que de la neige artificielle. Donc pourquoi ne pas y aller ? Même si c'est une hérésie environnementale et énergétique.
500 milliards de dollars pour la construction de Neom, cette mégalopole sur les bords de la mer Rouge : ce n'est pas un gouffre financier ?
Si on le regarde sous l'angle d'une manifestation qui dure quelques semaines, oui, c'est un gouffre financier. L'idée, c'est de développer le nord de l'Arabie saoudite. En vérité, c'est un sujet plus global. Ces Jeux asiatiques d'hiver ne sont qu'un prétexte, une cerise sur le gâteau. C'est ce que l'Arabie saoudite va chercher pour faciliter le financement du projet Neom. Aujourd'hui, l'Arabie saoudite ne peut pas le financer. Elle a besoin de bailleurs étrangers. Donc organiser de tels événements sert à trouver ces bailleurs.
Qu'est-ce que l'Arabie saoudite peut gagner dans un tel projet ?
La même chose que le Qatar et la Coupe du monde de football : des polémiques, mais aussi une vraie exposition, pendant longtemps. Le sport, c'est récurrent, c'est régulier et ça parle à tout le monde. L'idée, c'est de maîtriser le narratif, le récit qu'on fait de vous. Le sport sert à ça. Il va permettre de raconter une autre histoire et de l'écrire soi-même. C'est exactement ce que cherche Mohammed ben Salmane. Pour un régime autoritaire, ce n'est pas juste important, c'est essentiel.
C'est donc avant tout une véritable opération de communication ?
Oui, et aujourd'hui c'est le problème des grandes manifestations sportives internationales. Elles sont organisées avant tout pour des raisons de soft power et de visibilité internationale. Le vrai souci maintenant, c'est de responsabiliser les fédérations internationales pour qu'elles évitent de donner ce type d'événement sportif à ce type de régime. Tout le monde parle du boycott au Qatar. Le vrai problème, c'est la Fifa.
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